Opinion
Tension à la
frontière nord d'Israël
Charles
Enderlin
© Charles
Enderlin
Vendredi 1er
février 2013 Quand
et où ce raid a-t-il eu lieu ? Et que
visait-il ? Etait-ce un message
politique, et à destination de qui? Ou
s’agissait-il d’une opération uniquement
militaire ?
Du côté israélien, silence radio, aucune
confirmation ou démenti. Alex Fishman,
le spécialiste des affaires militaires
du grand quotidien Yediot Aharonot a
écrit le 1er février: «Avec toute la
finesse du plan opérationnel qui a mené
à l’attaque du convoi d’armes, il ne
sera plus possible de le répéter sans
embraser la région. Ce genre de scénario
ne peut être réalisé qu’une seule fois.
Donc, si le message envoyé par les
auteurs de l’attaque n’est pas compris
par la Syrie et le Hezbollah, la
prochaine opération ne pourra pas rester
anonyme.» Sur le
raid lui même, on n’a que des détails de
source étrangère. Selon les services de
Bachar el Assad, tôt le 30 janvier au
matin, des appareils israéliens ont
bombardé un centre de recherche
militaire à Jamaraya, près de Damas. Des
témoins cités par l’opposition syrienne
parlent d’une douzaine d’explosions.
Pour leur part, la plupart des
commentateurs de la presse israélienne
évoquent un convoi d’armes transportant
notamment des missiles antiaériens
d’origine russe SA17.
En fait, le site attaqué serait le
centre par où doivent transiter les
armes sur le point d’être livrées au
Hezbollah. Les dirigeants israéliens
ont mis en garde à plusieurs reprises:
ils ne permettront pas le transfert de
certains matériels à la milice chiite
libanaise: armes chimiques, missiles
antiaériens et sol sol, notamment des
Scuds améliorés. Le message est donc
essentiellement militaire. Israël
empêchera tout bouleversement de
l’équilibre des forces.
Quelle réflexion est menée en Israël
sur la Syrie, notamment par rapport aux
armes chimiques ? L’Etat hébreu
pourrait-il s’engager dans le conflit
syrien ?
Les responsables israéliens suivent de
très près le déroulement de la guerre
civile en Syrie et ne s’y engageront
pas. Les analystes considèrent que
l’effondrement du régime d’Assad
affaiblira considérablement l’axe
Hezbollah-Iran, mais craignent la prise
de contrôle de tout ou d’une partie du
territoire syrien par des éléments du
Djihad mondial liés à al-Qaida.
Les Etats-Unis ont-ils été prévenus
du raid, comme l’affirme la presse
américaine ?
D’après ce que l’on sait, l’opération
a été précédée par des contacts au
niveau militaire. Le général Aviv
Kochavi, le chef des renseignements
militaires israéliens, était au
Pentagone à Washington et le général de
réserve Yaacov Amidror, le conseiller à
la sécurité nationale de Benjamin
Netanyahu, a effectué une visite à
Moscou. La Maison Blanche a d’ailleurs
lancé un avertissement au gouvernement
syrien pour qu’il ne transfère pas de
matériel militaire au Liban. Hillary
Clinton, dans une de ses dernières
déclarations, a accusé l’Iran
d’accroître son implication dans la
guerre civile en Syrie. Pour Téhéran, le
maintien au pouvoir de Bachar el Assad
est un objectif stratégique. La
secrétaire d’Etat a également accusé les
Russes de fournir une aide directe au
gouvernement syrien.
La grande question à laquelle nous
n’avons pas de réponse pour l’instant
est la suivante: les Israéliens n’ont
pas revendiqué le bombardement de
Jamaraya et les Syriens auraient pu
s’abstenir de réagir comme ils l’on fait
dans le passé lors de la destruction de
leur réacteur nucléaire en 2007. Alors,
pourquoi ont-ils annoncé le raid et
menacé Israël de représailles? Les
Iraniens et le Hezbollah, également,
sont montés au créneau. Les dirigeants
israéliens ne croient pas en une riposte
militaire des uns ou des autres. Mais
précaution oblige, deux batteries
antimissiles Dôme d’acier on été
déployées dans le nord d’Israël.
Une chose est quasi certaine, comme
l’écrit Alex Fishman, l’affaire syrienne
risque d’embraser la région. Et, voyant
la tension monter dans les régions, les
stations de distributions de kits NBC
(nucléaire, biologique, chimique) ne
désemplissent pas.
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