Entretien de
Mikhaïl Gamandiy-Egorov
Malabo et le modèle équato-guinéen (2)
Luc Michel
Jeudi 31 juillet 2014
# LUCMICHEL. NET/ SYRIE – GUINEE
EQUATORIALE – EURASIE - AFRIQUE : ‘LA
VOIX DE LA RUSSIE’ INTERROGE LUC MICHEL
(2)
Grande interview de Luc MICHEL
par le journaliste Mikhail Gamandiy-Egorov
pour le Site de LA VOIX DE LA RUSSIE
La Voix de la Russie / 2014 07 31 /
Version originale sur :
http://french.ruvr.ru/2014_07_25/Malabo-et-le-modele-equato-guineen-Entretien-avec-Luc-Michel-Partie-2-1289/
# Mikhail Gamandiy-Egorov/LVdlR :
Parlons maintenant de votre visite à
Malabo, la capitale de la Guinée
équatoriale. Quelles impressions le pays
vous a laissé ? Votre visite a-t-elle
confirmé les thèses selon lesquelles la
Guinée équatoriale reprendrait le
flambeau du panafricanisme, après le
décès tragique de Mouammar Kadhafi en
Libye ?
Luc MICHEL :
Une grande impression, un pays en pleine
émergence et un gigantesque chantier !
La Guinée Equatoriale, qui propose son
modèle alternatif de développement et
d’émergence, est le nouveau centre du
Panafricanisme et son président Obiang
Nguema Bassogo l'héritier de Moammar
Kadhafi. Je le confirme. Le Pays et son
président ont les capacités à reprendre
le flambeau du panafricanisme, après la
chute de la Jamahiriya libyenne.
On connaît mal la Guinée équatoriale,
pays important dans l’Afrique de
l’Ouest, « nouvel eldorado pétrolier »
qui entend incarner aujourd'hui un
nouveau modèle de développement pour
l'Afrique. Dans une Afrique qui va mal,
où les interventions et les
manipulations occidentales déstabilisent
le continent – Libye, Mali, Côte
d’Ivoire, Centrafrique, sans oublier le
« laboratoire » somalien -, la Guinée
Equatoriale est un contre-exemple de
stabilité. Depuis 2011, un processus de
reconstruction de l’Etat et de
développement de la vie démocratique de
la République est en marche. Derrière
toutes ces réalisations, dont a témoigné
le sommet de Malabo et sa parfaite
organisation, il y a une Afrique qui
gagne : celle du modèle équato-guinéen.
Et l’homme qui l’a construit : le
président Obiang Ngema Mbassogo.
Je souligne que la Guinée Equatoriale
est un Etat en reconstruction, où un
processus élaboré de développement de la
vie démocratique de la République est en
cours. Dans un livre très dur pour le
gouvernement, Samuel Denantes Teulade
évoquait déjà en 2009 à propos de Malabo
la possibilité d’ « un nouveau modèle de
développement pour l'Afrique ». Le
président Obiang Ngema, qui définit son
pays comme "un état social et de droit",
développe aujourd’hui incontestablement
une vision pour son pays. Ce qui lui
vaut inévitablement la haine des régimes
occidentaux. La Guinée Equatoriale et
son président sont l’objet de la haine
permanente de l’Occident, France entête
car Obiang Ngema gêne les restes de la
Françafrique, repliée sous la protection
de l’Africom et de l’OTAN. Et l’empire
néocolonial du Franc CFA. Campagnes de
dénigrement, maneuvres de
déstabilisation. Une haine qui rappelle
celle qui entourait la Jamahiriya
libyenne de feu Kadhafi !
# Mikhail Gamandiy-Egorov/LVdlR :
Quels sont les aspects de la politique
équato-guinéenne à mettre en avant ?
Aussi bien sur le plan des politiques
intérieure qu’extérieure, ainsi que dans
le domaine économique.
Luc MICHEL :
J’ai produit deux émission spéciale avec
EODE-TV et AFRIQUE MEDIA sur le modèle
équato-guinéen.
J’y ai diffusé des extraits d’un
film-choc de nos excellents confrères de
la TV de Guinée Equatoriale intitulé «
SUR LE CHEMIN DE L’EMERGENCE ». On
connaît hélas trop bien cette Afrique
dévalorisée, où tout va mal, des médias
occidentaux … Voici l’Afrique qui gagne
! Un film décoiffant, avec des images
que l’Occident dissimule totalement, de
la RTVGE. Celle de la réussite du modèle
guinéo-équatorien. D’un gigantesque
chantier où l’argent du pétrole sert le
peuple et ouvre la voie de l’émergence.
L’œuvre d’un homme au service de son
peuple, le Président Obiang Ngema
Mbasogo, l’alternative équato-guinéenne,
qui sert de référence déjà notamment à
son voisin camérounais. Mais la Guinée
Equatoriale ce n’est pas uniquement
Malabo, Sipopo ou Bata. Partout le pays
émerge. Nous avons été sur les routes,
au cœur du pays, dans les villages et la
forêt équatoriale. Partout c’est aussi
le spectacle de l’émergence : routes
modernes, infrastructures, services,
logements sociaux …
Comment ce modèle fonctionne-t-il
économiquement et socialement ?
Par une économie dirigée, par
l’argent du Pétrole mis au service du
développement national, par un état
social, appuyé notamment sur une
politique de grands travaux
(infrastructures, logements sociaux …).
Obiang Gnema Mbassogo, c’est aussi le
combat pour le panafricanisme, le refus
des ingérences occidentales, la défense
de Kadhafi et de son héritage
panafricain …
# Mikhail Gamandiy-Egorov/LVdlR :
Vous avez écrit que le Président Obiang
Ngema Bassogo rejoignait vos
préoccupations géopolitiques et votre
vision d’un monde futur plus juste ?
Luc MICHEL :
Les positions du président de Guinée
Equatoriale rejoignent en effet mes
préoccupations. Je voit le processus
d'unification de l'Europe et de
l'Afrique comme deux voies similaires,
qui doivent se réaliser en symbiose.
Cela signifie pas d'intervention
occidentale en Afrique et vrai respect
pour les états africains. Cela signifie
aussi que la Méditerranée doit devenir
un pont entre les deux continents et non
une frontière, comme la conçoivent l’UE
et l’OTAN. Cette vision de la
Méditerranée, que nous avons été les
premiers à développer au début des
Années 90, comme un pont, était
précisément celle de la Jamahiriya
libyenne. Dans les Années 2000-2010,
cette vision était aussi largement
acceptée et partagée par tous les grands
acteurs des unions européenne et
africaine. Et agaçait énormément la
diplomatie américaine. Mais la guerre en
Libye marque le grand retournement :
destruction de la Jamahiriya, retour aux
agressions et expéditions militaires
occidentales en Afrique, étouffement des
idées pan-africaines.
Tout cela va à l’encontre de ma vision
d’un monde multipolaire constitué de
grand Blocs géopolitiques. Le rôle
central joué par le dialogue des
cultures est bien oublié et nous
assistons au retour en Méditerranée et
en Afrique des thèses bellogènes du «
choc des civilisations ». Le retour des
thèses panafricaines à Malabo, la
défense de l’héritage de Kadhafi, que
j’assume moi aussi, est donc pour moi un
signe positif qui va dans l’autre sens.
# Mikhail Gamandiy-Egorov/LVdlR :
Vous avez mentionné récemment « l’Axe
Moscou-Téhéran-Malabo ». Pouvez-vous
nous en dire plus ?
Luc MICHEL :
Je vais essayer de vous résumer ce
nouveau concept géopolitique,
révolutionnaire, – « L’AXE
EURASIE-AFRIQUE » -, que j’ai inventé il
y a un an maintenant et qui émerge au
niveau des panafricanistes. Car il a été
conçu au départ pour l’Afrique. Ce sont
des positions géopolitiques novatrices.
L'alternative géopolitique du futur,
"l'Axe Eurasie-Afrique", est centré sur
le triangle Moscou-Malabo-Téhéran et
basé sur les concepts « dimension –
puissance – indépendance » et des «
blocs continentaux auto-centrés ».
L’Axe Eurasie-Afrique doit s’appuyer sur
les pivots que sont ces trois capitales
: Moscou, Malabo et Téhéran. En 2050, il
y aura certainement un gros bloc
nord-américain qui englobera le Canada
et le Mexique, peut-être plus loin
encore, et à côté de ça, une grande
puissance chinoise avec certainement
entre 1,5 et 2 milliards
d’habitants. La dimension, c’est aussi
la population. Face à ça, comment rester
acteurs de l’histoire ? Il faut un bloc
géopolitique qui puisse faire le
contre-poids. Ce n’est pas l’Afrique
seule, pas même l’Eurasie, qui le fera,
c’est l’axe Eurasie-Afrique. Un bloc
continental ayant pour pivots trois
capitales : Moscou, Malabo – Pourquoi
Malabo ? Parce qu’il n’y a qu’ici qu’on
essaie de renouveler la pensée
panafricaniste dans la ligne du colonel
Kadhafi – et Téhéran, puisque l’Iran est
la grande puissance qui émerge au
Moyen-Orient en ce moment. Ce doit être
un bloc égalitaire, avec des relations
égalitaires entre l’Afrique et
l’Eurasie. Si nous ne faisons pas cela,
nous ne serons plus des acteurs de
l’Histoire…
# Mikhail Gamandiy-Egorov/LVdlR :
Pourriez-vous nous dire aussi quelques
mots sur la genèse de ce concept ? Vous
dirigez en Europe un Parti, le PCN,
d’orientation eurasienne, qui commémore
ses 30 ans en 2014.
Et on vous voit aussi émerger rapidement
depuis deux ans comme théoricien et
leader panafricaniste. Sur votre Page
officielle Facebook, des centaines et
des centaines d’Africains saluent chaque
semaine vos thèses. Position peu banale
donc. Votre « Axe Eurasie-Afrique »
est-elle la synthèse géopolitique et
idéologique de ces deux dimensions de
votre action ?
Luc MICHEL :
J’ai de nombreuses vies politiques.
Simultanées. Et je suis un
internationaliste convaincu, un
transnationaliste pour être plus précis.
L’une de mes vies est ce que la presse
belge (hostile) appelle la « diplomatie
parallèle » avec notre Ong EODE. Qui a
une grande partie de ses activités
depuis 2009 en Afrique, avec sa Branche
EODE-AFRICA, dont l’administrateur, le
Camerounais Gilbert Nkamto, est le n°2
d’EODE.
Une autre se développe depuis plus de 40
ans en Europe et s’est structurée autour
d’un parti, le PCN, et d’une idée-force
« la Grande-Europe de Vladivostok à
Reykjavik ». En 1986, ma revue
CONSCIENCE EUROPEENNE – j’animais alors
avec Jean Thiriart l’Ecole «
euro-soviétique » de géopolitique
(devenue aujourd’hui l’Ecole
géopolitique de la « Grande-Europe ») -
dans son n°9 consacré aux «
théories géopolitiques des grands
espaces » redécouvrait et réinventait l’Eurasisme.
Huit ans avant que suite au voyage de
Thiriart à Moscou en 1992, Ziouganov (le
leader du KPRF russe, avec son Eurasisme
de gauche, devenu celui de Poutine) et
Douguine (Néo-Eurasisme de droite)
n’adoptent cette idée réinventée à
Bruxelles. Il y a huit ans, j’annonçait
la naissance d’une « SECONDE EUROPE »
géopolitique, eurasiatique, autour de
Moscou. Et annonçait le choc
idéologique, politique et économique de
Bruxelles et Moscou. Celui dont les
événements présents de Kiev sont la
manifestation la plus brutale …
Mais j’ai aussi une troisième vie.
Je suis à l’origine un « paneuropéiste
», j’ai été initié au panafricanisme par
le colonel Kadhafi. J’ai exercé des
responsabilités sous la Jamahiriya (dès
1997) au sein des Comités
Révolutionnaires libyens, dont je
dirigeais le réseau paneuropéen (le
MEDD-MCR qui s’est maintenu après 2011
et travaille toujours). Et depuis deux à
trois ans, j’essaie d’avoir un rôle
moteur dans la renaissance d’un nouveau
panafricanisme. Je considère que
l’Afrique est un des territoires-clé
géopolitique du futur. C’est ici que se
déroule un des grands affrontements qui
devra déterminer le sort du monde. Et je
pense que, même sans être d’origine
africaine, on peut défendre le
panafricanisme, il y a eu de grandes
figures : Che Guevara qui n’était pas
africain et qui est venu se battre au
Congo en 1965, ou des gens comme Nasser
et Kadhafi, qui à l’origine sont des
Arabes ou des panarabistes, qui ont été
attirés comme moi par le sort du
Continent noir. Kadhafi pensait en terme
de géopolitique des continents. Il
voulait une Afrique unie, et
j’ajouterais, puisque je suis sur cette
même ligne, et pensait que le
Panafricanisme et le Paneuropéisme
doivent s’unir pour se dégager des
Américains. La Méditerranée doit
redevenir le point de rencontre, la mer
commune, la « Mare nostrum » des
Romains.
On doit comprendre quelque chose, ce
qu’on appelle actuellement l’Occident,
c’est le bloc américain. Et dans ce bloc
l’UE est la plus grande des colonies
yankee depuis 1945. Qu’est-ce qui fait
la puissance américaine depuis 1945 ?
C’est le contrôle de la seconde économie
la plus puissante au monde qui est
l’économie de l’Europe occidentale.
Qu’est-ce qui permet aux Américains
d’être une superpuissance ? C’est non
seulement la puissance nord-américaine
elle-même, mais (aussi) le contrôle de
la puissance de l’Union européenne. Si
voulez, pour prendre (l’exemple d’) un
corps humain, l’Union européenne est le
deuxième poumon des Américains. Cela
s’exprime depuis 1944 au travers d’un
système de domination coloniale en
Europe. Il faut comprendre qu’en 1945
l’Europe est passée du statut de
puissance coloniale au statut de
colonie, c’est une colonie américaine.
Ma position est assez simple, je ne me
définis pas comme Occidental, je me
définis comme un Européen et comme un
décolonisateur et quelqu’un qui combat
le colonialisme. En Europe, en Eurasie
et en Afrique !
# Mikhail Gamandiy-Egorov/LVdlR :
Merci d’avoir répondu à nos questions !
Luc MICHEL :
C’est toujours un plaisir. La ‘Voix de
la Russie’ m’est chère et je m’y exprime
souvent. Nous menons le même combat. Et
j’apprécie votre orientation, la
compréhension de l’importance de
l’Afrique dans le combat pour la liberté
du monde.
Mikhail Gamandiy-Egorov/
LA VOIX DE LA RUSSIE :
Première Partie sur :
http://french.ruvr.ru/2014_07_24/Damas-et-la-resistance-de-la-Syrie-Ba-athiste-Entretien-avec-Luc-Michel-Partie-1-1550/
Photos : Luc MICHEL au Centre de
conférence international de Sipopo, à
Malabo, pour le XXIIIe Sommet de l’UA,
le 26 juin 2014.
Luc MICHEL /
PROFIL Facebook
https://www.facebook.com/luc.michel.505
Twitter
https://twitter.com/LucMichelPCN
PAGE OFFICIELLE
Facebook
https://www.facebook.com/Pcn.luc.Michel
Website
http://www.lucmichel.net/
Le sommaire de Luc Michel
Le sommaire de La Voix de la Russie
Le
dossier Afrique noire
Les dernières mises à jour
|