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Justice climatique

L'économie verte, solution magique
ou néolibéralisme vert ?
Alter Echos

Jeudi 14 juin 2012

L’économie verte est le principal sujet à l’ordre du jour de la prochaine conférence des Nations-Unies sur le développement durable qui se tiendra à Rio de Janeiro (20-22 juin). Et celui sur lequel les controverses sont les plus fortes. Après avoir publié les vidéos Du développement durable à l’économie verte, quels enjeux ? Quelle alternative ? et Financiarisation de la nature, l’exemple des forêts, Alter-Echos (www.alter-echos) poursuit son travail d’explication en publiant une longue interview d’Egardo Lander, professeur de Sciences sociales à l’Université centrale du Venezuela qui décrypte notamment le rapport « Vers l’économie verte » du Programme des Nations-Unies sur l’Environnement, l’une des bases intellectuelles et théoriques des négociations autour de Rio+20.

Alter-Echos : Le sujet principal de la conférence des Nations-Unies, dite Rio+20, est l’économie verte. De quoi s’agit-il ?

Edgardo Lander : Je pense que le concept d’économie verte est une nouvelle démonstration de l’extraordinaire capacité des institutions internationales, aussi bien les institutions financières que le système des Nations Unies toujours plus pénétré par cette pensée néo-libérale dominante, de s’approprier n’importe quel concept qui vient d’approches critiques sur la situation dans le monde. Il est alors complètement vidé de quelque contenu critique, pour le convertir en un nouvel instrument de reproduction de l’ordre.

Il en fut de même lorsque le développement a été l’objet de plus en plus de discussions il y a 20 ans, alors même qu’était soulevée la nécessité de trouver une alternative au développement. Il apparait alors tout un dispositif politique et épistémologique extraordinairement puissant, à savoir le développement durable. Et d’une certaine manière la notion de développement durable a sauvé l’idée de développement et a fait perdurer pendant longtemps la force de l’idée de développement. Et je pense que l’idée d’économie verte joue désormais le même rôle.

Le document qui a servi de base conceptuelle, théorique et politique aux débats autour de Rio+20, est le document publié par le Programme des Nations Unies sur l’environnement (PNUE), qui s’intitule justement « Vers une économie verte ». Il est affirmé que la logique de fonctionnement actuel du système capitaliste est inévitable et qu’il n’y a aucune possibilité de la modifier. Au fond, cette approche tend a approfondir la domination du capital financier, avec la complicité du système des Nations Unies, permettant d’éviter une mise en cause plus profonde du modèle économique dominant.

Cette économie verte, associée au développement durable, est donc supposée générer plus de croissance, parvenir à plus d’emplois, résoudre les problèmes environnementaux, réduire les émissions de gaz à effets de serre. C’est une solution magique pour tous les problèmes, mais c’est une solution magique qui préserve ce qui est fondamental, à savoir la logique d’accumulation capitaliste qui existe aujourd’hui.

Sur quels principes reposent cette transition vers l’économie verte ?

Selon le PNUE, une des bases conceptuelles de cette économie verte est le rejet du mythe selon lequel il existerait un dilemme entre progrès économique et soutenabilité environnementale. Avec l’économie verte, il ne s’agit donc pas de questionner l’hypothèse d’une croissance économique, ni la notion de progrès, mais de réorienter les investissements et l’innovation technologique vers l’économie verte. Dans cette perspective, la cause fondamentale de toutes les crises écologiques actuelles est « la mauvaise allocation du capital », principalement due à des « défaillances de marché » qui ont amené à surtout investir dans les activités économiques néfastes pour l’avenir de la planète et des populations.

Mais la constatation de ces « défaillances de marché » et les conséquences extrêmement dangereuses pour la vie et la planète qu’elles engendrent, n’a pas conduit le PNUE à indiquer que c’est la conséquence du pouvoir croissant des marchés financiers. Et encore moins le résultat de la soumission croissante de la démocratie, de l’égalité, de la solidarité ou de la préservation de la vie à un critère unique, à savoir la maximisation du profit à court terme du capital. Pour le PNUE, c’est le fait que des mauvaises informations sont envoyées aux marchés, comme la non-incorporation des coûts des « externalités » et des politiques publiques inadaptées telles que les « subventions perverses et préjudiciables pour l’environnement ».

Les solutions consistent donc à modifier les informations dans lesquelles agissent les marchés, et à travers « des incitations basées sur le marché », il serait possible de réorienter le capital vers des investissements et innovations vertes. En ce sens, il s’agirait de mobiliser à peine 2 % du PIB de l’économie mondiale. Selon le PNUE, « les secteurs de la finance et de l’investissement contrôlent des milliards de dollars et sont en mesure de fournir l’essentiel du financement nécessaire à la transition verte ». Le rapport précise qu’il est nécessaire que les investisseurs perçoivent que ces investissements verts augmentent leur compétitivité. Ainsi, les taux de croissance et taux de profit seraient plus importants avec une économie verte que sans.

Cette approche opère donc à l’intérieur même des dogmes du néolibéralisme et des règles de libre-échange, devenu l’unique imaginaire existant au sein des institutions et organisations internationales. Selon le PNUE, le futur de la planète dépend donc du fait qu’il soit possible de mettre en place des politiques publiques capables de soudoyer les investisseurs en leur garantissant des taux de profit suffisamment élevés pour qu’ils se comportent comme de bons citoyens soucieux de la planète.

L’économie verte revient-elle simplement à peindre le capitalisme en vert ou bien est-ce une nouvelle phase du capitalisme ?

Les deux, je pense. Obligatoirement, la dimension discursive, cette espèce de greenwashing du capitalisme est une dimension importante. Il suffit de voir comment c’est un thème qui attire l’attention du monde entier et que cela devient l’objet de propagande des entreprises multinationales et des banques. Aujourd’hui, toutes les entreprises pétrolières, énergétiques, toutes les banques sont vertes. L’économie verte est donc une construction discursive qui évite de mettre l’accent sur la façon dont l’économie fonctionne, sur quoi se basent les processus de production et de consommation, puisque cela devient une sorte de mécanisme avec une façade verte qui peut donc continuer plus ou moins de la même manière.

Mais ce n’est pas seulement du greenwashing ni la simple construction d’un discours hégémonique expliquant que c’est la solution et que les multinationales se soucient de l’environnement. Ce qui est recherché est aussi une nouvelle période d’accumulation, car il s’agit de trouver un lieu de réalisation et de valorisation pour cette énorme quantité de ressources financières. Les entreprises classiques, qui d’une certaine manière correspondent à la vieille économie et qui cherchent des portes de sortie, en trouvent au sein de ce qui est appelée économie verte. Il s’agit par exemple des marchés du carbone, du dispositif REDD et des mécanismes similaires qui sont clairement les nouveaux dispositifs de l’économie verte.

Incapables de regarder un peu plus loin que le fondamentalisme néolibéral, ils ne peuvent pas imaginer qu’il puisse exister d’autres formes de relations entre les êtres humains et leur environnement. Il s’agit donc d’amplifier la portée des marchés pour qu’ils incorporent expressément la nature dans leur logique de valorisation. Ceci suppose le dépassement de tous les obstacles et résistances qui font face à la marchandisation de la nature. Il faut donc commencer par donner un prix à la nature, et ainsi s’ouvrent de nouveaux horizons de spéculation et valorisation du capital.

Est-ce que le fait que le sommet Rio+20 se déroule au Brésil est important dans cette perspective ?

Je pense qu’il faut effectivement se demander ce que cherche le Brésil en accueillant cette conférence. Il faut se rendre compte que le Brésil joue aujourd’hui un double jeu. D’une part envers le continent sud-américain où son pouvoir augmente avec une visée hégémonique s’opposant à celle des États-Unis. Mais il faut comprendre également que le Brésil ne se limite pas au continent, mais joue dans la cour des grands. Le Brésil utilise ainsi sa relation avec le continent pour obtenir un siège au conseil de sécurité des Nations-Unies, ou pour être reconnu comme l’une des principales économies. Et ce double-jeu est présent en permanence.

A ce titre, il est intéressant de se rendre compte que les principaux conflits liés à l’extraction en Amérique Latine, sont liés à la présence du Brésil. Dans le cas de la route du Tipnis en Bolivie, par exemple, Lula a joué un rôle important pour faire pression sur la Bolivie pour obtenir la création de la route, et ce alors que le financement devait venir de la Banque de développement du Brésil, plus importante banque de développement de la planète. Le tout profitant généralement aux entreprises brésiliennes.

Plus généralement, le modèle ayant présidé à la construction des infrastructures routières et de communications en Amérique Latine, fut pensé depuis le Brésil et en fonction du Brésil. Bien plus grave qu’un accord international qui peut toujours être revu, la construction d’infrastructures en fonction d’un modèle productif déterminé est bien plus définitive, plus difficile à modifier. Nous assistons à un processus de refonte du territoire en fonction de l’approfondissement de la logique primo-exportatrice extractiviste, le Brésil en étant le centre. Si ce dernier se présente avec une image verte, qui va bien pour Rio+20, cela a peu à voir avec les principaux conflits qui s’y déroulent, tels que la construction de l’immense barrage Belo Monte, ou qui ont lieu à l’extérieur de ses frontières.

Quelles sont les alternatives à l’économie verte ? Les droits de la nature ? Quel est le paradigme alternatif ?

Le paradigme alternatif est un paradigme en construction qu’il nous faut imaginer. Il est suffisamment clair que le paradigme dominant ne fonctionne pas. Nous disposons de suffisamment d’expériences de modèles de production locaux et régionaux, d’expériences. Ce qu’il nous manque c’est la construction d’une alternative politiquement viable qu’un gouvernement pourrait mettre en œuvre. Cela ne peut prendre corps qu’à travers un long processus de transition. La question est de savoir si cette transition est assez rapide pour être en mesure de répondre à la vitesse avec laquelle le processus de destruction se produit. Je n’ai guère de doute sur le fait que nous vivons une crise civilisationnelle et sur l’idée que la notion d’une croissance continue sur une planète limitée atteint ses limites. Mais nous avons peu de temps.

 

 

   

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Source : Alter Echos
http://alter-echos.org/...

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