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Une vraie politique arabe réaliste doit voir le jour »
Nabil Chaath
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Palestine-Israël
. Nabil Chaath, conseiller du
président Abbass et ancien chef de la diplomatie palestinienne,
estime que le moment est opportun pour relancer la paix.
Al-Ahram Hebdo : Pourquoi le monde
reparle-t-il subitement en ce moment de processus de paix ?
Nabil Chaath : Parce
que de nombreux changements ont eu lieu, la détérioration de la
situation en Iraq, le choix nucléaire iranien et le statu quo
dangereux en Palestine. A ceci s’ajoute la défaite du président
Bush et des Républicains aux élections du Congrès, une déconvenue
due surtout à la politique de la Maison Blanche au Proche-Orient.
Et l’autre facteur est celui de la défaite des Israéliens au
Liban, qui a eu l’effet d’un tremblement de terre en Israël,
et que peut-être nous n’apprécions pas dans ses justes
proportions. Ces événements poussent à croire que le statut
actuel des choses n’est plus possible et pourrait engendrer des
situations plus dangereuses.
— Jugez-vous alors sérieux ce
ballet diplomatique et ces déclarations autour du processus de
paix ?
— Le changement est perceptible,
mais je ne sais pas où il mènera. J’ai assisté en Finlande à
la réunion entre les pays de l’Union européenne et ceux de la
Méditerranée et j’ai entendu tout le monde évoquer le sujet.
J’ai relevé un sérieux que je n’avais pas remarqué depuis
des années. Les Européens semblent disposés à accepter un
gouvernement d’union nationale et à mettre fin au blocus économique.
Je pense qu’ils sont assez attentifs à la question mais aucun détail
n’a encore filtré concernant l’initiative espagnole.
Cependant, du côté américain, rien n’a encore bougé. S’ils
veulent avancer, qu’ils mettent fin d’abord au blocus, cette
punition collective des Palestiniens.
— Comment ce processus de paix
peut-il être relancé sans une forte implication américaine ?
— C’est vrai et c’est
pourquoi une nouvelle prise de position arabe doit voir le jour.
Il faut leur dire que leurs intérêts dans la région ne vont pas
avancer si les nôtres restent immobiles, que nos relations
restent tributaires des problèmes de l’Iraq, de la Syrie et de
la Palestine. Une vraie politique arabe réaliste, c’est cela
qui est requis aujourd’hui. Je crois qu’il est temps pour les
Arabes d’élaborer une vision globale avec une stratégie
claire.
— Pourquoi les Arabes
changeraient-ils aujourd’hui d’attitude après des années de
passivité ?
Au lendemain du 11 septembre, les
Arabes étaient timorés. Leurs comportements émanaient d’une
position de faiblesse, de crainte d’être accusés de «
terrorisme islamique ». Parallèlement, les Américains se
comportaient comme s’ils avaient vaincu le monde entier, une
position de force. Ce changement se fait remarquer si l’on
compare l’attitude des Arabes vis-à-vis de la première guerre
du Golfe et de la seconde. La première a mené à Oslo et au
premier retrait israélien et la seconde à la Feuille de route
sans véritable valeur. Les changements en cours ne sont pas
marginaux, et n’émanent pas, comme beaucoup le croient, d’une
tentative de gagner du temps. C’est plutôt un résultat d’un
constat d’échec, échec de la politique américaine et échec
de l’utilisation exagérée de la force par Israël. C’est
pourquoi il y a un intérêt à chercher une alternative. La marge
est plus importante en ce moment et il faudrait la saisir. Je ne
suis pas pessimiste, la nouvelle attitude de Khaled Mechaal est
porteuse d’espoir et la solution à travers un gouvernement
d’union nationale est toujours possible en Palestine, au Liban
et en Iraq.
Samar Al-Gamal
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