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L'EXPRESSIONDZ.COM
Obama est-il musulman ?
Pr Chems Eddine Chitour
8 septembre 2008 «Le monde est du côté de
celui qui est debout.» Proverbe arabe
A moins de deux mois des élections, il semble
que Barack Obama ait beaucoup de chances de devenir le prochain
président des Etats-Unis. Son réel talent d´orateur lui a permis
de venir à bout - jusqu´à présent - de toutes les intrigues et
embûches sur le difficile itinéraire vers la Maison-Blanche.
Deux thèmes importants n´ont pas - de notre point de vue - reçu
des explications convaincantes. Il s´agit de la position du
candidat envers les Arabes et sa relation à l´Islam
Le 4 juin 2008, Barack Obama a déclaré que "Jérusalem restera la
capitale d´Israël et doit rester indivisible". Il a provoqué la
colère des Palestiniens. Se présentant comme un "vrai ami"
d´Israël, M. Obama s´est félicité des "liens indestructibles"
entre les Etats-Unis et Israël. Il s´est rendu en 2007 devant l´Aipac
où il a déclaré vouloir "préserver un engagement total pour la
relation unique de défense qui lie les États-Unis à Israël ".
Azmi Bishara, issu d´une famille chrétienne palestinienne,
ancien député au Parlement israélien (Knesset) n´est pas tendre
avec les Arabes. Pour lui " le phénomène Obama est une nouveauté
majeure dans la vie politique des Etats-Unis....Il est lisse. Il
est très intelligent dans le choix de son ton. Il suscite
l´admiration et il ne menace personne...Quant à l´individu Obama,
il est parfaitement sous contrôle, au sein de ladite élite. De
fait, cela fait des années qu´il se bat pour y être admis, et il
a montré qu´il peut être parfaitement à l´aise lorsqu´il s´agit
pour lui de retourner sa veste, afin de faciliter le processus
digestif de l´establishment...Il y a aussi le fait que Rice n´a
pas eu à dénier son héritage islamique, comme a dû le faire
Obama. Elle n´avait nul besoin de toutes ces acrobaties verbales
et de ces virages rhétoriques en épingles à cheveux pour
démontrer qu´elle faisait bien partie de l´establishment. Elle
en est un pur produit. Non qu´elle dût considérer un ancêtre
musulman comme une tache sur sa réputation, dès lors que,
d´ancêtre musulman, elle n´en avait aucun...Mais Obama, lui, si,
il a dû faire ça. Obama a dû voir dans ses origines musulmanes
une faille, une flétrissure.
Obama et les Arabes
Autant dire qu´il a échoué au test du racisme, en ce qui
concerne le respect des Arabes et des musulmans. En tant que
personne, Obama n´a assurément rien de bien nouveau. C´est un
homme politique ambitieux, un homme jeune qui a eu besoin d´une
énorme quantité d´opportunisme, d´une épaisse carapace et de
principes ultra-flexibles, pour arriver là où il est. De plus,
toute son insistance sur la manière dont il est un bon chrétien,
à un point pas croyable, est une véritable caricature de la
laïcité à l´américaine".
"Et pourtant, les Arabes ont toujours cette manie persistante,
et toujours renaissante, qui veut qu´en dépit d´un flot
ininterrompu de déceptions causées par les présidents américains
successifs, dès qu´une année électorale est annoncée, ils sont
inévitablement les victimes de l´illusion selon laquelle cela a
quelque chose de prometteur pour la cause palestinienne. (..)
Son estomac qui se met à gargouiller de sa fringale d´entrer
dans les bonnes grâces de l´Aipac, des dirigeants israéliens et
de l´idéologie sioniste, en général; sa sympathie totale pour la
situation des habitants de Sderot, sans la moindre once de
compréhension de la situation à Ghaza, traduisent non seulement
l´étendue de son opportunisme, mais aussi l´ampleur de son
mépris pour les Arabes, et peu importe qu´il croie sincèrement,
ou non, à ce qu´il raconte au sujet d´Israël.."Non qu´il ait eu
en face de lui un front arabe uni qui l´eût amené à les prendre
en considération, ou qui lui eût donné, au minimum, quelques
conseils. (...) Il n´y a strictement aucune raison pour que les
Arabes puissent escompter un changement quelconque à une
situation dans laquelle de si nombreux facteurs avantagent
Israël, tandis que les Arabes ne font strictement rien pour
tirer l´échelle vers eux-mêmes. La principale faiblesse des
Arabes tient au fait qu´ils sont désunis. Il n´y a pas de
recette miracle. Les Arabes ne constateront aucun changement en
leur faveur tant qu´ils ne feront pas le nécessaire pour que
leur présence soit ressentie comme un facteur de cohésion
incontournable dans l´arène internationale. Le 18 août dernier,
les deux candidats Obama et Mc Cain ont subi un oral devant leur
hôte, Rick Warren, pasteur de l´église géante de Saddleback.
Question: "Qu´est ce que cela veut dire pour vous, de mettre
votre confiance dans le Christ?" Réponse de Barack Obama: "Je
crois que Jésus est mort pour mes péchés et que je connais la
rédemption à travers lui." Réponse de John McCain: "Cela veut
dire que je suis sauvé et pardonné." L´enjeu était important
puisqu´un électeur américain sur quatre se décrit comme
"évangélique". Certes, la plupart s´exprimeront sans doute pour
McCain, mais selon un sondage récent, 24% soutiendraient Obama
et 12% seraient indécis.
L´un comme l´autre, McCain et Obama ont un handicap considérable
à surmonter devant cet électorat. McCain pour avoir qualifié, en
2000, Pat Robertson d´" agent de l´intolérance". Celui pour qui
Mahomet est un "brigand fanatique". Obama n´est pas moins gêné
aux entournures par les rumeurs selon lesquelles il ne serait
pas vraiment chrétien, mais musulman. Selon un sondage publié en
juillet par Newsweek, 12% des Américains en seraient encore
persuadés. Pour d´autres, Obama serait l´Antéchrist, du moins à
en croire plusieurs sites Internet dédiés à ce délire. L´un
d´eux montre une vidéo d´Obama prononçant un discours
(authentique) en 2006 fustigeant les évangélistes qui souhaitent
utiliser la Bible pour les guider dans l´exercice du
gouvernement: "Quel passage voulez-vous qu´on adopte, celui où
l´esclavage est toléré, celui qui conseille de lapider votre
fils s´il s´écarte de la foi?" Les croyants sont une donnée
fondamentale de l´équation électorale Obama proclame donc sa foi
chrétienne haut et fort à la moindre occasion. 67% des
évangéliques disent vouloir voter McCain contre 24% pour Obama.
(...)
Obama n´arrête pas de prendre ses distances avec l´Islam.
Lui-même semble penser qu´il y a un problème, qu´il doit en
quelque sorte demander pardon pour avoir été "souillé" au
contact de ces "ignobles musulmans". (..) Dans un point de vue
sur Barack Obama, publié le 5 février dans Libération, Daniel
Sibony évoque la prétendue éducation musulmane intégriste que le
candidat démocrate aurait refoulée. Il affirme que Barack Obama
a reçu une "éducation islamique en maternelle" avant de se
"convertir" au christianisme et que ce "fonds infantile
intégriste" devrait le rendre "plus complice" du
"fondamentalisme" musulman. Précisons, écrit Isabelle Duriez,
que le jeune Obama n´était pas en maternelle, mais en primaire.
Sa mère a divorcé de son père kényan quand il avait 2 ans et
s´est remariée avec un Indonésien, cadre dans une compagnie
pétrolière, quand il en avait 6. Ils se sont installés à Jakarta
de 1967 à 1971. L´enfant n´a pas reçu une "éducation islamique"
pour autant. Son beau-père étant musulman non pratiquant et sa
mère athée, il est d´abord allé dans une école catholique
pendant deux ans, puis dans une école publique. Il avait alors 8
et 9 ans. Dès le début de la campagne, des sites conservateurs
ont lancé la rumeur selon laquelle cette école était une madrasa
où il aurait été endoctriné. "Ce n´était pas une école
islamique, a témoigné l´un d´eux. Il y avait des chrétiens, des
bouddhistes, des confucéens, c´était très mélangé."(3)
Naturellement, tout a été mis en oeuvre pour débusquer la "
vraie religion " de Barack Obama malgré le fait qu´il n´arrête
pas de marteler qu´il est chrétien. Daniel Pipes, chroniqueur
primé du New York Sun et du Jerusalem Post, avec un zèle de
bénedictin, est allé dans les coins et les recoins de toutes les
mémoires " à charge ". Ecoutons-le: " Obama affirmait ainsi en
décembre "j´ai toujours été un Chrétien" et il a résolument nié
avoir jamais été un Musulman. "Le seul lien que j´aie eu avec
l´Islam est le fait que mon grand-père paternel venait de ce
pays [Kenya]. Mais je n´ai jamais pratiqué l´Islam." En février,
il déclara: "Je n´ai jamais été un Musulman. (...) à part mon
nom et le fait d´avoir vécu dans une population musulmane
pendant quatre ans étant enfant [Indonésie, 1967-1971], je n´ai
que très peu de liens avec la religion islamique." "Toujours" et
"jamais" ne laissent que peu de place aux tergiversations. Mais
de nombreux éléments biographiques, recueillis essentiellement
par la presse américaine, suggèrent que le candidat, en
grandissant, s´est bel et bien considéré lui-même et a été
considéré par son entourage comme un Musulman".(4)
Obama est-il ou était-il musulman?
"Dans l´Islam, nous apprend Daniel Pipes, la religion est
transmise à l´enfant par le père. Barack Hussein Obama père
(1936-1982) était un Musulman qui a nommé son fils Barack
Hussein Obama, jr. Seuls des enfants musulmans sont appelés
"Hussein". Son beau-père, Lolo Soetoro, était aussi un Musulman.
Nedra Pickler, d´Associated Press, relate que "des documents
montrent qu´il était inscrit en tant que Musulman" pendant ses
trois premières années de scolarité dans une école
catholique.(Un blogueur qui se présente comme "Un Américain
expatrié en Asie du Sud-Est" a découvert que "Barack Hussein
Obama était inscrit sous le nom de "Barry Soetoro", matricule
203; il a été admis à l´école primaire franciscaine. Ainsi le
1er janvier 1968, dans la classe 1B. (...) Selon son dossier, la
religion de Barry était l´Islam.".Dans son autobiographie,
Dreams of My Father (Rêves de mon père), Obama raconte qu´il a
eu des problèmes pour avoir fait des grimaces pendant des cours
coraniques, révélant ainsi qu´il était bien un Musulman, car les
élèves indonésiens de l´époque suivaient des cours d´éducation
religieuse correspondant à leur foi. En fait, Obama garde même
des souvenirs clairs de ces cours: Nicholas D. Kristof, du New
York Times, relate qu´Obama "s´est souvenu des premiers versets
de l´appel islamique à la prière et les a récités [à Kristof]
avec un excellent accent". La demi-soeur d´Obama se rappelle que
la famille allait à la mosquée "pour les grands événements de la
communauté". Un ami indonésien, Zulfin Adi, déclare qu´Obama
"était un Musulman. Il allait à la mosquée. Je me souviens de
lui avec un sarong [un vêtement porté par les Musulmans]." Obama
dit lui-même que lorsqu´il vivait en Indonésie, un pays
musulman, il "ne pratiquait pas [l´Islam]", admettant ainsi
implicitement qu´il avait alors une identité de Musulman. Et des
Indonésiens ont de lui des souvenirs différents. L´un deux, Rony
Amir, décrit Obama comme "très religieux, dans l´Islam, à
l´époque".S´il est né et a été élevé en tant que Musulman et
qu´il cache ce fait, cela constitue une grave duplicité, une
dissimulation fondamentale, qui en dit très long sur son
caractère et ainsi sur la pertinence de sa
candidature.(4)."Comment les Musulmans voient-ils Barack Hussein
Obama? récidive Daniel Pipes. Ils ont trois possibilités: soit
le considérer tel qu´il se présente lui-même, comme quelqu´un
qui " n´a jamais été un musulman " et a " toujours été un
chrétien ", soit le considérer comme un Musulman, soit encore
voir en lui un apostat de l´Islam. Les articles disponibles
suggèrent que, si les Américains pensent en général que le
candidat démocrate n´avait pas de religion avant de se convertir
sous l´autorité du révérend Jeremiah Wright à l´âge de 27 ans,
les Musulmans du monde entier le voient rarement comme un
Chrétien, mais plutôt comme un Musulman ou un ex-Musulman. Le
dirigeant libyen Mouamar El Gueddafi a parlé d´Obama comme d´un
" Musulman " et comme d´une personne ayant une "identité
africaine et islamique".(5)
"Certains dirigeants musulmans américains perçoivent eux aussi
Obama comme musulman. Le président de la Société islamique
d´Amérique du Nord, Sayyid M.Syeed, a déclaré, lors d´une
conférence à Houston: "Qu´Obama gagne ou perde, sa candidature
renforcera l´idée que des enfants musulmans peuvent devenir
présidents de ce pays ". Mais cette excitation a aussi un côté
sombre - des soupçons qu´Obama soit un traître à sa religion de
naissance, un apostat (murtadd) de l´Islam. Al Qaîda a souligné
qu´Obama avait déclaré: "Je ne suis pas un Musulman ", et une
analyste, Shireen K. Burki, de l´Université de Mary à
Washington, considère qu´Obama est le " candidat rêvé pour Ben
Laden ". (...) Dans le journal Arab Times, l´intellectuel de
gauche syrien, Nidal Na´isa a qualifié de façon répétée Obama
d´" apostat de l´Islam (..) En somme, des Musulmans
s´interrogent sur le statut religieux actuel d´Obama. Ils
résistent à sa façon de se décrire lui-même comme un chrétien,
et ils supposent qu´un bébé né d´un père musulman et nommé
Hussein a commencé sa vie en tant que Musulman. Si Obama
devenait Président, les différences entre les visions musulmanes
et américaines concernant son affiliation religieuse créeront
des problèmes ". Pour Andrea Eliott, les Arabes sont déçus.
Après avoir placé beaucoup d´espoir dans la candidature du
sénateur de l´Illinois, les musulmans américains manifestent
leur déception. Ils ont l´impression d´être les
laissés-pour-compte de la stratégie du candidat démocrate. (..)
Pour de nombreux musulmans, l´attitude de Barack Obama n´est pas
étonnante. Ces allusions et le climat plus général ont
d´ailleurs poussé de nombreux musulmans à ne pas clamer haut et
fort leur soutien au candidat démocrate, car toute manifestation
d´allégeance pourrait être utilisée par ses adversaires pour
susciter un sentiment de peur à l´égard du candidat, encourager
les fausses rumeurs sur sa religion, voire le "ben-ladeniser".(6)
Nous préférons, en conclusion, les mots du père Leahy, du Groupe
de dialogue interreligieux de Chicago: "La réaction honteuse d´Obama
est d´autant plus lamentable qu´elle ne fait que renforcer cette
diabolisation. Il aurait pu clore le débat en disant simplement
quelque chose du genre "Vous savez, j´étais un petit garçon à
l´époque. Il y a beaucoup de choses dont je ne me souviens pas.
Ma première vraie expérience religieuse c´était à l´âge de 16
ans quand j´ai adhéré à mon groupe d´études bibliques. Mais
laissez-moi vous dire ceci: je n´ai jamais regretté avoir eu la
chance de côtoyer de très près des représentants de la deuxième
plus grande communauté religieuse au monde. Et mes électeurs
n´ont pas à le regretter non plus. Car la seule façon de
résoudre les différends que nous pouvons avoir entre nous,
chrétiens et musulmans, c´est en apprenant à mieux nous
connaître. Et je suis content d´avoir eu la chance de pouvoir le
faire dès mon plus jeune âge."
(*) Ecole nationale polytechnique
1.Philippe Grangereau: McCain et Obama
passent au confessionnal. Libération 18 août 2008
2.The most comprehensive online Quranic
resource!www.altafsir.com 05/01/2008.
3.Isabelle Duriez. Obama et l´islam. Libération - mercredi 13
février 2008
4.Daniel Pipes L´enfance musulmane de Barack Obama
http://fr.danielpipes.org/article/5545
5.D.Pipes: Barack Obama sous des regards musulmans
FrontPageMagazine.com 25 08 2008
6.Andrea Elliott:Obama déçoit les musulmans américains. The New
York Times - 26 juin 2008
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de reproduction et de diffusion réservés © L'Expression
Publié le 8 septembre 2008 avec l'aimable autorisation de l'Expression
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