Interview du Centre Palestinien
d'Information
Abou
Marzouq fait un tour d'horizon de la scène palestinienne et de la
conférence d'automne
Dr. Moussa Abou Marzouq - Photo CPI
2 novembre 2007
L’envoyé de notre
Centre Palestinien d’Information a récemment rencontré, dans
la capitale syrienne Damas, le Dr. Moussa Abou Marzouq, vice-président
du bureau politique du Hamas.
Dr. Abou Marzouq a
donné son point de vue sur la scène palestinienne dans une
longue interview. Le CPI a le plaisir d’en traduire quelques
extraits et résumés.
Trois
sujets
CPI :
La scène palestinienne est-elle dans une crise ?
Abou
Marzouq : Trois éléments contribuent à mettre
cette scène en crise. Le siège immoral mené aussi bien par les
autorités israéliennes que par l’autorité palestinienne de
Ramallah pousse la bande de Gaza vers plus de complications, vers
une catastrophe humanitaire sans précédent. Le niveau de pauvreté
y monte à 79%. Des dizaines de milliers d’enfants palestiniens
arrivent aux écoles de l’UNRWA, affamés, confirme l’agence.
Cette pauvreté aggravée
ajoutée à la carence de médicaments et tous les effets du siège
déchireront la société et feront camper les Palestiniens contre
l’autorité de Ramallah dirigée par Abou Mazen... Bizarrement,
cette autorité sanctionne le peuple de Gaza au moment où elle
entame des négociations avec l’occupant qui ne cesse de
commettre toutes sortes de crimes contre notre peuple.
L’engouement et la
flexibilité d’Abbas et de son équipe envers des rencontres
avec les dirigeants de l’Entité sioniste sont la deuxième
cause de cette crise. Dans les conditions actuelles, la paix
consistera en une concession selon les exigences de l’occupation
israélienne.
La faiblesse du système
arabe officiel en constitue le troisième. La politique américaine,
inspirée de la vision sioniste, se trouve libre. Et la vision
israélienne consiste à venger ses défaites du Liban et de la
bande de Gaza en pratiquant plus d’agression et de colonisation.
Enracinement
du Hamas
CPI :
Il y a un travail ardu pour déloger le Hamas de la Cisjordanie ?
Abou
Marzouq : Le Hamas est un mouvement qui a pris
racine dans toutes les tranches de la société palestinienne.
L’acharnement pratiqué contre lui ne fait que le renforcer.
Toutes les arrestations et agressions qui avaient été pratiquées
contre ses cadres et sympathisants au début des années 90
n’ont fait que renforcer sa popularité.
Toutes ces agressions
commises contre les cadres et les institutions du Hamas font
partie de l’application de la « feuille de route »
qui exige de l’autorité palestinienne de démanteler la résistance
palestinienne au profit de l’occupation israélienne. Vu que le
mouvement du Hamas est la faction la plus importante et qu’il
s’attache aux droits fondamentaux du peuple palestinien, la
politique américano-sioniste besogne à le mettre hors d’état
de nuire, en assiégeant la bande de Gaza et en le poursuivant en
Cisjordanie.
Un
mouvement de résistance
CPI :
Le Hamas ne réplique aux agressions qu’il subit en Cisjordanie
que verbalement !
Abou
Marzouq : Toutes les élections ont approuvé l’ancrage
du Hamas en Cisjordanie. Mais le Hamas est très concerné à ne
pas s’engager dans un combat interne, un tel combat fait partie
du plan américano-sioniste. Nous nous voulons résistants et nous
le resteront.
A
Gaza
CPI :
Mais à Gaza, le Hamas s’est bien engagé dans un combat
interne avant qu’il ne prenne l’affaire de la Bande en main ?
Abou
Marzouq : Il ne faut pas lire uniquement la dernière
page d’un livre. Dès le premier moment de la constitution du
cabinet palestinien par Ismaël Haniyeh, le mouvement et ses
sympathisants sont devenus l’objet de toutes sortes de
conspiration. Et nous n’avons pas d’autres choix que de les
mettre en échec, surtout après l’arrivée d’une grande
quantité d’armes aux conspirateurs et après l’augmentation
en nombre d’assassinats et d’agressions contre le peuple de la
bande de Gaza. A savoir que toutes ces agitations étaient une
sorte d’application du plan de l’Américain Dayton.
En
Cisjordanie
CPI :
Y aura-t-il un soulèvement en Cisjordanie comme celui de Gaza ?
Abou
Marzouq : Nous appelons toujours à un dialogue
national total pour mettre fin a tous les problèmes intérieurs
de la scène palestinienne, tout en contenant nos colères et nos
blessures.
Toutefois, nous sommes sûrs
que notre peuple de la Cisjordanie, dont des membres honorables du
mouvement du Fatah, se soulèvera dans le cas où les agressions
continueront contre lui et contre ses institutions, des agressions
en collaboration avec les forces de l’occupation israélienne.
Fidèles
à notre peuple
CPI :
Le siège contre Gaza ne vous pousse-t-il pas à des concessions ?
Abou
Marzouq : Ce qui se passe à Gaza nous pousse toujours à
appeler à un dialogue. Ce sont les autres qui le refusent et qui
portent la totale responsabilité de la souffrance de notre peuple
de la Bande. Nous sommes prêts à tout faire pour l’unité de
notre peuple, de notre terre, de notre direction.
La
popularité
CPI :
La popularité du Hamas a-t-elle baissé ?
Abou
Marzouq : En tout cas, c’est le souhait de
l’adversaire de notre peuple. Cependant, le Hamas reste le
reflet de ses rêves et de ses aspirations. C’est de lui qu’il
prend sa force et sa légitimité. Et tant que le Hamas reste fidèle
à ses principes, sa popularité ne cesse de croître. Par
ailleurs, notre peuple est assez mûr pour distinguer le bien du
mal. Et toutes les agressions, le siège, le terrorisme, entre
autres, ne font que pousser notre peuple palestinien à
s’attacher au choix de la résistance. Et ce qui se passe a Gaza
n’est qu’une sanction collective contre notre peuple qui avait
choisi le Hamas et qui s’attache à ses droits. Comment
voulez-vous alors que la popularité du Hamas baisse ?
La
conférence d’automne
CPI :
La conférence d’automne serait un festival de relations
publiques, dit-on ?
Abou
Marzouq : En quelques mots, cette conférence-là n’a
pas pour but de mettre la question palestinienne sur les rails
d’une quelconque solution. Ce n’est qu’une tentative pour
faire sortir l’administration américaine de son bourbier dans
lequel elle est bien piégée, tout en sachant que le cabinet ne
pourra prendre aucune initiation, même à un niveau minimum,
faute de popularité.
Même en admettant que
ladite conférence arrive à quelque chose, elle sera balayée par
les nouvelles élections américaines. Les négociateurs
palestiniens devront tout reprendre depuis le début. Un temps
perdu pour eux, mais bien profitable pour les Israéliens afin
qu’ils continuent partout la colonisation et la judaïsation de
la terre palestinienne, la construction du mur discriminatoire de
séparation…
Un
Etat juif
CPI :
On dirait que les négociateurs palestiniens ont fait beaucoup de
concessions ?
Abou
Marzouq : Si on reconnaît que l’Entité sioniste est
un pays pour les Juifs, ce pays sera responsable de tous les Juifs
du monde entier, ce qui est une chose qui vient à l’encontre de
tous les accords et conventions internationaux. Cette
reconnaissance retira des Palestiniens leur droit de résistance
pour revenir à leur terre.
La
conférence de Damas
CPI :
Et la conférence de Damas ?
Abou
Marzouq : Cette conférence sera organisée, le 7 du mois
de novembre en cours, dans des conditions très difficiles.
Division interne de la scène palestinienne. Siège renforcé
contre notre peuple. Agissements américano-sionistes. Faiblesse
du système arabe officiel… Cette conférence sera alors une
sorte de message envoyé à l’administration américaine, à
l’occupation israélienne et aux négociateurs palestiniens, les
informant de l’attachement du peuple palestinien à son unité
et aux principes nationaux.
A noter que toutes les
couleurs palestiniennes, factions, organisations, syndicats,
personnalités palestiniennes et arabes, y seront présentes.
Chalitt
CPI :
Et l’échange de captifs ?
Abou
Marzouq : Quant au dossier du soldat israélien enlevé
par la résistance palestinienne, nous avons préparé une liste
de nos captifs dont des enfants à libérer par le gouvernement
israélien qui ne montre aucune coopération pour un échange de
prisonniers. Mais je suis certain qu’il le fera en fin de compte.
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