Christian Page est
sans-abri et il tweete avec un franc
parler qui lui vaut 25 000 followers,
l'attention des médias et des élus. RT
France est allé à la rencontre de
l'homme qui dénonce les mensonges des
politiques sur les SDF.
Christian Page,
barbe en bataille et œil rieur sous son
bandana, est le sans-abri le plus
médiatique de France. Les magazines et
la radio se l’arrachent depuis qu’il a
été repéré sur
Twitter. Il partage son quotidien
dans la rue avec humour et franc parler
avec ses quelque 25 000 followers. Sa
marotte ? Interpeller les politiques
lorsqu’ils «dérapent» sur la question
des SDF. «Tu as des gens qui sont
complètement déconnectés de la
réalité !», souffle-t-il à la caméra de
RT France, venue le rencontrer dans le
Xe arrondissement de Paris, près de la
mission évangélique où il vient se
doucher et prendre ses repas.
Le Point,
TF1, Le Monde… On parle de
Christian Page dans nombre de médias.
Mais cette aura médiatique ne doit pas
faire oublier une réalité sombre : cet
ancien sommelier de 45 ans vit dans la
rue depuis 2015, à la suite d’un divorce
l’ayant fait basculer dans une grave
dépression. Incapable de travailler, il
contracte des dettes et se fait expulser
de son logement. Depuis, obligé
d'affronter le froid et la violence du
dehors, il explique : «La vie est
chaotique. Je ne sais jamais ce que je
vais faire dans l’heure.»
Impossible de
trouver une place d'hébergement pérenne
en trois ans
Il dort dans le
métro, au pied des immeubles, dans des
abris de fortune. Son imposant sac à dos
est «tout ce qu’il a» dans la vie.
Parfois, un ami, une personne touchée
par sa situation, le dépanne d’une nuit
sur son canapé. Mais Christian Page n’a
pas pu obtenir de place d’hébergement
pérenne depuis trois ans. Emmanuel
Macron
avait promis qu’il n’y aurait plus
personne à la rue au 31 décembre 2017 ?
«Puisque vous me voyez là avec mon sac à
dos, c’est que c’est faux !»,
persifle-t-il. Le 13 février, le
président français a finalement avoué :
«Nous n’avons pas réussi.» Une
déclaration qui sonne comme
un premier échec patent, alors que
selon la Fondations Abbé Pierre, il y
aurait 143 000 SDF en France.
Salut à tous 🙋
"Les promesses sont faites pour ceux qui y croient" 😠 Voilà, j'ai résumé le discours d' @EmmanuelMacron ...
L’adversité n’a pas
entamé le sens de l’humour et la
gouaille de Christian Page. S’il loue le
travail des associations, des bénévoles
et des travailleurs sociaux, il blâme ce
qu’il qualifie d’«indifférence de
l’Etat» vis-à-vis de l’hébergement
d'urgence. Et il ne manque pas
d'assaisonner sur Twitter, son réseau
social favori, les politiques
s'exprimant sur la question des SDF.
« Il était à coté de
ses pompes Denormandie ! »
Julien Denormandie, secrétaire
d'Etat auprès du ministre de la Cohésion
des territoires, estime le nombre des
SDF d'Ile-de-France contraints de dormir
à la rue à 50 ? «Moi je connais déjà 300
SDF… alors dire qu’il n’y en a que 50
[...], c’est vraiment culotté ! Ou alors
il était à coté de ses pompes
Denormandie !», s'indigne Christian
Page, pour RT France. Le député La
République en Marche (LREM) Sylvain
Maillard explique sur les ondes de
RFI que certains SDF ne souhaitaient pas
être mis à l'abri ? «Tu vis dans la rue
"par choix", toi ?», lance le sans-abri,
sarcastique, à l’un de ses compagnons
d’infortune. «Ah non, pas du tout», lui
répond un quinquagénaire au regard las,
enveloppé dans une couverture en polaire
à cause des températures négatives.
Dénoncer
l'insalubrité d'un grand nombre de
centres d'hébergement d'urgence
Evoquant
l’hébergement d’urgence, Christian Page
explique ne plus s’y rendre depuis 2016.
Il fait défiler l’air désabusé des
photos de pièce insalubres ou souillées
de moisissures et d’ordures d’un centre
du XVIIIe arrondissement.
« Il y a 400
personnes qui dorment sur des lits
superposés et chacun
pense à voler le
sac de l’autre... Ce sont des conditions
de vie indignes »
«Sur
l’hébergement d’urgence, généralement on
dort dans des "chenils". Tu ne vas pas
volontairement là dedans. Il y a 400
personnes qui dorment sur des lits
superposés et chacun pense à voler le
sac de l’autre... Ce sont des conditions
de vie indignes», déplore-t-il.
Christian Page, qui
s’était fendu d’un
tweet à l'égard de Sylvain Maillard pour
ses propos sur l'hébergement d'urgence,
l’a même traité de «connard» sur
l’antenne
d’Europe 1. L’émission Les
grandes gueules de RMC leur aura
donné l’occasion de se rencontrer ; le
sans-abri lui lance alors : «Il manque
une volonté politique comme financer des
places de logements ou réquisitionner
des logements vides ! Rien ne se fait !»
#GrandOral "Il manque une volonté politique comme financer des places de logements, ou réquisitionner des logements vides ! Rien ne se fait !" @Pagechris75#GGRMC
La force de frappe
médiatique de ce sans-abri communicant
lui permet aussi de dénoncer au
quotidien l’«acharnement anti-SDF» en
ville. Au bas des résidences, des
entrées de parking, se multiplient de
faux-parkings à vélo ou des bac à fleurs
pour empêcher les sans-abri de
s’installer. Christian Page ne peut rien
faire contre ces dispositifs qui
relèvent du domaine privé. Mais l’homme
est têtu. Le jour de Noël, il dénonce un
dispositif de ce type sur un trottoir
dans le XIXe. «Je balance ça sur Twitter,
en deux ou trois heures, c’est monté
tout de suite à 150 000-200 000 vues.
J'ai regardé ça, je me suis dit :
"hallucinant"! Là, ils ont réagi,
effectivement, parce qu’il faut bien se
faire réélire à un moment ou à un
autre !», explique le sans-abri à RT
France. La mairie de Paris a en effet
désinstallé le dispositif dès le
lendemain.
Salut à tous 🙋
Rue de Meaux 75019 Grilles d'air chaud ou parfois se posaient les #SDF. Sauf que maintenant voilà 😠😠😠#soyonshumains@Abbe_Pierre
Sinon venez cet aprèm' à 15h M° Varennes avec le DAL... Histoire de se faire entendre 💪 @federationdal
Grâce au compte
Twitter de Christian Page, des citoyens
sensibilisés aux difficultés des
sans-abris ont inspiré des maraudes en
province, selon ses dires. Le SDF
champion des réseaux sociaux blâme
l’Etat, mais serait, lui, parvenu à
créer de véritables chaînes de
solidarité.
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