Actualités du droit
« Le Monde » et le
gentil monde de l'OTAN
Gilles
Devers
Jeudi 19 avril
2012
Le Monde
est un plaisant-triste, pour reprendre
le mot de Gainsbourg. Comme prétentieux
et donneur de leçons, c’est un
must. Un peu comme
France-Inter. Ces gens-là étant
très intelligents et très savants, le
Dieu des médias leur a donné le diplôme
« de référence », c’est-à-dire de
serviteur du consensus dominant. Ils
connaissent une raison cachée, qui est «
La Vérité » et s'ils consentent parfois
à faire quelques visites d’inspection
sur le terrain, encore appelées «
reportages », c'est pour vérifier que
tout se passe bien comme prévu. Mais
voir la société telle qu'elle est,
impossible. Ce serait trop dangereux.
Si on veut rester
pépère « de référence », il faut trouver
un équilibre : piquer de grosses colères
sur des sujets périphériques, histoire
de faire genre, et pour le reste
défendre la ligne du parti. En politique
étrangère,
Le Monde est devenu le bulletin
officiel de l’OTAN et de ses
succursales.
Le Monde ne veut fâcher ni les
institutions, ni les annonceurs qui lui
maintiennent la tête hors de l’eau.
Chacun a pu apprécier la haute tenue de
ses écrits sur la Libye, la Côte
d’Ivoire ou l’Iran... Heureusement qu’on
peut se passer de cette sauce officielle
en cherchant les infos sur le net.
Voici un
exemple rigolo avec le dernier rapport
du Sipri (Stockholm
International Peace Research Institute),
un institut privé spécialisé dans
l’observation des affaires militaires,
publié ce mardi 18. Je vous livre en
intégral ce qu’ont publié
Le Monde et
Il Manisfesto.
Le Monde (texte
non signé)
Les dépenses
militaires mondiales se sont stabilisées
en 2011
Les dépenses
militaires dans le monde se sont
stabilisées en 2011 en raison de la
crise économique mondiale, totalisant 1
740 milliards de dollars, soit 1 320
milliards d'euros, selon un rapport
publié mardi 17 avril par le Sipri (Stockholm
International Peace Research Institute),
un institut international indépendant,
spécialisé dans les conflits, les
armements, le contrôle des armes et le
désarmement, basé à Stockholm.
« La légère augmentation de 0,3 % en
2011
[par rapport à
2010]
marque la fin d'une course continue
d'augmentation des dépenses militaires
enregistrées entre 1998 et 2010 »,
relève le rapport.
Le Sipri
précise que la moyenne annuelle
d'augmentation de ces dépenses a été de
4,5 % entre 2001 et 2009. Il souligne
que parmi les premiers pays acheteurs
d'armes, six – le Brésil, la France,
l’Allemagne, l’Inde, le Royaume Uni et
les Etats-Unis – ont réduit leurs
budgets militaires en 2011, tandis que
la Chine et la Russie les ont
« nettement
augmentés ».
«
Le contrecoup de la crise économique
mondiale, en particulier les mesures de
réduction des déficits aux Etats-Unis et
en Europe ont finalement stoppé - du
moins pour l'instant - l'augmentation
enregistrée pendant une décennie des
dépenses militaires »,
explique M. Sam Perlo-Freeman, chercheur
au Sipri.
Aux Etats-Unis,
premier budget militaire mondial, les
dépenses dans ce secteur devraient
diminuer en raison du retrait américain
d’Irak et du désengagement
d’Afghanistan, selon le Sipri. De son
côté, la France, l’un des trois premiers
budgets militaires d’Europe occidentale
avec l'Allemagne et le Royaume-uni, a
réduit de 4 % son budget militaire
depuis 2008 en raison de mesures
d'austérité pour diminuer le déficit
budgétaire. Dans la même période, les
réductions ont été plus modestes en
Allemagne (- 1,4 %) et au Royaume-Uni (-
0,6 %), ajoute le Sipri.
La Russie a au
contraire augmenté de 9,3 % ses dépenses
militaires à 71,9 milliards de dollars
en 2011, dépassant la France et le
Royaume-Uni et devenant le 3e
budget militaire de la planète, relève
l'institut.
Le Sipri note
que le Moyen-Orient est la région où
« une claire
augmentation »
des dépenses militaires est perceptible
dans la plupart des pays. Mais il ajoute
qu'en l'absence de données fiables pour
des pays-clés comme l’Iran et les
Emirats arabes unis, il est difficile de
totaliser les budgets militaires de
cette région.
Mon commentaire
Donc, l’OTAN est
adorable. Tous les pays membres font un
effort, à commencer par les super-sympas
US, qui en plus vont se retirer d’Irak
et d’Afghanistan. En revanche, vous avez
bien noté les méchants : la Russie et la
Chine, qui ont augmenté leurs dépenses.
Bien sûr, Le Monde ne donne pas
le chiffre des dépenses des US ou de
l’OTAN cumulés. Le seul chiffre cité de
tout l’article est celui de la Russie.
Et puis, comme une signature, un coup de
clavier contre l’Iran, pays non fiable.
Evidemment, Le
Monde ne va perdre son encre à
donner les chiffres de la dépense US,
plus de 40% pour ce seul pays, et
consacré à la domination du monde, car
ni le Canada ni le Mexique
n’ont en projet d’envahir les US.
De même, hors de question de décrire
comment les US, après les fiascos
irakien et afghan, redéfinissent leur
politique de domination, qui doit
devenir plus efficace et moins coûteuse.
Hors de question aussi d’expliquer le
réinvestissement massif des US dans la
région Asie/Pacifique, qui justifie en
réplique l’effort de guerre de la Russie
et de la Chine.
Manlio Dinucci,
journaliste d’Il
Manifesto – journal qui publie ces
infos majeures à la une – a lu le même
rapport, mais il en fait un compte rendu
un peu plus précis...
Il Manifesto,
Manlio Dinucci
La course folle de
la dépense militaire
Pendant le temps que vous mettrez à lire
cet article, on aura dépensé dans le
monde 10 millions de dollars de plus en
armes, armées et guerre.
La
dépense militaire mondiale se monte en
effet à 3,3 millions de dollars à la
minute. Soit 198 millions par heure, 4,7
milliards chaque jour. Ce qui équivaut à
1.738 milliards de dollars en une année.
Ces données sont celles de 2011,
publiées hier par le Sipri, le fameux
institut international dont le siège est
à Stockholm.
Les Etats-Unis sont
toujours la locomotive de la dépense
militaire, avec 711 milliards de
dollars, équivalents à 41% du total
mondial. La coupe annoncée de 45
milliards annuels dans la prochaine
décennie reste encore à voir. Les
économies devraient être effectuées en
réduisant les forces terrestres et en
restreignant les pensions (assistance
médicale comprise) des anciens
combattants.
Objectif du Pentagone
: rendre les forces étasuniennes plus
agiles, plus flexibles et prêtes à être
déployées encore plus rapidement. La
réduction des forces terrestres prend
place dans la nouvelle stratégie, testée
avec la guerre en Libye : utiliser
l’écrasante supériorité aérienne et
navale étasunienne et en faire assumer
la plus grosse charge par les alliés.
Mais les guerres n’en coûtent pas moins
pour autant : les fonds nécessaires,
comme cela s’est passé pour la guerre
contre la Libye, sont autorisés par le
Congrès à chaque fois, en les ajoutant
au budget du Pentagone. Et s’ajoutent
aussi à cela d’autres postes à caractère
militaire, parmi lesquels environ 125
milliards annuels pour les militaires au
repos et 50 pour le Département de la
sécurité de la patrie, portant la
dépense étasunienne à environ la moitié
de celle mondiale.
Dans les estimations
du Sipri, la Chine reste au deuxième
rang par rapport à 2010, avec une
dépense estimée à 143 milliards de
dollars, équivalents à 8% de la dépense
mondiale. Mais son rythme de croissance
(170% en termes réels en 2002-2011) est
plus grand que celui de la dépense
étasunienne (59% pour la même période).
Cette accélération est due
fondamentalement au fait que les USA
sont en train d’opérer une politique de
« containment » de la Chine,
déplaçant de plus en plus le centre
focal de leur stratégie dans la région
Asie/Pacifique. En rapide augmentation
aussi la dépense de la Russie, qui
passe, avec 72 milliards de dollars en
2011, du cinquième au troisième poste
parmi les pays ayant les plus grandes
dépenses militaires.
Suivent la
Grande-Bretagne, la France, le Japon,
l’Arabie saoudite, l’Inde, l’Allemagne,
le Brésil et l’Italie. La dépense
militaire italienne est estimée par le
Sipri, pour 2011, à 34,5 milliards de
dollars, équivalents à environ 26
milliards d’euros annuels.
L’équivalent d’une grosse loi de
Finances.
Dans la répartition
régionale, l’Amérique du Nord, l’Europe
et le Japon totalisent environ 70% de la
dépense militaire mondiale : c’est donc
la triade, qui jusqu’à présent a
constitué le « centre » de l’économie
mondiale, qui investit les plus grandes
ressources dans le domaine militaire.
Ceci a un effet de répercussion sur les
régions économiq-tuement moins
développées : par exemple, l’Afrique
compte à peine 2% de la dépense
militaire mondiale, mais l’Afrique du
Nord a enregistré la croissance la plus
rapide de la dépense militaire dans les
sous-régions (109% en termes réels en
2002-2011) et celle du Nigeria aussi est
en croissance rapide.
La dépense militaire
continue ainsi à augmenter en termes
réels. Selon les estimations du Sipri,
elle a grimpé à 250 dollars annuels pour
chacun des 7 milliards d’habitants de la
planète. Un chiffre apparemment
négligeable pour un citoyen moyen d’un
pays comme l’Italie. Mais qui,
additionné aux autres, devient un fleuve
d’argent public qui se perd dans un
puits sans fond. Avant même de tuer
quand elle est convertie en armes et
armées, la dépense militaire tue en
soustrayant des ressources vitales à des
milliards d’êtres humains.
Mon commentaire
Sans commentaire.
Laissons les journalistes « de référence
» présenter leur meilleur profil à leurs
chers annonceurs.
Ouaip, mais quand
même,... ces abrutis prétentieux nous
gavent.
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