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Israël
enclenche sa guerre des pierres
Achraf Aboul-Hol
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Al-Aqsa
. Des fouilles israéliennes
à l’entrée de l’Esplanade des mosquées à Jérusalem,
mettent en danger le troisième lieu saint de l’islam,
provoquant la colère du monde arabe et musulman et le risque
d’une nouvelle Intifada.
Journée
mémorable que ce mardi 6 février, dans cette ville de Jérusalem
marquée par la violence et les tourments d’un conflit qui
semble insoluble. Les bulldozers israéliens ont pénétré sur
l’Esplanade des mosquées dès 7h00 du matin à partir de
l’angle sud-ouest et ont commencé leur œuvre de destruction
avec l’objectif de parvenir à un dessein spécial : poursuivre
les fouilles pour retrouver le Temple de Salomon. Ce sont les archéologues
sionistes qui, depuis leur avènement en Palestine, croient en
l’existence de ce temple en dessous de la mosquée, et en font
un argument pour prouver que la Palestine leur appartient (Lire
encadré page 4). Jusqu’à présent, aucune trace réelle de cet
édifice n’a été trouvée. Pourtant, les responsables israéliens
persistent et signent.
S’ils
sont divisés sur l’opportunité de cette opération qui a mis
le feu aux poudres, c’est plutôt sur son timing et non sa
finalité. Il s’agit pour eux de ne pas perdre l’appui des «
Arabes modérés », surtout que l’Egypte a convoqué
l’ambassadeur d’Israël au Caire pour protester contre cette
mesure qui constitue une provocation pour les musulmans. Même le
ministre israélien de la Défense, Amir Peretz, a demandé au
premier ministre Ehud Olmert, de suspendre ces travaux. Une
demande qui a reçu une fin de non-recevoir de la part d’un
Olmert en proie à toutes sortes de difficultés à l’intérieur
pour son échec au Liban et pour les différentes frasques de sa
vie personnelle et les affaires de corruption. Il a fait alors
appel aux sentiments religieux d’un Israël de plus en plus placé
sous le signe d’une droite étriquée. Ainsi pourrait-il
rassembler l’opinion autour de lui, surtout les juifs les
plus extrémistes.
Le
quotidien Haaretz a révélé le pot aux roses. Peretz, lui, a
paru plus pragmatique, puisque son argument était que ces travaux
risquent de provoquer « une escalade et une détérioration sécuritaire
dans la région ». Selon le quotidien, Peretz a accompagné son mémorandum
d’une « note administrative » élaborée par le chef du
service de sécurité de son ministère, le général Gilaad qui a
compris « des précisions sécuritaires en faveur d’un arrêt
des opérations ». Le cabinet du premier ministre a refusé de
s’y plier et de se rendre à ces arguments. Voire, il s’en est
pris au quotidien pour avoir dévoilé ce message et s’est
demandé comment une fuite a eu lieu, si rapidement, permettant
que l’information arrive à Haaretz. La mairie de Jérusalem a
cependant annoncé la suspension uniquement des travaux de
construction d’une rampe d’accès à l’Esplanade des Mosquées,
mais les fouilles se poursuivent sur le site.
Pour
le ministère de la Défense, c’est le timing qui est la
principale source de danger. En principe, Israël adopte, en ce
moment, des mesures d’apaisement avec les Palestiniens, surtout
dans le contexte de la réunion inter-palestinienne entre le Fatah
et le Hamas à La Mecque et aussi du sommet prévu entre Olmert et
le président palestinien Mahmoud Abbass, en présence de la secrétaire
d’Etat américaine, Condoleezza Rice.
Et
aux sources dans ce même ministère de voir cette action comme
compromettant les relations entre Israël et des éléments modérés
importants dans le monde arabe, qui ont ressenti une « vive colère
» face à cette violation. Mais Olmert, au lieu d’ordonner
d’arrêter les travaux de destruction et de fouilles, a adopté
une proposition de Yisraël Hassoun, un député de la droite extrémiste
appartenant au parti le plus rigoureux Israel Beitouna, de mettre
sur Internet un site expliquant les travaux afin d’expliquer
qu’ils peuvent ne pas constituer de danger pour la mosquée. Or,
pour les musulmans, la question ne réside pas dans la manière
dont les travaux ont lieu, mais dans leur principe même. Ils ne
reconnaissent pas l’autorité que se donne Tel-Aviv sur les
lieux saints et la latitude qu’il se donne de faire des fouilles
ou des restaurations sur l’Esplanade des mosquées.
La
question du timing
Les
arguments israéliens paraissent d’ailleurs peu convaincants même
pour une partie de la classe politique israélienne, qui trouve
que le moment n’est pas bien choisi. Ainsi pour le Parti
travailliste, « il faut attendre des jours meilleurs pour ce
faire ». Le principe est le même chez les Israéliens, seuls les
détails suscitent des divergences. Ce que comprennent bien les
Arabes et les musulmans. Ainsi de nombreux mouvements islamiques
ont-ils organisé vendredi une « journée de colère » pour
protester contre des travaux israéliens aux abords du lieu saint.
Heurts et arrestations ont eu lieu, bien que la police israélienne
ait proclamé, bien avant l’état d’urgence, dans le périmètre
de la mosquée et interdit aux fidèles de moins de 45 ans de
faire la prière du vendredi. Les lieux se sont transformés en véritable
caserne et il a fallu des policiers par milliers pour réprimer
les manifestants. Les membres du mouvement islamique du cheikh
Raed Salah avaient défié donc les interdits israéliens. Un
tribunal israélien lui avait interdit, ainsi qu’à une dizaine
de ses partisans, l’accès à la mosquée pendant dix jours,
limitant sa présence à 150 mètres des murs du Vieux Jérusalem.
Et c’est à partir de ce point qu’il a conduit les
protestations. Lui-même avait révélé, documents et cartes à
l’appui, le plan israélien pour détruire une partie de la
mosquée d’Al-Aqsa.
Yoval
Baruch, un des principaux archéologues israéliens, a
d’ailleurs reconnu que les travaux visent à la recherche
d’antiquités juives. Mais il a indiqué par la suite que les découvertes
qui en résulteront concerneront les trois religions et certaines
d’entre elles seront exposées à Jérusalem. Tentant d’en
prendre la défense, il a affirmé que les fouilles ont lieu «
conformément à la loi et qu’il n’y a pas la moindre
intention d’approcher la mosquée ».
D’autres
archéologues israéliens mettent en garde contre l’effet de ces
fouilles sur les fondations. La colère palestinienne reste entière
de toute façon ; le problème étant loin d’être résolu.
D’aucuns craignent la naissance d’une nouvelle Intifada, à
l’exemple de celle provoquée en 2001 par la visite incongrue
d’un Ariel Sharon, alors ministre de la Défense sur l’Esplanade
des mosquées. Ce lieu saint de l’islam reste toujours le point
de départ de toutes les crises.
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