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Cirepal
Sami Shihab: l'honneur de la résistance
Dimanche 19 avril 2009
Sami Shihab, jeune résistant du Hizbullah,
est devenu, depuis plus d’une semaine, la « bête noire » du
régime égyptien et des médias pro-américains dans le monde
arabe. Sami Shihab, jeune résistant du Hizbullah n’a fait que
son devoir, celui de soutenir la résistance palestinienne dans
la bande de Gaza, en mettant en place une aide logistique, pour
l’acheminement des armes et des vivres pour la population
assiégée de Gaza, depuis plus de deux ans. Sami Shihab,
résistant du Hizbullah, a été arrêté par le régime égyptien, au
mois de novembre 2008, avant même la guerre meutrière sioniste
contre la résistance et la population de la bande de Gaza. Il
est accusé aujourd’hui, par le régime égyptien, d’avoir monté
une cellule du Hizbullah en Egypte en vue de « déstabiliser le
régime et de diffuser le shiisme ». Une infâme campagne
médiatique est menée depuis plus d’une semaine contre Sami
Shihab, et au-delà, contre le dirigeant de la résistance, Sayyid
Hassan Nasrullah et contre le parti de la résistance, le
Hizbullah, mettant en cause le principe même du soutien à la
lutte du peuple palestinien, du soutien à la résistance en
Palestine et le principe même de la résistance. Une campagne
infâme orchestrée par les pouvoirs arabes en place qui ne
supportent plus, depuis la guerre meurtrière israélienne contre
les Palestiniens à Gaza, le climat de colère qui agite les rues
des capitales arabes.
Arrêté au mois de novembre 2008 par le pouvoir égyptien, ce
n’est que depuis une dizaine de jours que la campagne virulente
et mensongère a été lancée, ce qui montre bien qu’il s’agit
d’une opération politico-médiatique orchestrée. D’ailleurs, ce
n’est pas la première fois que des résistants sont arrêtés par
les régimes arabes (la Jordanie, par exemple), surtout depuis le
déclenchement de l’Intifada al-Aqsa, en 2000. Mais les régimes
se contentaient de les jeter en prison. Aujourd’hui, le régime
égyptien, mais aussi le régime jordanien, se lancent dans une
aventure inespérée en faisant de l’arrestation de résistants une
affaire sécuritaire, qui toucherait leurs propres Etats, tout en
voilant les véritables enjeux et les véritables motivations :
soutenir la résistance armée du peuple palestinien contre
l’ennemi commun, l’Etat sioniste.
Le régime égyptien met en avant sa propre souveraineté, accusant
le Hizbullah de la transgresser parce qu’il a mis en place, sur
le sol égyptien (Rafah), les moyens d’acheminer armes et vivres
vers la bande de Gaza. Deux logiques s’affrontent : celle de la
légitimité de la lutte du peuple palestinien et des peuples
arabes contre l’entité sioniste d’une part, et celle de
l’abandon de toute revendication de libération et la soumission
aux plans américano-sionistes soutenus par ce qui s’appelle la
communauté internationale, dont le Quartet. Pour la première,
tant qu’il y a occupation, tant que l’Etat sioniste colonisateur
est installé en Palestine, la résistance, sous toutes ses
formes, est légitime, elle est un devoir et un droit et doit
être soutenue. Pour la seconde, la communauté internationale
impose les règles du « jeu » : si jamais il devrait y avoir un
Etat palestinien, il serait accordé conformément au désir de
cette communauté, ce qui signifie la soumission aux intérêts
impérialo-sionistes, que ce soit dans la forme et la nature de
cet Etat, comme si la lutte avait pour but de constituer un Etat
et non de libérer un pays.
Si Sami Shihab a été arrêté au mois de novembre 2008, pourquoi
le régime égyptien a-t-il lancé son attaque contre le Hizbullah
et sa direction au mois d’avril 2009 ? Si le résistant Sami
Shihab a été arrêté pour son soutien logistique à la résistance
palestinienne, pourquoi les accusations publiques portent sur la
tentative de déstabiliser le régime, avec la création de
cellules et diffusion du shiisme etc ? Sayyid Hassan Nasrullah,
dans une allocution, a expliqué les tenants de l’affaire,
rejetant les accusations du régime égyptien et conseillant au
procureur d’exercer, lorsqu’il sera à la retraite, le métier de
scénariste, au vu du thriller mis en place et repris à la lettre
par certains médias arabes à la solde du régime et des impérialo-sionistes.
Pour quelles raisons le régime égyptien a-t-il lancé son
attaque ?
1 – L’Egypte fait porter la responsabilité du piètinement des
négociations interpalestiniennes au Hamas et à la ligne de la
résistance. A cause de son histoire, mais aussi de sa
géographie, l’Egypte considère qu’elle a un rôle primordial dans
toute négociation dans la région, palestinienne interne ou entre
les pays arabes et l’Etat sioniste. Or, depuis la guerre
meurtrière contre Gaza, le régime égyptien semble de plus en
plus isolé. Les rapprochements entre pays arabes au sommet de
Doha l’ont exclus, même s’ils sont de surface. Son impopularité
à cause de son attitude lors de la guerre meurtrière consistant
à fermer la voie de Rafah, à appliquer à la lettre les décisions
impérialo-sionistes contre la population et la résistance, lui
est devenue insupportable. Il lui fallait une voie de sortie,
diriger les regards vers un « ennemi » responsable de tous les
maux arabes, le Hizbullah « shiite », « aventuriste »,
pro-iranien »….
De plus, l’Egypte se considère gardienne de la bande de Gaza :
même si le régime l’a détourné au profit des impérialo-sionistes,
le droit qu’il exerce sur le passage de Rafah, il le veut
exclusif…
2 – Se venger contre le Hizbullah, dont le secrétaire général
avait réclamé du régime égyptien l’ouverture, dès le début de la
guerre sioniste, l’ouverture du passage de Rafah. Dès les
premiers jours de cette guerre, en décembre dernier, sayyid
Hassan Nasrullah avait supplié le régime égyptien de ne pas
collaborer avec l’agresseur, en ouvrant au moins la frontière,
afin d’acheminer les vivres et médicaments. Il avait conseillé
aux patriotes égyptiens d’exercer des pressions sur leur régime
pour aller dans ce sens. A l’époque, la presse et le pouvoir
égyptien étaient montés sur leurs grands chevaux, considérant
qu’il s’agissait d’une intervention dans les affaires internes
d’un pays « souverain », certains avocats serviles étant même
allés plus loin, menaçant de porter plainte contre Sayyid
Nasrullah devant les tribunaux internationaux, pour « incitation
à la violence contre un Etat souverain ». L’arrestation du
résistant Sami Shihab, pourtant avant l’agression et le
discours, va donner l’occasion de régime égyptien de se venger.
3 – Les difficultés internes égyptiennes : la crise financière
et économique qui secoue les pays du Golfe risque de ramener au
pays des centaines de milliers d’Egyptiens, sans emploi, qui
s’ajouteront à une population déjà appauvrie et marginalisée
dans un Etat qui ne vit que de l’aide américaine et qui n’a fait
que miroiter à son peuple depuis les accords de Camp David, soit
30 ans, que « la paix » avec Israël permettra le développement
économique du pays. Or, rien du tout, au contraire. Ce sont
trente années de perdues, pour tout le monde, sauf pour Israël.
Ni développement, ni croissance, ni dignité récupérée, mais au
contraire, répression, pauvreté et dépendance accrues. Il
fallait trouver, pour la population et les nouveaux arrivants,
un ennemi extérieur de taille, capable de rassembler l’énergie
égyptienne, responsable de tous ses maux, puisque le régime
découvre que sa souveraineté a été blessée. Or le régime
égyptien a laissé les bombardiers israéliens passer sur son sol,
il y a presque un mois, pour aller frapper le Soudan. Là, il
n’est pas question de souveraineté ! Or, l’arrestation de Sami
Shihab et d’autres Palestiniens et Egyptiens, accusés de servir
de cellule du Hizbullah, a eu lieu suite aux informations
fournies par les services israéliens, ce qui signifie
collaboration entre l’Etat sioniste et le régime égyptien. Là,
pas question de souveraineté ! Les services de renseignements
sionistes pullulent dans le pays, soit un touriste sur deux,
mais là, le régime égyptien ferme les yeux et ne parle pas de
souveraineté ! Sans parler du rôle des ambassades étrangères et
de leurs accessoires, militaires, culturels, éducatifs, etc….
Dans ce domaine, pas question de souveraineté ! Ce qui
menacerait la souveraineté de l’Egypte, c’est Sami Shihab, un
résistant du Hizbullah dont le but a été l’acheminement d’armes
et de vivres à la résistance palestinienne à Gaza.
4 – L’enlisement égyptien dans un processus où, malgré les
accords de Camp David, il n’avait jamais été aussi loin. Les
accords de Camp David, signés il y a trente ans, ont normalisé
les relations entre le régime égyptien et l’Etat sioniste, sans
que la population le suive, préservant un minimum de positions
nationales au pays. Les dernières guerres meurtrières
déclenchées par les sionistes contre les résistances au Liban et
surtout à Gaza ont écartelé le pays, entre le régime soutenu par
une couche pro-américaine haineuse et vengeresse et le reste du
pays. Si certains Etats peuvent encore masquer leur alignement
pro-américain, le régime égyptien, à cause de sa géographie et
de son histoire, ne le peut plus. Il s’enlise de plus en plus
dans le plan américano-sioniste, même si par certaines
déclarations de ses dirigeants, il cherche à se convaincre du
contraire. Par exemple, après que la presse sioniste ait dévoilé
que les renseignements sur le résistant Sami Shihab ont été
fournis par les services israéliens, le ministre égyptien des
affaires étrangères déclare refuser de recevoir Lieberman, le
colon-ministre sioniste. Même la presse sioniste l’a compris :
il s’agit juste d’une manœuvre pour se dédouaner publiquement
d’une telle alliance contre le Hizbullah.
5 – La popularité croissante du Hizbullah en Egypte : depuis la
libération en mai 2000, le peuple égyptien, toutes tendances
confondues, affiche sans crainte son admiration et enthousiasme
pour une résistance arabe dont le but dépasse la manœuvre
politique pour aller au fond : contre l’occupation, seule la
résistance paie. La guerre meutrière sioniste en juillet-août
2006 et la victoire du Hizbullah ont élargi sa popularité,
malgré les tentatives du régime et de ses acolytes d’en faire un
bras iranien shiite. Les faits ont prouvé qu’il n’en était rien.
La guerre meutrière contre Gaza et la victoire de la résistance
armée ont confirmé, une nouvelle fois, que rien ne vaut la
résistance, seule capable de répondre aux aspirations des masses
arabes. Dans l’affaire du résistant Sami Shihab, le régime
égyptien a d’abord essayé de mettre en cause le Hizbullah, sans
s’attaquer au Hamas, voulant insister sur le caractère shiite,
donc jouer le jeu de la sédition entre musulmans. Mais le
soutien affirmé, affiché et proclamé de la résistance
palestinienne, toutes tendances confondues, et même des Brigades
des martyrs d’al-Aqsa (Fateh) au Hizbullah et à son rôle dans le
soutien à la résistance, a excédé le régime égyptien. Lui qui
pensait diviser entre musulmans, entre nationalistes, son
scénario diabolique s’est avéré impuissant. Ne le soutiennent,
comme l’a affirmé un journaliste égyptien, que ceux qui le
soutiennent depuis longtemps. Sa campagne a échoué.
6 – Affaiblir le Hizbullah au Liban : en lançant son attaque
déloyale contre le Hizbullah, le régime égyptien cherche à
intervenir dans les élections législatives libanaises, espérant
séparer une partie de l’électorat de l’opposition, du parti et
de ses amis. En montrant que le parti du Hizbullah est un parti
qui cherche à déstabiliser un Etat « puissant » comme l’Egypte,
qu’il joue le rôle du bras iranien dans la région, l’Egypte
espérait séparer le général Aoun et d’autres partenaires, du
Hizbullah. Mais il semble bien que cette tentative a échoué. En
réalité, le régime égyptien intervient dans ces élections, comme
d’autres puissances, les Etats-Unis par exemple, pour faire
pencher la balance du côté du pouvoir actuel. Il y a de fortes
chances que l’opposition emporte les élections, malgré toute la
corruption financière mise en place depuis des mois.
De plus, la découverte récente d’un réseau de traîtres
travaillant au service d’Israël, découverte due aux
renseignements fournis par le Hizbullah aux forces de la
sécurité intérieure libanaise, a de nouveau rappelé aux Libanais
la réalité de leur pays : les sionistes agissent toujours pour
détruire l’équilibre du pays, leurs visées n’ont pas cessé et la
résistance est toujours menacée. Cette nouvelle affaire de
traîtres balaie, dans une grande mesure, toute la tentative
égyptienne et consolide le camp de la résistance, au Liban.
La guerre médiatique et politique menée par le régime égyptien,
suivi par le régime jordanien, contre la résistance, là le
Hizbullah, là-bas le Hamas, risque de se poursuivre, le temps
nécessaire pour faire plier ou se faire plier, le bras. La
dernière guerre meurtrière israélienne se poursuit : ce que les
sionistes n’ont pu obtenir par leurs destructions sauvages et
leurs massacres épouvantables, les régimes arabes, égyptien et
jordanien, en tête, essaient de l’obtenir par d’autres moyens :
arrestations de résistants, campagnes de dénigrement, blocus
renforcé et pressions.
Mais la résistance, au Liban et en Palestine, du moins, se
renforce : elle acquiert des armes, elle forme les combattants,
elle a défini sa stratégie, la libération de la Palestine. En
face, l’Etat sioniste ne survit que par les massacres qu’il
commet, les cris de guerre qu’il pousse, le soutien épuisant
qu’il réclame de « la communauté internationale » mais surtout
le rôle de gendarme que jouent pour lui les régimes arabes, et
aussi l’Autorité palestinienne. Jusqu’à quand ???
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Résistance en Palestine
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