Opinion
Palestine : une
femme en grève de la faim depuis un mois
Alain
Gresh
Alain
Gresh
Jeudi 15 mars
2012
Hana Al-Shalabi, une Palestinienne de
29 ans, avait déjà passé deux ans en
détention administrative. Elle avait été
libérée en octobre 2011, dans le cadre
de
l’échange entre le Hamas et le
gouvernement israélien. Le 16 février
2012, elle est à nouveau arrêtée, après
avoir été battue. A la prison, elle a
été déshabillée par un homme et fouillée
par lui. Elle est en grève de la faim
depuis environ un mois pour demander sa
libération (lire
« Hana Al-Shalabi, Detained by Israel
without Trial, Sexually Tortured, on Day
27 of Hunger Strike »).
Avez-vous lu quelques lignes sur elle
dans la presse ? Avez-vous entendu des
protestations véhémentes du porte-parole
du Quai d’Orsay ?
La détention administrative, qui
permet au gouvernement israélien
d’emprisonner, sans cause et pour des
périodes illimitées, des militants
palestiniens, a déjà suscité une grève
de la faim de Khader Adnon, d’une durée
de 66 jours. Elle fait partie de ces
mesures arbitraires prises par les
autorités pour mater les autochtones.
L’ironie de l’histoire est que ces
mesures se fondent sur les arrêtés
d’urgence de défense (Defence
Emergency Regulations) adoptés par
le Royaume-Uni en 1945 pour lutter
contre… les groupes sionistes armés, qui
usaient largement du terrorisme.
À l’époque, comme je le rappelle dans
De quoi la Palestine est-elle le nom ?,
ces mesures avaient été dénoncées par
nombre de juristes, dont le docteur
Moshe Dunkelblum, qui devait siéger plus
tard à la Cour suprême d’Israël. Le 7
février 1946, il déclarait : « Ces
ordonnances constituent une menace
constante contre les citoyens. Nous,
juristes, voyons en elles une violation
flagrante des principes fondamentaux de
la légalité, de la justice, de la
discipline. Elles légalisent le plus
parfait arbitraire des autorités
militaires et administratives. (…)
Elles dépouillent les citoyens de
leurs droits et confèrent aux autorités
des pouvoirs illimités. »
Deux ans plus tard, quand elles sont
appliquées aux Arabes, citoyens de
l’Etat d’Israël, elles ne suscitent
guère de protestations. Les lois
scélérates ne seraient-elles
condamnables que lorsqu’elles visent les
« civilisés » ?
Détention administrative sans
jugement, instauration de couvre-feu
dans certaines régions, création de
tribunaux spéciaux : telles furent les
pratiques « normales » réservées aux
Palestiniens en Israël jusqu’en 1967...
Depuis, elles ont été étendues à tous
les Palestiniens des territoires
occupés.
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