Chronique
Cherchez l'intrus
Chérif Abdedaïm

Chérif
Abdedaïm
Mercredi 28 mars 2012
On a beau
caresser le monstre dans le sens du
poil, sa décision est prise. Pas de visa
pour le prédicateur Al Qaradaoui, a
annoncé froidement Sarkozy.
«J’ai indiqué à
l’émir du Qatar lui-même que ce monsieur
n’était pas le bienvenu sur le
territoire de la République française»,
a-t-il déclaré sur France Info lundi
dernier. L’imam qatari qui se rendra en
France au début d’avril à l’invitation
d’une organisation musulmane, se voit
renvoyer comme un vulgaire «terroriste».
Propos qui ont fortement secoué l’Union
mondiale des oulémas musulmans. Pourquoi
? Parce que, dit-on, l’imam est un
islamiste «modéré». Il a condamné la
tuerie de Toulouse et a contribué à
débarrasser les concepts islamiques de
l’extrémisme», a déclaré le cheikh Ali
Kardaghi, SG de l’Union. Autre «exploit»
du cheikh, qui a contribué par son
«charisme» modérateur, est qu’il avait
rendu licite à travers l’une de ses
fetwas l’intervention militaire de
l’Otan en Libye. Enfin, un autre
argument de taille : «Nous considérons
la France comme un pays allié et elle a
joué un rôle de premier plan dans le
Printemps arabe, notamment en Libye, et
nous attendons sa contribution à la
libération de la Syrie», a encore dit
cheikh Kardaghi. Malheureusement, pour
ces représentants de l’Union des
oulémas, Sarkozy ne considère pas comme
bienvenus «sur le territoire de la
République un certain nombre de gens qui
ne sont pas compatibles avec l’idéal
républicain». Ah, le fameux idéal
républicain ! Un imam qui n’a cessé, par
ses prêches enflammés, d’inciter au
meurtre d’un chef d’Etat souverain et au
renversement d’un autre chef d’Etat, et
ce, par ses apparitions programmées sur
la chaîne de télévision satellitaire Al-Jazeera,
basée au Qatar. De l’autre, un président
tout aussi complice de l’assassinat de
Kadhafi et qui partage les mêmes
intentions quant à la destinée de Bachar
Al Assad. C’est quand même au nom de ces
«valeurs républicaines» que les deux
hommes feignent d’agir. Et pourtant, ni
l’un ni l’autre ne semble digne des
valeurs républicaines. Les vrais
républicains sont censés défendre des
valeurs universelles, humaines et non
travestir leur opportunisme de ramages à
la carte et à la tête du client. L’imam,
pour sa part, avait condamné sans
retenue les réactions des pouvoirs
libyen et syrien face à des insurgés
armés, Sarkozy en a fait de même, alors
que les deux ont affiché un mutisme
solennel face à la répression au Bahreïn
où de vrais civils continuent de
succomber sous les balles des
mercenaires saoudiens. Idem pour les
récents bombardements des civils
Palestiniens à Ghaza. D’ailleurs, les
dernières infos en provenance de
Palestine font part de prolongation de
la détention de sept enfants
Palestiniens par un tribunal israélien à
Hébron. Une prolongation de 101 jours
afin «d’achever l’interrogatoire» de ces
enfants âgés de 14 ans. N’est-ce pas là
matière à condamnation ? Quelle fetwa
pourrait nous pondre Al Qaradaoui ?
Quelle valeur républicaine pourrait à
son tour cracher Sarkozy ? Avec ce
fameux casse-tête chinois du Yin et du
Yang, cherchez l’intrus !
Chérif Abdedaïm
Publié sur
La Nouvelle République
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