Opinion
Palestine occupée
:
les forêts au service de la colonisation
Fadwa
Nassar
La forêt
de Haïfa
Mercredi 28 décembre
2011 Depuis 1948,
l’occupation sioniste de la
Palestine a assisté à une extension
spectaculaire des forêts et des
jardins « bibliques », à croire que
les dirigeants colonialistes ont
longuement rêvé de vivre au sein de
la nature, ou qu’ils participent à
des concours mondiaux de protection
de la nature, d’autant plus qu’ils
sont sollicités par plusieurs Etats
dans le monde pour aider à cette
tâche. Plusieurs départements de
l’entité coloniale s’intéressent à
l’environnement et la forestation,
mais l’organisation la plus
importante et qui prend à cœur cette
tâche reste le Fonds National Juif (Jewish
National Fund, ou KKL selon le sigle
du nom hébreu). Selon son site, son
œuvre s’étend sur tout le territoire
de la Palestine occupée, il plante
et réclame des sous, du monde entier
et notamment des communautés juives
dans le monde, afin de contribuer à «
embellir » le pays.
Des forêts pour
cacher les crimes sionistes En réalité, une
grande partie des forêts plantées
par les sionistes, et notamment le
Fonds National Juif, cachent les
villages détruits palestiniens en
1948 ou en 1967. Il n’est plus un
secret pour personne que l’ardeur à
la tâche de la « main verte »
sioniste s’explique par la volonté
des dirigeants colonialistes de
cacher et d’enfouir, sous les
arbres, ce qui reste des villages
palestiniens. Que ce soit sur le
Mont Carmel, où plusieurs villages
palestiniens ont été détruits et
dont la population a été expulsée,
ou dans al-Jalil au nord, ou aux
abords de la ville d’al-Qods, ou
dans al-Naqab, il s’agissait et
s’agit toujours, pour l’entité
sioniste, d’effacer toute l’histoire
du pays, en rayant les villages, en
supprimant leurs noms sur les cartes
et sur les routes, et d’empêcher le
retour des réfugiés, originaires de
ces villages. Les forêts du FNJ
(KKL) cachent la destruction de 86
villages palestiniens dont, dans le
Mont Carmel : al-Tirah, Khraybe,
Balad el-sheikh, Ijzim, Ayn Ghazal,
Khirbet al-Damoun, Umm Zinat et
Jalame. 86 villages au total, parmi
les 531 détruits, sont enfouis sous
des arbres plantés et financés par
les organisations sionistes
mondiales, un peu partout en
Palestine. Dans la région d’al-Qods,
le jardin « Ishaq Rabin » est planté
sur les villages de Saris, Souba et
Ayn Karem, détruits en 1948. Après
l’occupation de la Cisjordanie et de
la partie orientale d’al-Qods, le
FNJ poursuit son œuvre « verte », en
plantant, au nom du gouvernement
canadien, « Canada Park », qui
masque les crimes de la destruction
des villages de ‘Amwas, Yalo, Beit
nouba et Deir Ayyoub, dont la
population a été expulsée.
Encercler les
villages et les bourgs palestiniens Mais la « main verte
» du FNJ et des autres organismes
étatiques de l’entité sioniste ne
s’est pas arrêtée à la destruction
du passé et de l’histoire de la
Palestine. Elle vise aujourd’hui,
plus que jamais, les villages et les
bourgs palestiniens qui ont osé
résister, jusque là, à leur
démantèlement. Les chercheurs
palestiniens et notamment le centre
arabe de la planification
alternative ont souligné le rôle
important de la planification
étatique dans la judaïsation du
paysage en Palestine occupée. Et là
aussi, le FNJ et ses plans de forestation font partie intégrante
de cette planification. En effet,
les divers plans à l’échelle «
nationale » ou « régionale » établis
par les milieux officiels rognent
les superficies appartenant encore
aux villages et bourgs palestiniens,
en les entourant de forêts. Ces
forêts empêchent l’utilisation des
terres palestiniennes pour
construire des logements, alors
qu’elles dépendent des municipalités
et conseils locaux palestiniens, et
empêchent surtout les villages et
bourgs de s’étendre : « on ne touche
surtout pas aux forêts ! » est le
mot d’ordre impératif de l’entité
sioniste. Il est important de savoir
que 70% des terres que possèdent
encore les villages et bourgs
palestiniens de la région de Akka
sont réservées, selon la
planification sioniste, pour planter
des forêts, et 41% des terres
possédées par les villages et bourgs
où vivent en majorité les
Palestiniens de confession druze,
dans le mont Carmel et al-Jalil,
sont réservées à la plantation de
forêts et des « réserves naturelles
». Ces chiffres n’ont de sens que si
l’on prend en compte que les
Palestiniens ne possèdent plus que
3,4% de leurs terres d’origine et
que l’entité sioniste et les
différents organismes coloniaux ont
tout raflé, depuis 1948. La situation devient
encore plus terrible, pour les
Palestiniens, lorsque les
associations sionistes pour la
protection de la nature,
interviennent dans le débat
concernant les plans de
planification. Celles-ci refusent
que de nouvelles colonies de
peuplement soient implantées dans
certaines régions, des parties d’al-Jalil
par exemple. Mais pour les
satisfaire et construire des
colonies à la fois, l’entité
coloniale plante les forêts et les «
réserves naturelles » autour des
villages et bourgs palestiniens.
Ainsi, l’objectif est atteint : les
villages et bourgs palestiniens sont
encerclés, les forêts demeurent mais
se déplacent et les colonies juives
se multiplient sur les terres volées
aux Palestiniens. Emportés par le
mythe de la « terre d’Israël » qui
aurait été jadis la Palestine
occupée, les sionistes ont trouvé
encore d’autres moyens frauduleux
pour à la fois avaler les terres
palestiniennes et falsifier
l’histoire et la géographie
palestiniennes. Autour de la ville
d’al-Qods et ailleurs, ce sont les
jardins « bibliques », en somme des
jardins où sont regroupées les
espèces des plantes et arbres qui
poussent en Palestine. Ces espèces
sont réunies dans un jardin, aux
côtés de pressoirs à olives et
autres matériaux utilisés par les
paysans palestiniens, tout au long
de leur vie et labeur en Palestine,
pour les touristes et les
admirateurs ébahis de ces « hommes
et femmes qui ont planté le désert
», et le tour est joué !
Aujourd’hui, c’est Silwan, au sud de
la mosquée al-Aqsa, dans al-Qods,
qui est menacé par l’installation
d’un jardin de ce genre. Sous le
prétexte de recréer « l’histoire
juive de la Palestine », avec ses
jardins, les sionistes détruisent
les maisons et les quartiers de la
ville d’al-Qods, expulsent les
maqdisis de leur ville, falsifient
l’histoire et sèment la haine et la
mort. Si l’on ne regardait
pas, par ailleurs, ce que font les
colons sionistes sur les terres
cultivées et les champs
palestiniens, si l’on ne savait pas
que les colons arrachent les arbres,
et notamment les oliviers
centenaires, et qu’ils lâchent leurs
cochons sur les terres cultivées, et
qu’ils incendient les champs, on
aurait pu croire à leur souci de
préserver la nature. Si l’on ne
savait pas que sous les forêts
plantées se trouvent des villages
palestiniens souvent centenaires, on
aurait pu croire à l’orientation
écologique de l’entité sioniste.
Mais en Palestine occupée, même les
forêts, les réserves naturelles et
les jardins ont une saveur coloniale
bien particulière. La main des
criminels ne peut engendrer ni
bien-être ni beauté.
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