Mercredi 13 janvier 2010
Les spécialistes en droit international seront certes épris par
la comparaison intelligente qu’ils effectueront entre la
barrière que l’Egypte est en train d’ériger à la frontière avec
Gaza et le mur d’Israël. Si le mur d’Israël était construit pour
son propre profit, la barrière de l’Egypte est censée également
être destinée à servir ses intérêts. Si celui d’Israël était
condamné par la Cour de justice internationale parce qu’il
représente une violation aux engagements pris par le pays
colonisateur sur les territoires palestiniens occupés, celui de
l’Egypte l’incrimine lui aussi juridiquement et c’est ce que
nous débattrons dans cet article.
Les Américains et les Israéliens au moins ont affirmé que
l’Egypte, avec l’assistance de la partie américaine, érige une
barrière souterraine le long de la frontière avec Gaza,
s’étendant sur plusieurs kilomètres et de 18 mètres de
profondeur.
Les causes de l’édification d’une telle barrière, telles
qu’évoquées par les Egyptiens, étaient de stopper la contrebande
à travers les tunnels creusés entre l’Egypte et Gaza. Quant au
droit de l’Egypte d’ériger une telle barrière à l’intérieur de
ses territoires relève d’une décision souveraine relative à la
sécurité nationale, comme l’a signalé le ministre des Affaires
étrangères.
Chaque pays détient le droit d’agir comme il veut à l’intérieur
de ses frontières pour plus de sécurité avec ses voisins. Mais
la base affirmée en droit international dit que le droit du pays
en question doit tenir compte de ne pas porter préjudice au pays
ou à la région voisine. Dans cette analyse, je mettrai de côté
tous les propos qui sont adressés à l’Egypte sur la solidarité
arabe. Je ne dirai pas non plus que la Palestine est une partie
inhérente de l’Egypte ou bien que les Palestiniens sont des
musulmans qu’il faut sauver. Car tous ces propos n’ont plus de
sens aujourd’hui et sont loin de la réalité, voire ils
provoquent le lecteur. Ceci afin de focaliser sur le droit de
l’Egypte qu’elle a affirmé dans son discours à propos de la
barrière.
Lorsque la question se rapporte à Gaza, qui est entourée au nord
par la Méditerranée et Israël qui longe ses frontières à l’est
et au sud et qui véhicule un projet sioniste ayant pour objectif
l’extermination du peuple palestinien et guettant en permanence
Gaza qu’il proclame comme un ennemi sur lequel doit s’appliquer
tout ce qui a été interdit par le droit international, le côté
ouest de Gaza, qui est l’Egypte, est l’unique lueur d’espoir
psychologiquement parlant. Non seulement pour sauver Gaza du
monstre sioniste, mais également pour lui procurer toutes les
nécessités de survie. Dans des conditions normales, il s’agit
d’une question d’ordre purement économique si les intentions
sont bonnes et un moyen de gain pour la partie égyptienne.
Mais pour maintes raisons, qu’il n’est pas nécessaire d’évoquer
dans ce contexte, l’Egypte a estimé que la construction d’une
barrière entre elle et ces « ennemis » qui l’embarrassent avec
Israël est indispensable. L’Egypte, quant à elle, estime que le
sentiment égyptien uniquement sans aucune autre influence est à
l’origine de cette décision.
Mais d’un autre côté, le droit international considère Gaza
comme une terre occupée et son blocus un crime contre l’humanité
et une extermination contre ses habitants, outre le fait que le
cas Gaza est classé crime de guerre en vertu de la 4e convention
de Genève. Partant, le droit international oblige les pays qui
sont des parties dans les accords et qui incriminent cet acte
œuvrent à casser le blocus, à sauver le peuple et à garantir les
moindres nécessités humaines de survie. Pour ce qui est de
l’Egypte en sa qualité d’unique accès de l’autre côté de Gaza,
le droit international lui dicte des engagements plus
intransigeants, comme l’ouverture du point de passage de Rafah
et les autres points de passage afin de la sauver des plans
d’extermination israéliens. Pour ce qui est du resserrement de
l’étau, à travers la fermeture des points de passage et le refus
de faire passer les munitions nécessaires, il a été
indispensable de percer des tunnels qui s’avèrent être une bouée
de sauvetage de ce plan. Et donc, il serait question de boucher
ces couloirs afin d’empêcher l’air d’arriver à Gaza à travers
l’édification d’une barrière en acier dans laquelle ont excellé
Israël et les Etats-Unis afin de transférer les frontières
d’Israël avec celles de Gaza à l’est pour être remplacées par
les frontières de l’Egypte avec Gaza à l’ouest, par des mains
égyptiennes et une sécurité égyptienne. Cet acte, loin des
qualificatifs qu’on donne à l’Egypte officielle et qui n’ont
plus aucun sens à ce stade dangereux, fait que la construction
d’une telle barrière est un crime odieux. L’objectif déclaré est
d’étouffer les Gazaouis en les incriminant pour un crime qu’il
n’ont pas commis, tout en les terrorisant jusqu’à la mort, pour
leur attachement à un régime qu’ils ont aimé ou haï, choisi ou
bien qui s’est imposé à eux. Mais en dépit et contre tout,
personne n’est en droit d’interférer dans leur choix
politiquement parlant. Dans un tel contexte, l’objectif
politique est sans valeur, parce que le droit incrimine
l’intention criminelle qui est l’extermination des habitants
quels qu’en soient les motifs. La barrière, en tant que telle,
signifie que l’Egypte a renoncé à ses engagements juridiques
internationaux au profit des habitants de Gaza qui vivent sous
le blocus et a coopéré avec Israël pour faire aboutir le crime.
D’ailleurs, Richard Folk, coordinateur de l’Onu pour les droits
de l’homme dans les Territoires occupés, a signalé dans son
rapport que l’holocauste de Gaza est un crime privant ses
habitants du droit de fuir l’enfer, à un moment où nous, leurs
voisins, agissons pour que cet enfer soit inévitable.
Voilà une vision purement juridique où n’interfèrent pas les
aspects humains, nationaux, religieux ou ceux relatifs à la
sécurité nationale correcte. Il suffit de dire qu’un service est
rendu au projet sioniste et que le prix sera payé par les
générations futures égyptiennes !
Abdallah Al-Achaal, Politologue.
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AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 13 janvier 2010 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo