Al-Ahram Hebdo
Obama et sa vision du Proche-Orient
Radwan Ziyada
Mercredi 17 décembre 2008
Au cours de sa campagne
électorale, Obama avait fait allusion, voire promis, de retirer
les forces américaines de l’Iraq dans un délai qui sera fixé par
les dirigeants présents sur le terrain. Mais la décision
politique et militaire stipulant le retrait des forces devra
déjà être prise. Or, le fossé entre les républicains et les
démocrates semble très profond en ce qui concerne la situation
des forces américaines en Iraq et se prolonge également à une
vision beaucoup plus lointaine se basant sur 3 points : la façon
de gérer la guerre en Iraq, l’amélioration de l’image des
Etats-Unis dans le monde entier après les nouvelles qui se sont
répandues concernant Guantanamo, Abou-Gharib et les vols aériens
secrets. Et enfin, la relation entre les Etats-Unis et les
autres institutions, en particulier l’Onu. Ces 3 points résument
le dialogue actuellement en cours à Washington autour de la
politique étrangère américaine dans l’avenir.
Pratiquement parlant, c’est la
position vis-à-vis de ces causes qui déterminera les traits de
la politique américaine envers le Proche-Orient, avec de petites
différences qui ne sortiront pas du cadre général, mais qui
reviendront plutôt à l’expérience personnelle.
La vision d’Obama met l’accent
sur sur la nécessité de reformuler le rôle coopératif des
Etats-Unis dans le monde et de mettre fin à la politique
unipolaire ou la politique d’hégémonie individuelle. En effet,
bien que les Etats-Unis constituent l’unique superpuissance au
niveau politique, militaire et économique, ils ne peuvent pas
guider seuls le monde sans entrer en accord avec les pôles
internationaux, en particulier les alliés de l’Union européenne.
Partant de cette conception, il est nécessaire d’étudier avec
les alliés la meilleure politique permettant de mieux gérer la
guerre en Iraq et de sortir de ce marécage. En effet, cette
guerre a épuisé le budget américain en gaspillant des milliards
de dollars et a nui à la réputation des Etats-Unis à l’étranger.
Cette guerre a également entraîné une déchirure profonde dans la
société américaine et a causé la perte de confiance entre le
peuple américain et son gouvernement, en particulier quand ce
dernier a décidé de s’engager dans cette guerre sans qu’il y ait
de prétextes réels. Le peuple a découvert que les prétentions
concernant l’existence d’armes de destruction massive n’étaient
que de purs mensonges. C’est ce qui a alors empêché les forces
américaines de concentrer leurs efforts en Afghanistan et a
permis l’expansion d’Al-Qaëda dans le pays en contrepartie de la
concentration sur le changement du régime de Saddam Hussein en
Iraq. C’est pour cela qu’Obama accorde une priorité à
l’Afghanistan et non à l’Iraq.
Il est évident que pour changer
la réputation des Etats-Unis dans le monde entier, il faut
traiter les autres pays, en particulier leurs alliés classiques,
d’une autre manière. Washington a également besoin de déployer
d’énormes efforts pour améliorer son image à l’intérieur des
sociétés musulmanes. Obama a appelé à la tenue d’un sommet avec
les dirigeants du monde islamique pour étudier les meilleurs
moyens d’améliorer l’image des Etats-Unis et pour connaître les
causes de l’inquiétude profonde chez les peuples musulmans
envers son pays. De plus, au cours d’un débat entre Obama et sa
concurrente Clinton tenu à Texas lors des élections
préliminaires, on lui a posé une question concernant la façon
avec laquelle il aura affaire avec le nouveau président cubain
qui succédera à Castro et si la rencontre devrait être
conditionnée comme l’a voulu Clinton. Il avait alors répondu que
la rencontre ne devait pas être conditionnée pour ne pas donner
l’impression que le président des Etats-Unis est supérieur aux
autres. Il a également annoncé qu’il
était prêt à coopérer avec les Cubains sur de nombreux dossiers
qui intéressent les 2 parties, en particulier les droits de
l’homme.
D’un autre côté, en dévoilant les noms des
conseillers d’Obama concernant le Proche-Orient comme Denis Ross
et Kirtz, il semble que l’intérêt des démocrates soit concentré
sur le conflit arabo-israélien. Il est même possible de voir la
nouvelle Administration de plus en plus déterminée à gérer ce
conflit et à diminuer la violence qui y règne. Et ce, en
considérant que le règlement de ce conflit est étroitement lié
aux autres évolutions dans la région, en particulier la relation
entre le Hamas et le Fatah.
Quant à la question de la démocratisation ou
de la propagation de la démocratie au Proche-Orient, Obama et
Clinton avaient clairement affiché, lors des élections
préliminaires, leur mépris vis-à-vis de la politique de Bush
concernant ce point. Leurs conseillers ont à maintes reprises
annoncé que ce n’était pas le rôle ni la responsabilité des
Etats-Unis. La liste des experts du Proche-Orient auxquels les 2
candidats avaient eu recours, dévoile qu’ils s’intéressaient
plus au conflit arabo-israélien qu’à la propagation de la
démocratie au Proche-Orient.
Or, ceci ne signifie pas que les Etats-Unis
renonceront définitivement à ce rôle. Selon l’agenda proposé, la
propagation de la démocratie occupera une position moins
importante dans la politique étrangère des Etats-Unis envers le
monde arabe dans un avenir proche. Bref, la réponse à toutes ces
questions restera imprécise jusqu’à ce que le nouveau président
prenne ses fonctions en 2009. L’éventualité la plus proche sera
le retour à la politique de la stabilité, quel que soit le coût
politique de la démocratie arabe. C’est donc la stabilité et non
la réforme qui encouragera la direction américaine à
s’intéresser au Proche-Orient.
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Publié
le 22 décembre 2008 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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