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Gaza
Gaza l'inoubliable
Cédric et Alex
© Photo PCHR
Paris, jeudi 30 avril 2009
Touchés par la situation humanitaire à Gaza, et pour éviter que
l’attaque israélienne ne tombe dans l’oubli, nous décidons,
début avril de nous rendre sur place. Tous les deux étudiants,
nous profitons des vacances scolaires de Pâques pour réserver
notre billet à destination du Caire.
Arrivés sur place, nous sollicitons les autorités françaises
(ambassades et consulats) pour la délivrance d’une autorisation
de passage par la frontière de Rafah.
Après une forte insistance, elles cèdent et nous délivrent le
précieux document.
Aussitôt récupéré, nous prenons un taxi collectif jusqu’à Rafah
pour accéder à la Bande de Gaza tant désirée. Nous savions que
la tache ne serait pas facile et que beaucoup de gens avaient
essayé avant nous avec peu de succès.
Le premier jour, nous nous présentons en exposant la situation à
la police des frontières égyptiennes en insistant sur la
nécessité d’aller sur place évaluer les besoins humanitaires.
Sourds à notre discours, ils nous conseillent de regagner Le
Caire puis la France et d’oublier l’Egypte ainsi que Gaza. Nous
leur répondons qu’il nous est simple et possible d’oublier
l’Egypte, mais impossible de ne pas penser au peuple meurtri de
Gaza.
Nous avons passé plusieurs jours à faire des allers -retours, se
confrontant à chaque fois au « mur » égyptien qui est parfois
pire que la frontière « dite de sécurité » israélienne.
Après une semaine de va et vient, nous sollicitons les autorités
françaises en leur demandant d’intervenir auprès des Egyptiens
afin de favoriser notre passage.
Le huitième jour, le miracle se produit et Gaza nous est enfin
ouvert.
Sans perdre une minute et sans bagages, nous courrons jusqu’à
perdre haleine, sans nous retourner, de peur d’être rappelé.
Nous atterrissons au milieu d’un terrain vague qui semble désert
et dont la seule issue était le stade de foot Cheikh Yassine. Ce
stade fait face à la rue du Sultan qui remonte jusqu’à Gaza
centre en traversant la Bande de Gaza. De l’autre côté de cette
rue, nous voyons la population et nous nous dirigeons vers elle.
Nous nous sommes présentés comme des étudiants français venus
exprimer notre solidarité. Ils proposèrent de nous guider et de
nous faire visiter ce qui reste des villes et villages, des
hôpitaux, des écoles, des camps, des administrations, des
routes, des infrastructures après les bombardements.
Tout au long de notre visite et malgré la misère et la pauvreté
des lieux, les Palestiniens ont fait preuve d’une hospitalité
exceptionnelle.
Nous avons découvert un champ de ruine comme après un
tremblement de terre. Nous avons découvert une population
choquée par les bombardements, les massacres, les armes de
destruction massive utilisées (bombe à phosphore, à uranium
appauvri). Nous avons remarqué que la situation était plus
catastrophique dans certains endroits (Khan Younes, Djaballiah,
Gaza-ville, Beth Hanoun…)dans lesquels les conditions
d’hygiène sont déplorables par manque d’eau potable,
d’électricité, qui n’est délivrée que quelques heures certains
jours et où la plupart des maisons ont été transformées en un
amas de ruine.
De plus, nous avons noté l’apparition croissante de certaines
maladies telles que le cancer et le diabète, en raison des
retombées chimiques et nocives des bombardements et la pollution
due à l’entassement des ordures. Ces maladies ne peuvent être
traitées par manque de soins, de médicaments et
d’infrastructures médicales.
Nous avons visité certains hôpitaux encore existants (l’hôpital
Al Shifa, l’hôpital El Chahid Youssef Abou Nazzar) dans lesquels
se trouvaient encore de nombreux blessés livrés à eux mêmes par
manque de personnel et de matériel médical.
Nous avons également visité une association d’aide aux victimes
à Khan Younes, dont le but principal est de fournir prothèses et
fauteuils roulants aux nécessiteux qui s’est retouvée démunie et
débordée ne pouvant répondre à l’importance des demandes.
Nous avons conclu notre séjour par la visite des familles des
victimes des bombardements israéliens. Beaucoup d’entre elles se
sont retrouvées sans toit et ont dû compter sur l’hospitalité de
leurs proches pour s’abriter. Il est toute fois nécessaire de
signaler qu’une maison à Gaza, se limite à quatre murs et une
tôle de zinc. Elles nous ont fait part des conditions de vie
devenues encore plus difficiles après l’attaque israélienne.
Par manque d’entrées et de flux des marchandises, le coût de la
vie a subi une inflation sans égale : le prix des produits de
première nécessité (pain, lait, eau…) a doublé alors que plus de
80% de la population n’a pas d’emploi et est par conséquence
sans ressource.
Autant notre désir et note enthousiasme de découvrir Gaza
étaient immenses, autant le désespoir et la désolation sur place
étaient terrassants. Les chefs de nos Etats ont assisté à ce
massacre qui a abouti au désarroi et à la misère d’une
population oubliée de tous, face à l’indifférence de la
communauté internationale, livrée à elle même, et sous
dépendance totale de ses géôliers égyptiens et israéliens.
Gaza ne doit sa survie aujourd’hui qu’à une résistance
volontaire et courageuse qui a su s’habituer et s’organiser
autour du blocus imposé depuis 2007 par Israël.
Il est primordial que Gaza soit une priorité urgente dans
l’esprit de chacune bien que les bombardement israéliens aient
cessés, puisque la vie là-bas n’a toujours pas repris et que le
blocus reste total. Nous appelons chaque personne sensible à la
détresse humaine à multiplier les actions pour la libération de
Gaza.
Interview réalisée par Ginette Hess Skandrani
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