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Carnets du diplo
Mort
de George Habache
Alain Gresh
George Habache
27 janvier 2008
Le dirigeant du Front populaire de libération de la Palestine
vient de mourir à Amman à l’âge de 82 ans. Voici sa
biographie telle que nous l’avons publiée, Dominique Vidal et
moi-même, dans Les 100 clés du Proche-Orient (Hachette,
coll. « Pluriel », 2006).
Né le 2 août 1926 à Lydda (Palestine), George Habache est
issu d’une famille de commerçants chrétiens de rite grec
orthodoxe. En juillet 1948, durant la guerre de Palestine, sa
famille est expulsée de sa ville natale. Installé à Beyrouth,
il poursuit à l’université américaine des études de pédiatrie,
qu’il achève en 1951. Il est déjà très actif politiquement,
mais ce n’est que l’année suivante qu’il fonde le Mouvement
des nationalistes arabes (MNA). À partir de ce moment, sa vie se
confond avec celle de son organisation.
C’est cette même année 1952 que George Habache ouvre à
Amman un “dispensaire du peuple”. C’est de là qu’il
participe à la direction du MNA dont le but est ainsi défini :
“Tant que n’existera pas l’État unifié regroupant
l’Irak, la Jordanie* et la Syrie (comme premiers pas), notre
confrontation avec les Juifs et l’alliance occidentale sera
quasiment impossible.”
Arrêté en 1957, il se réfugie à Damas, au moment de la
constitution de la République arabe unie entre l’Égypte et la
Syrie. Convertis au nassérisme, George Habache et le MNA développent
des théories contraires à celles du Fath. L’essentiel, selon
eux, pour la “libération de la Palestine”, n’est pas la
mobilisation des Palestiniens* eux-mêmes, mais l’engagement des
pays arabes contre Israël*. Le rôle des Palestiniens se borne à
celui de “catalyseur”. En 1964, le MNA crée une branche
palestinienne qui agit à partir de Beyrouth, où le Dr Habache
s’est installé. Elle mène sa première action armée en 1966.
La guerre de 1967, qui porte un coup sérieux au prestige de
Nasser, frappe de plein fouet le MNA. Celui-ci disparaît, emporté
par le naufrage de l’idée arabe que le Raïs égyptien a incarnée.
Le MNA donne naissance à plusieurs sections régionales, dont les
plus célèbres sont la branche du Yémen du Sud, qui s’empare
du pouvoir à la fin de 1967 et le Front populaire pour la libération
de la Palestine (FPLP) que dirige George Habache.
Installé en Jordanie avec les autres organisations de fedayin,
le FPLP développe un grand activisme sur le terrain et se fait
connaître de l’opinion internationale par les détournements
d’avions, dont le premier frappe, le 23 juillet 1968, un
appareil de la compagnie El Al. Affaibli en février 1969 par une
scission impulsée par Nayef Hawatmeh, le FPLP n’en joue pas
moins un rôle provocateur dans le royaume hachémite, où il
appelle à la chute du régime. “La libération de la Palestine
passe par Amman”, clame-t-il, entraînant l’OLP dans
l’affrontement de septembre 1970 (voir “Septembre noir”),
qui verra l’élimination de la Résistance de Jordanie.
Après cette lourde défaite, le FPLP infléchit ses
orientations. Il renonce, en 1972, aux “opérations à l’extérieur”,
préférant concentrer ses coups en Israël, mais sans établir de
distinction entre objectifs militaires et cibles civiles. Il
adopte le marxisme-léninisme comme théorie. Il rompt avec ses éléments
les plus extrémistes, comme le Dr Wadid Hadad. Après 1973, le
FPLP n’en est pas moins au cœur de l’opposition aux nouvelles
orientations de l’OLP. George Habache condamne l’idée d’un
mini-État en Cisjordanie et à Gaza ; il s’oppose à la
tenue de la conférence de Genève et au voyage de Yasser Arafat
aux Nations unies ; il attaque violemment l’URSS, coupable
à ses yeux de pousser l’OLP dans la voie de la capitulation.
Son seul allié sur la scène internationale, à l’époque, est
l’Irak*.
Après la signature des accords de Camp David, l’unité
palestinienne se ressoude mais le FPLP, qui a quitté le Comité
exécutif en 1974, ne le réintègre qu’en 1981. Ayant subi une
grave opération du cerveau à la fin de l’année 1980, le Dr
Habache reste à l’écart pendant de longs mois. Les divergences
restent profondes entre le FPLP et le Fath, et éclateront après
1982. George Habache se retrouve à nouveau au centre d’une
coalition anti-Arafat : le Front de salut national
palestinien auquel participent également les dissidents du Fath,
la Saïka et le FPLP-Commandement général d’Ahmad Jibril.
Pourtant, contrairement à ces groupes, il ne refuse pas de
participer au CNP d’Alger d’avril 1987 — à l’issue duquel
il rejoint à nouveau les organes exécutifs de l’OLP — et à
ceux de novembre 1988 et de septembre 1991. S’il rejette
certaines décisions de cette dernière session, en particulier
l’acceptation de la résolution 242, il déclare vouloir
maintenir l’unité palestinienne.
Les accords d’Oslo prennent George Habache et le FPLP à
contre-pied. Le mouvement tente, avec les organisations de la
gauche palestinienne et islamistes, de créer un front
d’opposition, mais sans véritable succès. En Cisjordanie et à
Gaza, il voit son influence s’effriter et de nombreux militants,
même hostiles à l’accord d’Oslo, regrettent une opposition
stérile ; certains participeront même aux élections du 20
janvier 1996. Le FPLP assiste au Conseil national palestinien qui
se tient à Gaza, en avril 1996. Il se contente de discuter le
nombre de sièges qui lui sont attribués, et ses représentants
n’assistent pas à la session qui abroge la Charte de 1968.
Pragmatique, croyant que les accords d’Oslo sont devenus une
réalité incontournable, il répond positivement, en 1999, à
l’offre de dialogue de l’Autorité palestinienne à la veille
de l’échéance sur le statut final des territoires
palestiniens. L’Autorité et l’opposition se mettent
d’accord sur les “constantes palestiniennes” : la création
d’un État palestinien indépendant avec Jérusalem pour
capitale, le démantèlement des colonies israéliennes, le retour
des réfugiés dans leurs foyers et la réactivation de l’OLP
“en tant que cadre de l’action politique palestinienne”.
Israël accepte le retour du FPLP et des cadres à condition
qu’ils renoncent à la lutte armée.
En juillet 2000, Moustapha Al Zibri, alias Abou Ali Moustapha,
succède à Georges Habache au poste de secrétaire général. Un
an plus tard, en août 2001, le nouveau chef du FPLP est victime
de la politique de liquidation israélienne. L’organisation,
jusque-là peu active dans la seconde intifada, engage une série
de représailles, dont de nombreux attentats suicides et
l’assassinat en octobre de Rehavam Zeevi, ministre du tourisme
israélien au discours radical prônant le transfert des
Palestiniens. Le nouveau chef du FPLP, Ahmad Saadat, représentant
l’aile la plus radicale du mouvement, est arrêté par
l’Autorité palestinienne en janvier 2002.
Dirigeant intransigeant, le Dr Habache a longtemps gardé une
grande autorité dans l’OLP, chez ses amis comme chez ses
adversaires, a su, quelles qu’aient été ses alliances avec des
régimes arabes, notamment avec Damas, préserver l’indépendance
du FPLP et conserve une influence dans les camps du Liban, de
Jordanie et de Syrie.
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