Opinion
Tunisie : G8 où
es-tu ?
Ahmed
Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Mercredi 4 janvier
2012
La Tunisie
a connu le bonheur d'être assurée d'une
aide du G8, dans le cadre du plan en
faveur des «printemps arabes». C'était
en mai dernier. Qui se rappelle de cette
euphorie qui a accompagné et suivi le
voyage du Premier ministre provisoire
tunisien au G8 ? Il avait sous le bras
un plan de développement de rien moins
que 25 milliards de dollars. Des
dizaines de milliards virtuels
pleuvraient sur les arabes
«printaniers». Béji Caïd Essebsi ne
sentait plus le sol sous ses pieds, il
flottait. Il triomphait. La maison était
sauve. Il avait de quoi calmer le peuple
insurgé. Des promesses sonnaient au
lointain et ne tarderaient pas à tomber.
Il fallait juste «ne pas faire peur à
l'argent», se calmer, rentrer à la
maison. Les Etats-Unis, l'Europe, la
Banque mondiale, le FMI et beaucoup de
bailleurs se sont mis d'accord pour
mettre la main à la poche et aider la
Tunisie, en particulier. A ce moment là,
il n'était pas question de poser la
question du comment. C'était comme si
quelque chose avait modifié les règles
d'or du capital. Pour une fois on devait
croire à un don providentiel qui
viendrait récompenser les Tunisiens
d'avoir chassé Zine El Abidine Ben Ali.
Cet acte passait pour le commencement de
l'Histoire. Un big-bang en quelque
sorte, que certains n'ont pas hésité à
vouloir transformer en «dette
économique», dont serait redevable la
«communauté internationale». Quelques
mois plus tard, les aides n'ont pas
pointé le bout du nez. Ce n'était, en
fait, qu'une fausse alerte. Les
banquiers ne donnent rien pour rien.
Encore moins à une économie exsangue, et
à un pouvoir qui aura du mal à mener à
la trique des citoyens qui ont appris à
ne plus se laisser faire. Elles
attendront aussi longtemps qu'il faudra,
elles ont le temps, qu'on leur présente
des projets juteux et pas de simples
suppliques. On ne fait pas dans le
sentiment dans ce monde bâti sur les
froids calculs financiers. Les
engagements des menteurs politiques n'y
pourront rien. Alors, le Qatar se
présente. La victoire des islamistes
aura, au moins, servi à cela. L'émir,
qui vient de «démocratiser» la Libye, va
tenter de réaliser un continuum entre
deux «révolutions», en faisant sienne la
tunisienne. Des voix s'élèvent, déjà,
contre cette incursion, jugée intéressée
et dangereuse pour la «démocratie» et la
«modernité». La nomination du
footballeur Tarak Dhiab en tant que
ministre provoque un tollé. Il est
«imposé» par l'Emirat dit-on. Il occupe
le poste de consultant dans le bouquet
sportif de la diabolique Al Jazeera. Son
incompétence politique, son faible
niveau d'instruction et son inculture
manifeste constitue un CV qui aurait dû
rejeter sa candidature. Il est quand
même désigné dans le premier
gouvernement, de l'après Ben Ali. Mais
il y a 800 000 chômeurs déclarés à caser
et des demandes sociales
incommensurables à satisfaire.
L'argument est sans appel. Le choix
entre les féodaux du Golfe «disponibles»
et les Grandes «démocraties» cupides est
vite fait. Reste à mesurer, dans les
mois qui viennent, l'efficacité de ce
partenariat.
Article publié sur
Les Débats
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