Opinion
La guerre
américaine contre l'Iran...
Une copie de la guerre israélienne
contre le Liban
Akil
Cheikh Hussein
Photo: RIA
Novosti - © AFP/ Behrouz Mehri
Mardi 24 janvier 2012
Hommes politiciens,
analystes et observateurs concentrent
leur attention sur la guerre contre
l'Iran. Est-elle imminente ou sera-telle
remise à un autre moment proche ou plus
lointain?
Les manœuvres et
les discours des derniers jours vont
apparemment dans le sens de l'apaisement
: Les menaces iraniennes concernant la
fermeture du détroit d'Ormuz sont moins
catégoriques, l'initiative turque parait
avancer pour ce qui est du retour aux
négociations sur le programme nucléaire
pacifique iranien, les manœuvres
militaires israélo-américaines sont
annulées, la Russie et la Chine
s'opposent à l'idée d'attaquer l'Iran,
la France et les Emirats arabes unis
paraissent hostiles à cette même idée…
Pourtant, certaines
rumeurs font penser que la priorité
donnée par le président américain à la
guerre soft, aux sanctions plus sévères
et aux opérations secrètes, sensée selon
lui faire fléchir les Iraniens, n'est
qu'une diversion. Il aimerait gagner du
temps afin que les phases décisives de
sa campagne électorale se déroulent en
pleine ambiance de la guerre qu'il
parait décidé à lancer contre l'Iran.
Une telle option
lui permettrait d'arracher l'un des plus
forts atouts à ses adversaires
républicains qui, comme Mitt Romney,
préfèrent lancer les Etats-Unis dans la
guerre le plus rapidement possible.
Pour ce qui est des
justifications, elles sont, pour les
camps, Républicain comme Démocrate, les
plus faciles à inventer. Des mensonges
comme ceux qui ont justifié l'invasion
de l'Irak et de l'Afghanistan, ou une
simple mise en scène comme celle que,
selon Seymour Hersh, Dick Cheney
projetait d'organiser, près du détroit
d'Ormuz, une attaque par des forces
américaines déguisées en Gardes
révolutionnaires iraniens, contre des
navires de la cinquième flotte
américaine.
Quel sera l'issue
d'une telle guerre ? Une copie de la
guerre de 2006 lancée par l'armée
israélienne contre le Liban.
C'est-à-dire, aux yeux d'un stratège
américain du nom de Patrick Closon, une
défaite iranienne. Car, pense-t-il, la
"mentalité de Hezbollah" qui lui fait
croire qu'il a gagné la guerre en dépit
de toutes les pertes qu'il a encaissées
est la même chez les Iraniens.
Mais à supposer que
la guerre de 2006 était une défaite pour
le Hezbollah, ce qui est infirmé par les
faits de la guerre et par l'évolution de
la situation après la guerre, cette
prémonition atteste de l'absurdité d'une
guerre reconnue perdante par avance dans
la mesure où elle n'aboutirait ni au
renversement du régime iranien ni même à
l'arrêt de son programme nucléaire. Six
ans après la guerre, le Hezbollah est
toujours en vie et possède toutes ses
capacités.
De plus, cette
vision stratégique semble ignorer les
conséquences d'une guerre contre l'Iran
en comparaison avec la guerre
israélienne contre le Hezbollah. Ce
dernier pouvait envoyer ses missiles
vers les profondeurs du territoire
palestinien occupé, détruire des
dizaines de Mirkava israéliennes ou
toucher des bâtiments de la flotte
israélienne les obligeant à s'éloigner
des côtes libanaises. Mais les Iraniens
peuvent aller beaucoup plus loin.
Les Américains et
leurs alliés peuvent certainement lancer
des milliers de leurs missiles de
croisière et de bombes intelligentes
contre l'immense continent iranien, mais
leur impact ne saurait être supérieur à
celui du bombardement des territoires
libanais qui sont des dizaines de fois
moins spacieux que l'Iran. Il ne saurait
non plus amoindrir les capacités
militaires de l'Iran que d'une manière
comparable à l'expérience avec le
Hezbollah qui, jusqu'au dernier moment,
a pu préserver toute sa force de frappe.
Tout cela ne prend
en compte la dimension défensive des
forces iraniennes et les véritables
possibilités que possède l'axe américain
dans les conditions de ses crises
économiques et morales issues de ses
guerres ratées en Iraq et en
Afghanistan.
Pour combien de
temps, les Américains et leurs alliés
-aux économies chancelantes-
pourront-ils supporter la fermeture du
détroit d'Ormuz passage obligatoire d'au
moins 40 % des approvisionnements
mondiaux en produits pétroliers et
gaziers ?
Pourront-ils, dans
les conditions de leur crise économique,
financer une guerre qui sera beaucoup
plus coûteuse que celle qu'ils ont
lancée contre l'Afghanistan et l'Iraq, à
un moment où, en catastrophe, ils
quittent ces deux pays ? A un moment où,
après la mort de quatre de ses soldats
en Afghanistan, le président de la
superpuissance française décide de
suspendre les activités de son armée
d'occupation dans ce pays et implore le
gouvernement de Karzai de faire tout son
possible pour assurer la défense des
soldats français ?
Une guerre contre
l'Iran, c'est le président français qui
le dit, aura des conséquences
catastrophiques pour l'ensemble de la
région et le monde entier. Il parait ne
pas ignorer que les conséquences ne se
réduiront pas seulement à la simple
fermeture du détroit d'Ormuz. L'entité
sioniste, les flottes et les bases
militaires dans la région, les Emirats
du Golfe et les gisements et raffineries
du pétrole subiront sans doute le plus
gros de ces conséquences qui pourraient
atteindre au-delà de l'Europe, les côtes
du golfe du Mexique.
N'est-il pas
plus réaliste pour l'axe américain de
renoncer à sa mentalité militariste et
arrogante et de reconnaître les droits
des peuples, y compris les siens, de
disposer de leur sort et d'aspirer comme
lui à maîtriser la technologie nucléaire
pacifique pour ne pas dire militaire ?
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