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Opinion
Arrêtez d'insulter
le peuple !
Ahmed Amri
Samedi 12 mars 2011
Monsieur le Premier ministre,
Permettez-moi de vous rappeler que
c'est le peuple qui vous a permis d'accéder à la primature. Et
ce peuple est encore capable de vous en congédier s'il vous juge
indigne de la charge.
Vous êtes au poste de premier
ministre pour une période de transition, un épisode éphémère. Et
les conditions dans lesquelles vous avez été investi de cette
fonction sont censées vous éclairer assez sur les
tares
reprochées à votre prédécesseur
pour n'en être pas vous-même prévenu.
Il semble que ni vous ni votre
ministre de l'intérieur n'avez assimilé les règles du jeu
politique propre à la révolution. Quand le peuple vous somme
d'en finir avec le système Ben Ali, qu'il crie:" RCD, dégage!",
qu'il descend dans la rue et monte par deux fois à la Kasbah
pour en chasser les imposteurs, vous êtes censé avoir reçu cinq
sur cinq le message en vertu duquel vous êtes l'actuel premier
ministre.
Or pour oser reconduire dans leurs
fonctions des administrateurs de la dictature déchue, comme ce
fut le cas récemment avec 117 délégués issus du RCD dissous, que
la décision vous revienne directement ou soit du seul ressort de
votre ministre de l'intérieur, vous donnez l'impression que vous
n'avez tiré aucune leçon des deux sit-in de la Kasbah. Au peuple
qui crie:" RCD, dégage!" vous rétorquez de manière pour le moins
insultante: "Engageons des RCD!"
Le peuple qui a bouté hors du
bureau que vous occupez votre prédécesseur l'a fait parce que ce
dernier et une bonne partie de son équipe devaient
impérativement
suivre leur maître.
Incarnant de facto les tentacules de la pieuvre benalyenne, la
tête de cette pieuvre étant tranchée il serait absurde de
soutenir que ces
appendices sont sains,
qu'ils peuvent s'adapter à la révolution ou que celle-ci puisse
les résorber ou s'en accommoder dans cette phase transitoire.
Nonobstant vos déclarations et vos
promesses, vous donnez l'impression que vous êtes incapable de
rompre réellement avec l'époque révolue. Vous donnez aussi
l'impression que vous êtes incapable de comprendre le sens réel
de la révolution. Et ce déphasage par rapport au sens de
l'histoire et à la volonté du peuple risque de vous emporter
vous aussi dans le sillage de ceux qui ont grossièrement insulté
le peuple.
Si vous êtes là pour tenter de
nous jouer un autre tour de passe-passe, dites-vous que le
peuple en a assez qu'on le méprise et qu'on se méprenne encore
sur son compte. Dites-vous que ce peuple est prêt à remonter à
la Kasbah pour faire valoir ses droits si besoin. Sinon,
épargnez au pays et à vous-même cette agaçante tartuferie dont
les Tunisiens ne veulent plus.
Le peuple qui a réalisé une
révolution exemplaire jusqu'ici, qui a libéré d'autres peuples
frères de la léthargie séculaire et incarne depuis le 14 janvier
2010 le porte-flambeau de l'émancipation, le peuple dont
l'épopée héroïque est devenue référence dans le monde entier, le
peuple qui a donné à la Tunisie ce rayonnement sans précédent ne
peut plus vous autoriser ni vous ni vos successeurs à
l'insulter!
S'il faut le souligner davantage, dites-vous que ce peuple qui a
botté son cul à Ben Ali ne peut plus respirer de près ni de loin
la charogne infecte léguée par la dictature. En d'autres termes,
RCD et consort dehors! Les hommes de main et les laquais de Ben
Ali n'ont plus aucune légitimité pour administrer les affaires
du peuple.
Alors, au nom du peuple, faites le
ménage comme il se doit dans les appareils administratifs
publics ou partez! faites dégager le plus loin possible les
restes de la carcasse en putréfaction de
la piovra benalyenne!
Au nom du peuple, donnez un coup
de balai à ce tas d'excreta qui étouffe le jasmin de notre
Tunisie et profane la révolution!
Au nom du peuple, mettez-vous à la
page de la révolution ou dégagez!
Article publié sur le blog d'Ahmed Amri
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