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Centre Palestinien d'Information

Hamas : son histoire de l'intérieur (27)


Photo CPI

Dimanche 19 avril 2009

Dr. Azzam Tamimi

L’ouvrage Hamas : Son histoire de l’intérieur de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète, diffusée régulièrement en de nombreuses parties.

En Jordanie (7)

            Le 3 avril 1997, Israël retira sa demande d’extradition. Il ne resta aucune autre option aux autorités américaines que de libérer Abu Marzouq et de l’expulser. Il y avait un petit problème : où devait-il aller ? Dans une intention désespérer de se sauver la face, les Américains envo-rent le directeur du FBI Louis Freeh pour demander une permission pour qu’Abu Marzouq se rende soit en Egypte, soit en Jordanie, les deux seuls pays arabes qui avaient des traités de paix avec Israël. La mission de Freeh était de demander au pays qui accepterait Abu Marzouq d’accepter une série de conditions que les Américains voulaient stipuler pour sa libération. Il devait être interdit de visiter la Libye, la Syrie, l’Irak, le Soudan et l’Iran, et il devait rester dans son nouveau pays de résidence pendant au moins six mois à partir de sa date d’arrivée. On attendrait aussi de lui qu’il fasse une déclaration condamnant le terrorisme ; et enfin, on attendait de lui qu’il s’abstienne de toute activité politique. L’Egypte et la Jordanie rejetèrent toutes deux la proposition, disant qu’elles ne pensaient pas qu’Abu Marzouq accepte une de ces conditions et qu’elles n’avaient pas de pouvoir pour le forcer à agir ainsi. En effet, Abu Marzouq refusa toutes les quatre conditions, mais fut néanmoins libéré en fin de compte, inconditionnellement. La pression continue sur la Jordanie, toutefois, apporta ses fruits, et le roi Hussein de Jordanie accepta de le reprendre. Le 5 mai 1997, Abu Marzouq fut envoyé à Amman via un jet privé et remis aux autorités jordaniennes.

            La Jordanie avait expulsé Abu Marzouq en mai 1995 en conséquence d’une pression des Etats-Unis et d’Israël, et avait passé des informations des renseignements concernant ses activités durant son séjour dans le pays aux Américains avant sa détention à New York. Maintenant, ironie du sort, c’était la Jordanie qui succombait à la pression américaine pour qu’elle le reprenne. Le nouveau directeur du département des renseignements généraux, Samih Al-Battikhi, l’ancien adjoint d’Al-Qaysi, qui avait été nominé le 5 février 1996, ne pouvait cacher sa colère devant le retour d’Abu Marzouq. La première fois qu’il rencontra Abu Marzouq, il l’informa clairement qu’il avait un mois pour trouver un autre pays où vivre. Cependant, lorsqu’Abu Marzouq rendit visite au roi Hussein pour le remercier de sa proposition d’hospitalité, en la compagnie du député des Ikhwan jordaniens Bassam Al-‘Umush, ce dernier avertit le roi que Samih Al-Battikhi avait donné à Abu Marzouq un préavis d’un mois pour quitter le pays. Le roi, selon la tradition d’un chef de tribu arabe, dit à Abu Marzouq qu’il était dans son propre pays et qu’il n’avait pas à rechercher une autre demeure. La même hospitalité fut présentée à l’épouse et aux enfants d’Abu Marzouq, qui le rejoignirent peu de temps après.

            La libération d’Abu Marzouq et son arrivée à Amman en tant qu’invité du roi soulagèrent d’une certaine façon l’atmosphère de discorde qui prévalut en conséquence de la relation qui s’était vite détériorée entre le Hamas et le régime jordanien. L’année d’avant notamment n’avait pas été une année plaisante pour le Hamas. Les affaires s’étaient poursuivies dans une mauvaise direction lorsqu’Al-Battikhi fut nommé directeur du département des renseignements généraux. Al-Battikhi avait remplacé son ancien supérieur, Al-Qaysi, à la demande d’Abd Al-Karim Al-Kabariti, désigné premier ministre par le roi au début du mois de février. Les critiques d’Al-Battikhi l’accusèrent d’avoir une rancune personnelle contre les islamistes en général et le Hamas en particulier. Il alla plus loin que tout autre directeur du département des renseignements généraux qui l’avait précédé dans l’étendue de son action contre le mouvement islamique. Sa nomination doit tout de même être mis en perspective ; Al-Battikhi avait pris la charge du département des renseignements généraux à la suite de l’assassinat par Israël du commandant militaire du Hamas Yahya Ayyash et à la suite de la campagne de bombardements contre Israël. Le président Clinton avait immédiatement convoqué les hauts leaders de quelque trente pays de la région et au-delà, dont treize pays arabe, pour une conférence au sommet d’urgence à Sharm Al-Sheikh en Egypte, pour coordonner les efforts internationaux pour sauvegarder le processus de paix d’un effondrement total.

            “Le sommet des pacificateurs”, le 13 mars 1996, devait avoir trois objectifs fondamentaux. Ceux-ci étaient de remettre en valeur le processus de paix, d’améliorer la sécurité et de combattre la terreur. Dans un communiqué commun final de la part des participants au sommet, le président Clinton annonça qu’ils :

            « … exprimaient leur soutien total au processus de paix au Moyen-Orient et leur détermination à ce que ce processus continue afin d’accomplir une paix juste, durable et globale dans la région ; affirmaient leur détermination à améliorer la sécurité et la stabilité et à empêcher les ennemis de la paix d’accomplir leur objectif ultime visant à détruire la réelle opportunité de paix au Moyen-Orient ; soulignaient de nouveau leur forte condamnation de tous les actes de terreur dans toutes ses formes répugnantes – quelle que soit sa motivation et quelle que soit son origine, dont les récents attaques en Israël – les considérant comme étrangers aux valeurs morales et spirituelles partagées par toutes les peuples de la région, et réaffirmaient leur intention de se tenir avec loyauté contre tous les actes de ce genre et d’appeler tous les gouvernements à se joindre à eux dans leur condamnation et leur opposition ».

            Il poursuivit :

            « A cette fin, nous avons décidé de : - Soutenir les accords israélo-palestiniens, la continuation du processus de négociations, et de le renforcer politiquement et économiquement ; - Améliorer la situation sécuritaire pour les deux avec une attention particulière aux besoins économiques actuels urgents des Palestiniens ; - Soutenir la continuation du processus de négociation afin de parvenir à un accord global ; - Travailler ensemble pour améliorer la sécurité et la stabilité dans la région en développant des moyens effectifs et pratiques de coopération et davantage d’assistance ; - Améliorer la coordination des efforts pour arrêter les actes de terreur sur les niveaux bilatéraux, régionaux et internationaux, en s’assurant que les instigateurs de tels actes soient amenés en justice ; - Soutenir les efforts de toutes les parties pour empêcher que leurs territoires soient utilisés pour des objectifs terroristes et empêcher les organisations terroristes de s’engager dans le recrutement, l’approvisionnement en armes ou la levée de fonds ; - Exercer un maximum d’efforts pour identifier et déterminer les sources de financement de ces groupes et pour coopérer afin de les stopper ; - Fournir un entraînement, des équipements et d’autres formes de soutien à ceux qui prennent des mesures contre des groupes employant la violence et la terreur pour toucher la paix, la sécurité ou la stabilité… ».

            Des observateurs ne pouvaient conclure autrement qu’en disant que le sommet n’était rien qu’une déclaration de guerre contre le Hamas, dans lequel la Jordanie était un participant clé dont le rôle dans cette guerre serait hautement apprécié et minutieusement surveillé.

            Apparemment, à la lumière de cette déclaration et de l’adhésion de la Jordanie, Samih Al-Battikhi, en tant que nouveau chef du département des renseignements généraux, ne faisait que son travail. Son attaque contre le Hamas avait plusieurs aspects. Tout d’abord, il autorisa ses hommes à tourmenter, intimider et à déranger la direction du Hamas et ceux qui s’identifiaient comme membres du mouvement ou qui étaient suspectés d’y être associés. Des suspects furent intensivement interrogés dans une intention de réaliser une image aussi complète que possible des opérations du Hamas et des institutions qui le soutenaient, non seulement au niveau local, mais aussi au niveau international. Nombre d’entre eux sortirent de leurs interrogations en ayant l’impression que ce que les renseignements rassemblaient n’était pas exclusivement destiné à une utilisation locale. Suite au meeting de Sharm Al-Sheikh, ceci n’était que prévisible. Des sources du Hamas soutinrent qu’au moins cent hommes suspectés d’avoir travaillé pour le mouvement furent détenus et interrogés en 1996 et 1997.

            Une autre tactique employée par Al-Battikhi était de faire taire les officiels du Hamas et de les empêcher de parler aux médias. Parfois, toutefois, ils n’avaient d’autre choix que de s’exprimer ouvertement, en défi à l’interdiction. Fin mai 1996, l’autorité palestinienne arrêta des centaines de membres du Hamas en Cisjordanie et à Gaza, mettant en même temps la pression sur le porte-parole du Hamas à Gaza, Mahmoud Al-Zahhar, pour qu’il appelle à une fin des “opérations martyres”, qu’il accepta de dire que c’était une erreur. Khaled Meshaal, qui était déjà devenu chef du bureau politique, mais dont la nomination n’avait pas encore été rendue publique, donna pour instruction à Ibrahim Ghosheh, porte-parole officiel du Hamas, de publier un communiqué disant que la position du Hamas n’avait pas changé et qu’Al-Zahhar parlait sous la contrainte. Al-Battikhi téléphona Ghosheh, l’injuria verbalement, et le menaça, lui disant qu’il allait être arrêté s’il parlait de nouveau aux médias. Il parla à nouveau, et il fut en effet arrêté. Le 4 septembre 1997, trois explosions à Jérusalem, revendiquées par le Hamas, tuèrent huit Israéliens et en blessèrent plus de cent soixante-dix. Reuters contacta Ghosheh pour une clarification, et il affirma que le peuple palestinien avait le droit de résister à l’occupation. Ghosheh fut alors détenu dans les quartiers généraux de la direction des renseignements généraux pendant quinze jours, durant lesquels il fut totalement isolé du monde extérieur et sujet à une interrogation quotidienne intensive avec jusqu’à quatre interrogateurs à la fois.

Hamas: son histoire de l'intérieur (26)

Traduction réalisée par le Centre Palestinien d’Information (CPI)



Source : CPI
http://www.palestine-info.cc/...


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