Chronique
Un peu
d'ingéniosité quand même !
Chérif Abdedaïm

© Chérif
Abdedaïm
Lundi 9 avril 2012
Après la Libye, voilà la « révolution »
qui prend la direction de Bamako.
Certaines voix invétérées dans
les entreprises séditieuses, vont comme
d’habitude étaler leur rhétorique
humanitaire et attribuer ces événements
à une quelconque logique du « printemps
arabes ». « Le ras-le- bol des
populations, le droit à plus de liberté
et de démocratie », et un tas d’autres
ragots seraient à l’origine de ces
soulèvements, va-t-on entendre ça et là.
Comble du hasard, le Mali est limitrophe
de la Libye et la « révolution »
libyenne semble glisser vers le nord du
Mali pour constituer un second Benghazi.
Des touaregs qui, après une hibernation
centenaire, se réveillent subitement
pour s’apercevoir qu’ils doivent
arracher leur indépendance. Sans doute
réveillés par les stridents cris de joie
venus du Sud Soudan, de Tripoli après
l’assassinat de Kadhafi, ou encore par
les murmures d’Alain Peyrefitte (mort en
1999), lui qui rêvasser de voir naître
un Etat Touareg chevauchant : L’Algérie,
la Libye, le Niger, le Mali, et une
petite parcelle du Burkina Faso.
Dans ces rêveries de basse
intensité, à base du principe : «
diviser pour régner », faudrait-il
notamment souligner le rôle de la France
prédatrice et nostalgique d’un ordre
coloniale qui, force est de constater,
se chronicise pour devenir un complexe,
comme si la vie n’était faite que de
prédation. « La France a joué un double
rôle, dune part, en se
réjouissant d'emblée de la déchéance du
mauvais élève (ATT) considéré comme «
trop laxiste » envers les rebelles
touaregs, si l'on tient compte des
otages français aux mains d'Aqmi, et
d'autre part, la défiance vis-à-vis des
putschistes » me confie un analyste
politique.
A comparer ces propos avec ceux tenus
par Juppé, on ne peut que s’en
convaincre de cette duplicité de la
diplomatie française. «Pour nous, comme
pour les Américains, il n’est pas
question de déployer des troupes au sol.
Nous n’avons rien à y faire. En
revanche, nous sommes prêts à apporter
un soutien logistique à la CEDEAO»,
avait déclaré ce dernier. Quel «
altruisme » ! On y aurait cru,
n’était-ce le rôle dévastateur de la
France en Libye et ses tentatives en
Syrie.
Au fait, quel est ce soutien logistique
que Juppé est prêt à apporter à cette
CEDEAO (Communauté
Economique des Etats de l’Afrique de
l’Ouest) ?Pour rappel, cette CEDEAO
s’est illustrée récemment par ses
sanctions vis-à-vis d’un pays qui
souffrait déjà : la suspension du Mali
de toutes les instances de la CEDEAO, le
gel de ses avoirs à la Banque Centrale
des Etats de l’Afrique de l’Ouest
(BCEAO) et le non approvisionnement de
ses banques nationales, la
suspension des programmes d’aide au
développement, etc. A souligner
fermement que ces sanctions ont été
prises après que le Capitaine Amadou
Haya Sanogo ait accepté le retour à
l’ordre constitutionnel, et ce, à
l’issue d’une rencontre, à Ouagadougou
(Burkina Faso), qui a regroupé une
délégation du CNRDRE avec le Président
du Burkina Faso, le médiateur.
Étrangement, on assiste à la même
situation qu’en Libye après la pression
de la France sur le CNT de ne pas
reconnaître la médiation de l’Union
Africaine.
Étrangement, également, cette partie du
Nord du Mali, à l’image de Benghazi,
renferme beaucoup de ressources
convoitées par les prédateurs. Un peu
d’ingéniosité quand même !
Chérif Abdedaïm, La Nouvelle République
du 9 avril 2012
Publié sur
La Nouvelle République
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