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Gilad.co

La vérité, l'Histoire et l'honnêteté intellectuelle
Gilad Atzmon

Samedi 13 mars 2010

http://www.gilad.co.uk/writings/truth-history-and-integrity-by-gilad-atzmon.html

En 2007, la célèbre organisation juive américaine de droite ADL (Anti-Defamation League) annonça qu’elle reconnaissait le caractère de « génocide » des événements au cours desquels l’on estime qu’un million et demi d’Arméniens auraient été massacrés.

Le directeur national de l’ADL, Abraham Foxman, insista pour dire qu’il avait pris cette décision après avoir discuté de la question avec des « historiens ». Pour une raison que j’ignore, il a oublié d’indiquer qui étaient ces historiens et il n’a pas non plus fait référence à leur crédibilité ou à leur domaine de recherches. Toutefois, Foxman a consulté aussi un survivant de l’holocauste, qui a apporté son soutien à sa décision ; il s’agissait d’un certain Elie Wiesel, lequel n’est pas vraiment connu pour être un expert mondial du calvaire des Arméniens.

L’idée qu’une organisation juive puisse être sincèrement préoccupée, ou même émue aussi peu que ce soit, par la souffrance d’un autre peuple que le « peuple juif » aurait été de nature à vraiment marquer une transformation monumentale dans l’histoire juive !

Toutefois, cette semaine, nous avons appris que l’ADL est à nouveau empétrée dans le dilemme de la souffrance arménienne. Elle n’est plus tellement convaincue que les Arméniens auraient souffert autant qu’on le dit… Aujourd’hui, elle fait du lobbying au Congrès des Etats-Unis afin que celui-ci ne reconnaisse pas dans l’assassinat d’Arméniens un quelconque « génocide ». Ainsi, l’on a vu l’ADL « protester contre la reconnaissance par le Congrès du génocide arménien » et, au contraire, « défendre l’appel turc à la constitution d’une commission d’historiens chargée d’étudier les événements ».

Comment se fait-il que des événements s’étant produits il y a plus d’un siècle suscitent une telle fureur ? Un jour, ils sont classifiés en tant que « génocide », le lendemain, ils sont ramenés à un cas ordinaire d’assassinat entre des êtres humains. Un « document historique » aurait-il, par hasard, surgi de nulle part, atterri sur le bureau d’Abe Foxman ? Y a-t-il de quelconques révélations factuelles qui auraient conduit à un tel glissement historique ? Je ne le pense pas.

Le comportement de l’ADL en cette matière nous offre un aperçu de la notion d’histoire juive et de la compréhension que les juifs ont du passé. Pour le juif nationaliste et politique, l’histoire est un récit pragmatique ; c’est une reddition de comptes élastique et étrangère à toute méthode scientifique ou universitaire. L’histoire juive se transcende elle-même au-delà de la factualité, de la vérité ou des règles de correspondance avec une vision donnée, quelle qu’elle soit, de la réalité. Elle rejette, par ailleurs, l’honnêteté et l’éthique. Elle leur préfère, et de très loin, une soumission totale, en lieu et place d’une pensée créative et critique. L’histoire juive est un récit phantasmatique qui n’a d’autre fonction que de satisfaire les juifs et de faire en sorte que les goyim se tiennent à carreau. Elle est là pour servir les intérêts d’une tribu particulière et uniquement elle. Dans la pratique, dans une perspective juive, la décision consistant à savoir s’il y a eu (ou non) un génocide arménien est soumise à des intérêts juifs : [cette décision] est-elle bonne pour les juifs ? Est-elle bonne pour Israël ?

Très curieusement, l’histoire n’est pas un truc « particulièrement juif ». Il est établi que pas un seul texte historique juif n’a été écrit entre le 1er siècle (Flavius Josèphe) et le début du 19ème (Isaak Markus Jost).
Durant près de deux millénaires, les juifs ne se sont pas intéressés à leur propre passé (ni à celui de qui que ce fût). Tout du moins, ils ne s’y sont pas suffisamment intéressés pour en faire la chronique. Par expédient, un examen scrupuleux du passé n’a jamais représenté une préoccupation majeure dans la tradition rabbinique. Une des raisons en est probablement le fait qu’il n’y avait pas de réel besoin de déployer un tel effort méthodique. Pour le juif qui vivait dans l’Antiquité et pour celui qui vivait au Moyen Age, il y avait suffisamment de choses dans la Bible pour répondre aux questions les plus pertinentes ayant trait à la vie de tous les jours, au sens qu’avait le fait d’être juif, et au destin. Comme le dit l’historien israélien Shlomo Sand, « un temps chronologique séculier était totalement étranger au « temps diasporique », lequel était informé par l’anticipation de la venue du Messie ».

Toutefois, au milieu du 19ème siècle, à la lumière de la sécularisation, de l’urbanisation et de l’émancipation (en raison, aussi, de l’autorité déclinante des autorités rabbiniques), un besoin émergent d’une cause alternative émergea parmi les juifs européens éclairés. Tout soudainement, le juif émancipé devait décider qui il était et d’où il venait. Il commença aussi à spéculer sur le rôle qui pourrait bien être le sien à l’intérieur d’une société occidentale en train de s’ouvrir rapidement.

C’est à ce moment que l’histoire juive, sous sa forme moderne, a été inventée. C’est aussi l’époque où le judaïsme fut transformé, de religion qu’il était, en « cadastre immobilier », avec des implications racistes et expansionnistes manifestement dévastatrices. Comme nous le savons, le récit que fait Shlomo Sand de la « nation juive » en tant qu’invention purement fictionnelle n’a toujours pas été démenti sur le plan scientifique. Toutefois, le rejet de la factualité ou de tout engagement envers la véridicité est, de fait, symptomatique de toute forme d’idéologie juive collective et de politique identitaire juive contemporaines. La manière dont l’ADL traite la question arménienne n’en est qu’un exemple parmi bien d’autres. La négation par les sionistes de tout passé et de tout héritage culturel et national palestiniens en est un autre. Mais, de fait, n’importe quelle vision juive collective du passé est intrinsèquement judéo-centrique et néglige systématiquement toute procédure universitaire ou scientifique.

Retour à ma jeunesse

A l’époque où j’étais jeune et naïf, je considérais l’histoire comme une matière universitaire sérieuse. Telle que la comprenais, l’histoire avait quelque chose à voir avec la recherche de la vérité, de documents, de chronologies et de faits avérés. J’étais convaincu que l’histoire visait à transmettre un récit raisonnable du passé, fondé sur une recherche méthodologique. Je pensais aussi qu’elle était fondée sur l’assomption que la compréhension du passé est susceptible d’apporter un minimum de lumière à notre présent et même de nous aider à former une perspective d’un avenir meilleur. J’ai grandi dans l’Etat juif et il m’a fallu pas mal de temps pour comprendre que la narration historique juive est tout autre. Dans le ghetto intellectuel juif, vous décidez ce que le futur doit être, puis vous construisez un (soi-disant) « passé » qui lui soit conforme. Très curieusement, c’est exactement la même méthode qui prévaut chez les marxistes, qui modèlent le passé jusqu’à ce qu’il colle parfaitement à leur vision de l’avenir. Comme le dit une vieille blague russe : « Quand les faits ne collent pas avec l’idéologie marxiste, les sociologues communistes modifient les faits (plutôt que d’avoir à réviser leur théorie) ».

Dans ma jeunesse, je ne pensais pas que l’histoire fût une question de décisions ou d’accords politiques entre un lobby sioniste rabique et son rescapé de l’holocauste préféré. Dans les historiens, je voyais des chercheurs engagés dans une recherche en bonne et due forme et respectant certaines procédures strictement définies. J’envisageais même de devenir historien…

Quand j’étais jeune et naïf, j’étais aussi, peu ou prou, convaincu que ce que l’on nous racontait au sujet de notre passé « collectif » juif s’était réellement produit. Je gobais absolument tout : le Royaume de David, Massada… et puis l’Holocauste : les savonnettes, l’abat-jour *, la marche de la mort, les six millions… (la totale, quoi).

Comme de juste, il m’a fallu des années avant de comprendre que l’Holocauste, cette croyance nucléaire de la foi juive contemporaine, n’était absolument pas un récit historique, étant donné que les récits historiques n’ont nul besoin de la protection de la loi et des politiciens. Il m’a fallu des années pour piger que mon arrière-grand-mère n’avait pas été transformée en « savonnette » ou en « abat-jour *». Elle a sans doute péri d’épuisement, du typhus ou peut-être a-t-elle été victime d’un mitraillage collectif. C’était certes suffisamment triste et tragique, mais cela n’était pas tellement différent du sort qu’ont connu des millions d’Ukrainiens qui ont eu à apprendre ce que le communisme signifiait pour de vrai. « Certains des pires assassins de masse furent des juifs » **, a écrit le sioniste Sever Plocker sur le site israélien Ynet [du quotidien Yediot Ahronot], révélant l’Holodomor et l’implication juive dans ce crime colossal, probablement le pire du 20ème siècle. Le sort de mon arrière-grand-mère n’avait différé en rien de celui de centaines de milliers de civils allemands tués dans un bombardement aveugle cyniquement orchestré, pour l’unique raison qu’ils étaient Allemands. De même, les habitants d’Hiroshima sont morts pour l’unique raison qu’ils étaient Japonais. Un million de Vietnamiens sont morts pour la simple raison qu’ils étaient Vietnamiens et un million trois-cent-mille Irakiens ont été tués ou sont morts uniquement parce qu’ils étaient Irakiens. Bref : les circonstances tragiques de la disparition de mon arrière-grand-mère n’étaient pas aussi spéciales que cela, après tout.

Ça ne tient pas debout

Il m’a fallu des années pour admettre que la narration holocaustique, sous sa forme actuelle, ne tient pas debout, historiquement parlant. Voici simplement une petite anecdote, que je commenterai :

Si, par exemple, comme on le dit, les nazis avaient voulu voir les juifs quitter leur Reich (Judenrein = exempt de juifs), voire morts, comme y insiste la narration sioniste, comment expliquer le fait qu’ils en ont ramené des centaines de milliers à l’intérieur du Reich, à la fin de la guerre ? J’ai été préoccupé par cette question pendant un fameux bout de temps. Finalement, j’ai décidé de me lancer dans une recherche historique sur cette question et j’ai appris, de la part d’un historien israélien spécialiste de l’Holocauste, le professeur Israel Gutman, que ces prisonniers juifs s’étaient, de fait, joints volontairement à cette marche. En voici un témoignage, emprunté au livre du professeur Gutman :

 « Un de mes amis, ainsi que des parents [qui étaient internés] dans le camp, vinrent me voir, la nuit de l’évacuation, et ils m’ont proposé un endroit commode pour me cacher, quelque part sur le chemin reliant le camp à l’usine… Notre intention était de sortir du camp avec l’un des convois et de nous échapper (une fois) près du portail : en profitant de la nuit obscure, nous pensions nous éloigner quelque peu du camp. La tentation était donc énorme. Et pourtant, après avoir bien réfléchi, j’ai décidé de rejoindre (la marche) avec tous les autres internés et de partager leur sort » (Propos recueillis par Israel Gutman, People and Ashes : Book Auschwitz-Birkenau, éditions Merhavia, 1957).

En lisant cela, je reste comme deux ronds de flan : si les nazis avaient effectivement dirigé une usine de la mort à Auschwitz-Birkenau, pourquoi donc auraient-ils laissé les prisonniers juifs se joindre à eux, à la fin de la guerre ? Pourquoi les juifs n’ont-ils pas attendu leurs libérateurs (de l’Armée) Rouge(s) ?

Je pense que soixante-cinq ans après la libération d’Auschwitz représentent un temps suffisant pour que nous soyons fondés à poser les questions qui se posent. Nous devrions exiger une preuve historique et des arguments conclusifs, au lieu d’adhérer à un catéchisme imposé par la pression politique et même par la force coercitive du droit. Nous devons dépouiller l’Holocauste de son statut d’exceptionnalité judéo-centrique et le traiter comme un chapitre historique appartenant à une certaine époque et à une certaine région géographique.

Soixante-cinq ans ayant passé depuis la libération d’Auschwitz, nous devons réhabiliter notre histoire et nous poser la question : « pourquoi ? » Pourquoi les juifs étaient-ils haïs ? Pourquoi les peuples européens se sont-ils levés pour faire la guerre à leurs voisins ? Pourquoi les juifs sont-ils haïs au Moyen-Orient, une région où ils avaient sûrement une chance d’ouvrir une nouvelle page de leur histoire tourmentée ? S’ils avaient sincèrement envisagé de le faire, comme le clamaient les pionniers du sionisme, alors pourquoi ont-ils échoué ? Pourquoi l’Amérique a-t-elle durci ses lois d’immigration, au plus fort du danger pour les juifs européens ? Nous devons aussi nous demander à quoi servent, au juste, les lois sanctionnant le négationnisme de l’Holocauste ? Que sert à cacher la religion holocaustique ? Tant que nous ne poserons aucune question, nous serons assujettis aux sionistes et aux complots de leurs agents néocons ; nous continuerons à tuer au nom de la souffrance juive. Nous perpétuerons notre complicité avec les crimes impérialistes de l’Occident contre l’humanité.

Aussi dévastateur cela puisse-t-il être, nous devons reconnaître qu’à un certain moment, un chapitre horrible de l’histoire s’est vu conféré un statut d’exceptionnalité métahistorique. Sa « factualité » a été consacrée par des lois draconiennes et son raisonnement a été garanti par des mises en scène sociale et politique. L’Holocauste est devenu la nouvelle religion de l’Occident. Il s’agit malheureusement de la pire, de la plus sinistre des religions que l’humanité ait connues. C’est un permis de tuer, d’écrabouiller, de vitrifier, de laminer, de rayer de la carte, de violer, de piller et de nettoyer ethniquement. Il a fait de la vindicte et des représailles des valeurs occidentales. Toutefois, bien plus préoccupant encore est le fait qu’il prive l’humanité de son héritage ; il a pour fonction de nous empêcher d’étudier notre passé avec dignité. La religion holocaustique prive l’humanité de son humanisme. Dans l’intérêt de la paix et des générations futures, l’Holocauste doit être immédiatement dépouillé de son statut d’exceptionnalité. Il doit être soumis à un examen historique au peigne fin. La vérité et la recherche de la vérité sont un devoir humain élémentaire. Elles doivent primer sur tout.

* Pendant la Seconde guerre mondiale, et après, l’on croyait très largement que des savons et des abat-jours avaient été produits en masse, à partir des cadavres de victimes juives. Récemment, le musée israélien de l’Holocauste a reconnu que ces accusations étaient dépourvues de tout fondement].

** voir la traduction de cet article en français au lien ci-dessous :
http://alsace.novopress.info/489/les-juifs-de-staline/

Traduit de l’anglais par Marcel Charbonnier

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Source et traduction : Marcel Charbonnier


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