Les
actualités du droit
La démocratie US
prend ses quartiers au Caire
Gilles Devers
Jeudi 15 août 2013
Le président Morsi,
élu démocratiquement au printemps 2002,
a été renversé par l'armée le 3 juillet
2013. Un coup d’Etat militaire, donc, et
signé en direct devant toutes les télés.
Mais pas du tout,
nous avait expliqué John Kerry le 1°
août, c’était pour rétablir la
démocratie : « Des millions et des
millions de gens ont demandé à l'armée
d'intervenir. Tous avaient peur d'une
descente dans le chaos et la violence.
Et l'armée n'a pas pris le pouvoir,
d'après ce que nous pouvons en juger,
jusqu'à présent. Pour conduire le pays,
il y a un gouvernement civil. En fait,
elle rétablissait la démocratie ».
C’est un truc
incroyable : ce pays qui est le premier
fauteur de troubles dans le monde, du
Vietnam à la Lybie en passant par
l’Irak, qui a créé ou soutenu toute les
pires dictatures à partir du moment où
ça lui permettrait de contrôler le
pétrole, ce pays qui injurie les droits
de l’homme avec Guantanamo ou le système
PRISM de surveillance du monde, qui
asservit toute idée de démocratie au
Proche-Orient au nom de son soutien à
Israël, ce pays qui refuse de signer les
grands textes protecteurs de droits de
l’homme, continue à faire le beau en
distribuant le diplômes de démocrates.
Donc, un diplôme pour Abdel Fattah Al-Sissi…
Oui, mais voilà,
hier a été un jour dramatique pour
l’Egypte, avec un bilan provisoire du
gouvernement de 278 morts. Aucun chiffre
disponible pour les blessés. Les
chiffres réels sont à multiplier : hier,
c’était des scènes de guerre au Caire,
et les médecins témoignent de tirs par
balles dans le thorax. Un massacre… Et
pour finir, le rétablissement de l’état
d’urgence, qui avait été le régime
appliqué pendant toute l’ère Moubarak,
de 1981 à 2012 : couvre-feu,
interdiction des rassemblements,
fonction judiciaire transférée aux
militaires, fouilles et surveillances
sans avoir à justifier de motif…
John Kerry a
retrouvé un micro pour condamner ces
évènements mais en les qualifiant de
« lamentables » alors qu’ils sont
criminels… et banalisant pour appeler à
des nouvelles élections… démocratiques
et sincères bien sûr, organisées par le
démocrate Abdel Fattah Al-Sissi pendant
que Mohamed Morsi reste en détention
illégale : « La responsabilité revient
au gouvernement intérimaire et l’armée,
qui à eux deux ont l’ascendant dans ce
conflit, d’empêcher davantage de
violence et de proposer des options
constructives parmi lesquelles le
remaniement de la Constitution et
l’organisation d’élections législatives
et présidentielle ».
Pour traiter le
fond de la question, je ne peux mieux
faire que citer ce qu’a écrit M.
Saadoune, dans Le Quotidien d’Oran,
la semaine dernière :
« Les médias qui
parlent d’embarras américain se trompent
clairement. Israël le sait, toute
démocratisation dans un pays comme
l’Egypte aboutira inéluctablement à une
remise en question de Camp David et à un
rapport très différent aux Palestiniens.
Quand l’armée égyptienne intervient et
reprend le peu de pouvoir qu’elle avait
concédé, c’est Camp David qui est encore
plus protégé. Quand un processus
démocratique échoue - et en Egypte il ne
peut être question de démocratie quand
une moitié d’Egyptiens est traitée déjà
en « terroriste -, Israël, la
« prétendue seule démocratie au
Proche-Orient », est tranquille ».
Comme vient de le
faire Mohammed El-Baradei, devenu
vice-président grâce aux militaires
alors qu’il avait renoncé à se présenter
aux élections… les libéraux progressiste
adorés dans les pays occidentaux, vont
tous se casser, et finiront haïs d’avoir
été la caution immature du clan des
militaires. Et ce n’est pas demain la
veille que les militaires organiseront
des élections ouvertes aux Frères
musulmans, alors que tous les leaders
sont recherchés pour être entaulés. Or,
il n'y a pas de solution démocratique en
Egypte qui exclurait les Frères
musulmans.
La démocratie US
prend donc ses quartiers au Caire. Et va
bien sur continuer à former les cadres
et financer l’armée qui rétablit si bien
la démocratie, pour 2 milliards de
dollars par an.
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