Chronique
De Rousseau à
Sarkozy, quelles confessions ?
Chérif Abdedaïm

© Chérif
Abdedaïm
Samedi 14 avril 2012
Confessions. Une
autobiographie dans
laquelle Jean Jacques Rousseau reprend
cinquante-trois ans de sa vie. Des
révélations dont l’auteur n’aura pas à
rougir aux yeux de l’histoire. Racontant
à la fois ses réussites et ses déboires
avec sincérité et humilité.
Bref, des confessions à connotation
symbolique et non religieuses.
En promenant donc un
regard nonchalant sur quelques passages
de ces « Confessions », je me suis
demandé si un jour Sarkozy aurait le
courage d’écrire une autobiographie à
l’image d’autres présidents.
Et zut ! Que dis-je
là ? D’abord, est-ce que l’idée à
effleuré le bonhomme ? Et puis, si cela
faisait partie de ses projets futurs,
serait-il capable de dire toute la
vérité, rien que la vérité en concluant
par : « je le jure ! » ?
Et puis, je commence
à rêvasser comme si je lisais cette
autobiographie à l’instar d’un enfant
subjugué par un conte de fée.
Mais voilà, dans les contes de fées, le
merveilleux l’emporte toujours le
tragique. Tout est bien qui finit bien,
dit-on.
Dans l’autobiographie
Sarkozy, j’ai bien peur d’être déçu. Le
romanesque risque de l’emporter sur le
réel. Difficile d’estampiller
son mea culpa sur les tablettes
de l’histoire. Rousseau, dans ses
« confessions » ne paraissait
nullement embarrassé par ses péchés. En
serait-il de même pour Sarkozy ?
Voyons un peu ce qui
pourrait être volontairement censuré de
cette autobiographie rocambolesque. La
période où il détenait le porte feuille
de ministre de l’intérieur pourrait y
figurer avec comme mention,
exécutant.
Puis viendra la
période de sa mandature présidentielle.
Et là, je vois le bonhomme transpirer
pour rechercher ses mots, « euphémiser »
son style, et toute l’angoisse de la
page blanche. Oui, lorsqu’on orchestre
une campagne déstabilisatrice d’un pays,
lorsqu’on à les mains souillées de sang
innocent, pas facile d’avouer ses
crimes, sa trahison de ceux à qui il a
donné le « baiser de la mort ». Je vois
encore cette accolade faite par Sarkozy
à Kadhafi, et je me demande si Sarkozy
pourrait bien confesser ce moment
d’émotion sur une feuille blanche. « Je
savais que j’allais le trahir »,
écrirait-il. Et puis, il revoit cette
apparition de Kadhafi qui deviendrait
son cauchemar nocturne. C’est le
blocage, ça tourne à la névrose
obsessionnelle. Il sursaute, effrayé, il
va déchirer la feuille, peut-être que
cela l’aiderait à conjurer le sort et
mettrait fin à cette torture onirique.
Rien ne fait, les nuits se succèdent.
Parfois, ce seraient les 63 migrants,
victimes d’un naufrage au large de la
Libye et que l’armée française n’avait
pas assistés ou ces noirs exécutés au
nom d’un nettoyage ethnique en Libye,
qui viendraient accentuer son
calvaire.
Ensuite, ce seraient
au tour de ces réfugiés par milliers qui
fuient le chaos libyen ; et c’est le
déferlement des images affreuses qui
hantent ses nuits. « Maudite
autobiographie, tu ne m’auras pas »,
diraient-il. Va-t-il jusqu’à y renoncer
? Va –t-il avoir la trempe des grands
hommes, reconnaissant leurs tort, ou
balayer toutes critiques dans son
épilogue en soulignant qu’ « on regrette
toujours quand on n'a pas été
suffisamment compris » ?
En tout cas, si cette
autobiographie devait voir le jour,
Rousseau se remuerait dans sa tombe.
Chérif Abdedaïm
Publié sur
La Nouvelle République
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