Monde Arabe
|
Rencontre stérile
Rania Adel
|
Palestine.
Un nouveau sommet palestino-israélien n’a produit aucune percée
politique. Entre-temps, l’Etat hébreu poursuit ses incursions
dans la bande de Gaza.
Mercredi 16 avril 2008
Les entretiens
palestino-israéliens se suivent et se ressemblent, sans parvenir
à apporter la moindre percée dans un processus de paix au point
mort. Une énième rencontre au sommet a eu lieu dimanche sur fond
de violence et d’incursion israélienne. Le président palestinien
Mahmoud Abbass et le premier ministre israélien Ehud Olmert se
sont vus à Jérusalem dans une rencontre annoncée à la dernière
minute. Les entretiens en tête-à-tête ont duré une heure et
demie. Peu de choses ont filtré de la réunion qui s’est tenue à
la résidence du chef du gouvernement israélien. Il s’agissait
d’une réunion de coordination avant la visite de M. Abbass en
Russie et aux Etats-Unis et celle du président américain George
W. Bush en début mai. M. Abbass doit rencontrer le président
Vladimir Poutine le 18 avril à Moscou et M. Bush le 24 avril à
Washington.
Le président américain doit pour
sa part assister aux festivités marquant le 60e anniversaire de
la création de l’Etat hébreu les 8 et 9 mai et pourrait selon
une source palestinienne non confirmée avoir un sommet en Egypte
avec MM. Olmert et Abbass.
Les discussions Olmert-Abbass ont
eu lieu dans le but souhaité de parvenir à un règlement de leur
conflit vieux de 60 ans avant la fin du mandat de M. Bush en
janvier 2009. Avant sa rencontre avec M. Olmert, M. Abbass avait
reçu le général James Jones, l’envoyé des Etats-Unis chargé du
suivi du dossier sécuritaire des pourparlers. « Le président
Abbass a demandé au premier ministre de coopérer avec l’Egypte
dans ses efforts en vue d’un cessez-le-feu dans la bande de Gaza
», a déclaré l’un des principaux négociateurs palestiniens, Saëb
Eraqat, dans une conférence de presse à Ramallah en Cisjordanie.
Il a aussi appelé les divers groupes armés palestiniens « à
coopérer avec l’Egypte afin qu’un cessez-le-feu total protège la
bande de Gaza des agressions israéliennes et empêche un désastre
dans la région ».
Il faisait allusion au mouvement
islamiste palestinien Hamas, hostile aux négociations avec
Israël, qui contrôle la bande de Gaza depuis qu’il en a chassé
les forces fidèles au Fatah de M. Abbass en juin 2007. Ce
territoire palestinien, d’où sont tirées des roquettes sur le
sud d’Israël, est souvent la cible d’opérations israéliennes
meurtrières. Le Hamas avait menacé d’envahir la frontière avec
l’Egypte si l’Etat hébreu ne cesse pas le blocus qu’il impose à
la bande de Gaza.
Côté israélien, l’entourage d’Olmert
s’est refusé à tout commentaire, l’un des proches du premier
ministre parlant seulement de « discussions sérieuses ». Mais à
voir le sort des précédentes rencontres, on pourrait certes être
sceptiques quant aux résultats à attendre. En effet, les
pourparlers de paix n’ont pas progressé depuis qu’ils ont été
officiellement relancés en novembre 2007 à la conférence de paix
d’Annapolis aux Etats-Unis. Israéliens et Palestiniens
s’accusent mutuellement de bloquer toute avancée.
Les pourparlers ont jusqu’ici été
minés par la poursuite de la colonisation juive en Cisjordanie
et par les ripostes d’Israël souvent meurtrières aux tirs de
roquettes palestiniennes depuis Gaza.
Bien plus, les discussions
palestino-israéliennes ont été suspendues le 19 février dernier,
à la demande de M. Abbass après une opération de l’armée
israélienne dans la bande de Gaza lors de laquelle 130
Palestiniens ont été tués.
C’est à la suite d’une médiation
de la secrétaire d’Etat américaine Condoleezza Rice que M.
Abbass avait annoncé une reprise des rencontres avec le premier
ministre israélien.
Le Hamas est hostile à ces
négociations qui, selon lui, « masquent la poursuite de la
colonisation, la judaïsation (de Jérusalem) et donnent une
justification à la poursuite des crimes contre le peuple
palestinien ».
Promesses non tenues
En effet, le point de vue du
Hamas se justifie par le fait qu’Israël n’a jamais tenu ses
promesses. Les autorités israéliennes ont levé 44 barrages
routiers, la plupart sans grande importance, en Cisjordanie
occupée, soit moins que le nombre promis à la secrétaire
américaine d’Etat, Condoleezza Rice, a déclaré l’agence de
liaison humanitaire de l’Onu (OCHA). Le Bureau de la
coordination des affaires humanitaires de l’Onu, qui recense les
barrages routiers en Cisjordanie, a mené sa propre enquête de
terrain sur les 61 points dont on avait annoncé la levée après
la venue de Rice.
Dans un rapport préliminaire
destiné aux pays donateurs occidentaux, l’OCHA écrit que seuls
44 d’entre ont été retirés, 6 restent en place et 11 sont
introuvables. Et sur les 44 obstacles déblayés confirmés par
l’OCHA, 5 seulement sont classés par l’agence de l’Onu parmi les
barrages « significatifs » pour les Palestiniens.
Les Palestiniens dénoncent dans
ce réseau de centaines de postes de contrôle et de barrages
routiers une punition collective qui entrave leur développement
économique et freine les pourparlers de paix.
Outre les barrages routiers,
l’armée israélienne a effectué cette semaine une incursion dans
la bande de Gaza, qui a coûté la vie à sept Palestiniens dont un
enfant de 10 ans, selon un nouveau bilan, a-t-on appris de
sources concordantes. Cette incursion était intervenue après les
menaces des dirigeants israéliens de frapper le Hamas. « Nous
allons régler nos comptes avec le Hamas qui est seul responsable
de tout ce qui se passe dans la bande de Gaza. Nous choisirons
le moment et l’endroit voulus », a prévenu le vice-ministre de
la Défense, compromettant par la même les fragiles espoirs de
reprise des négociations de paix.
Droits de
reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM
Hebdo
Publié le 16 avril 2008 avec
l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
|