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Centre Palestinien
d'Information
Hamas : son histoire de l'intérieur (31)
Photo CPI
Dimanche 24 mai 2009
Dr. Azzam Tamimi
L’ouvrage
Hamas : Son histoire de l’intérieur
de Dr. Azzam Tamimi s’inscrit dans
une volonté de montrer au monde la vision du mouvement du
Hamas et d’expliquer ainsi son développement. Le département
français du Centre Palestinien d’Information (CPI) a donc
jugé intéressant d’en présenter ici la traduction complète,
diffusée régulièrement en de nombreuses parties.
En Jordanie
(11)
Parmi les leaders des Ikhwan, Abu Dayyah, qui souffrait sur la
question de l’autorité, crut vraiment qu’une opportunité s’était
présentée à l’intérieur de la Palestine pour ses frères du
Hamas. Il n’hésita pas à dire à Meshaal et à ses collègues du
Hamas qu’il serait meilleur pour eux de retourner en Palestine
alors que l’autorité palestinienne était toujours dans ses
débuts. Son avis était qu’ils pouvaient influer sur le cours des
événements s’ils transféraient à nouveau la direction du Hamas à
Gaza et en Cisjordanie avant que l’autorité palestinienne ne se
développe en une puissante entité. Cependant, il ne fut pas
capable d’évaluer qu’il n’y avait pas de voie pratique pour la
concrétisation de cette idée. Il était excessivement optimiste,
croyant qu’Israël allait simplement permettre le retour du
Hamas. Il ne réussit pas à comprendre que l’autorité
palestinienne avait un degré d’influence sur ceux qui entraient
et ceux qui sortaient. Il ne vit pas non plus que ce fut le
déplacement de la direction du Hamas de Gaza à la diaspora en
1989 qui avait sauvé le mouvement d’une destruction totale par
Israël et ses collaborateurs.
Dans un tel climat, il ne fut pas difficile pour Al-Najjar de
convaincre certains des leaders des Ikhwan que le Hamas avait
pour projet d’infiltrer leur propre organisation. Il déclara
avoir vu un document interne au Hamas intitulé “Le plan
d’infiltration des Ikhwan”. Il cita comme preuve une série de
documents qui circulaient dans le pays alors qu’il était en
détention au département des renseignements généraux. Il déclara
que ces documents, attaquant le bureau exécutif des Ikhwan,
étaient écrits et diffusés par les leaders du Hamas en Jordanie.
Lorsque les documents firent leur apparition, au début, signés
seulement “Kawadir Al-Ikhwan Al-Muslimin” (les cadres des Ikhwan),
les Ikhwan avaient conclu que c’était l’œuvre du DRG. Al-Najjar
accusa aussi Muhammad Nazzal d’avoir divulgué des histoires à la
presse au sujet d’affaires internes aux Ikhwan en Jordanie. Les
Ikhwan tentèrent de garder une confidentialité absolue lors de
la conduite de leurs investigations. Certains des témoins qui
leur furent présentés par Al-Najjar avaient travaillé pour le
Hamas et souhaitaient que leur participation reste secrète.
Outefois, le bureau politique du Hamas fut au courant de ce qui
se passait. L’investigation des Ikhwan coïncidait avec la tenue
d’un tribunal d’appels pour écouter les objections faites par
Al-Najjar et la direction du Hamas contre le verdict du
précédent tribunal. Le Hamas pensait que la sentence contre Al-Najjar
était trop clémente, alors qu’Al-Najjar croyait qu’il n’aurait
pas dû être inculpé en premier lieu. Avec de nouvelles preuves
contre Al-Najjar devant le tribunal d’appels, ce dernier décida
qu’il devait être complètement renvoyé du mouvement et que tous
les droits devaient lui être reniés.
Les leaders des Ikhwan, qui avaient promis de protéger Al-Najjar
pendant le déroulement de leur investigation, furent irrités par
la décision du Hamas de le renvoyer, et ils décidèrent de lui
permettre de garder son adhésion aux Ikhwan, sans tenir compte
de ce que pouvait décider le Hamas. Ils critiquèrent aussi le
tribunal du Hamas pour avoir décidé que ses droits lui seraient
refusés. Les Ikhwan furent d’avis que même si Al-Najjar était
dans le tort, la meilleure option était de le garder plutôt que
de le provoquer davantage. Al-Najjar fut aussi suspecté d’avoir
diffusé les déclarations écrites concernant les affaires
internes du Hamas, qui révélaient des informations
confidentielles, d’avoir publié les noms des membres et leaders
qui n’étaient pas connus du public, et d’avoir accusé de hauts
leaders du Hamas de corruption. Certains leaders du Hamas furent
forcés de se défendre. En conséquence de ces allégations, ils
furent obligés de produire des documents qui prouvaient que
leurs maisons, qu’ils furent accusés d’avoir payé avec de
l’argent appartement au Hamas, avaient en réalité était achetés
avec leur propre argent ou celui de leurs épouses.
L’environnement sombre créé par ces allégations encouragea
plusieurs membres déçus des Ikhwan, qui avaient plus tôt
travaillé pour le Hamas et qui étaient partis suite à quelque
dispute ou pour d’autres raisons, à s’impliquer dans l’affaire.
Ibrahim Gharaybah en est un exemple, lui qui avait dans le passé
était un proche associé du leader adjoint des Ikhwan Abu Dayyah.
Gharaybah publia de nombreux articles dans la presse arabe
locale et régionale qui critiquaient ou même dénonçaient la
direction du Hamas en Jordanie. Il avait été employé pendant une
courte période de temps par un projet de médias du Hamas en
Jordanie, mais son emploi avait pris fin lorsqu’il fut senti
qu’il n’accomplissait pas correctement ses fonctions. Il publia
au début ses articles sous des pseudonymes, mais il les signa
ensuite avec son propre nom. Son ami Abu Dayyah lui demanda
d’arrêter à plusieurs reprises, car ceux qui étaient conscients
de leur amitié avaient commencé à suspecter que Gharaybah ait pu
être en train d’exprimer le point de vue d’Abu Dayyah. En fin de
compte, Gharaybah fut renvoyé des Ikhwan pour avoir refusé
d’arrêter ses activités. Comme dans le cas d’Al-Najjar, nombre
de gens pensèrent que le principal objectif de Gharaybah était
de se venger de ses anciens supérieurs. Dans ses articles, il
argumentait avec insistance que le Hamas ne devait exister qu’à
l’ouest du Jourdain, où il appartenait en réalité.
Certaines figures clé des Ikhwan, toutefois, choisirent de
croire les allégations injurieuses faites contre les leaders du
Hamas en Jordanie et y firent référence lorsqu’ils discutaient
de la question, disant ce qu’ils pensaient de ce que les
priorités du Hamas devaient être. L’affaire ne pouvait plus
rester dans les cercles fermés du Hamas et des Ikhwan, et un
public plus large en prit vite connaissance à l’intérieur de la
Jordanie et au-delà. Finalement, l’affaire servit d’accélérateur
pour la détérioration de la relation entre le Hamas et les
Ikhwan. Elle fournit aussi, même si cela ne fut que pour une
courte période, des munitions pour ceux qui souhaitaient que les
Ikhwan récupèrent le terrain politique qui leur avait été pris
en Jordanie par le Hamas. Il apparaît, par conséquent, que le
complot initialement tramé par le directeur du département des
renseignements généraux Samih Al-Battikhi avait réussi au moins
certains de ses objectifs prévus.
Fin du chapitre
Hamas: son histoire de
l'intérieur (30)
Hamas: son histoire de
l'intérieur (32)
Traduction réalisée
par le Centre
Palestinien d’Information (CPI)
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