5 novembre 2008
Le mardi 4 novembre 2008 fait désormais
partie de l’histoire des Etats-Unis. L’accession à la Maison
Blanche d’un candidat metis, plébiscité par le monde entier,
suscite de nombreux espoirs. Mais Obama parviendra-t-il à
modifier en profondeur la politique étrangère américaine ? Et
d’ailleurs, le veut-il vraiment ? Tour d’horizon des grands
dossiers diplomatiques qui attendent le nouveau président.
Le monde entier en rêvait, les électeurs
Américains l’ont fait. Avec un taux de participation record de
66%, une mobilisation sans précédent, ils ont envoyé Barack
Obama à la Maison Blanche.
Depuis plus d’un an, la terre entière, et pas
seulement la nation américaine, suit avec la plus grande
attention le long processus électoral qui a abouti à l’élection
du 44ème Président américain. Cela montre la place à nulle autre
pareil des Etats-Unis dans le système international. Chaque
peuple a conscience que l’élection du Président américain peut
avoir de fortes conséquences le concernant. Aucune autre
désignation d’un chef d’Etat dans un pays n’a un tel impact
mondial. Cela prouve également l’immense soif de changement
après deux mandats catastrophiques de George W. Bush. C’est bien
largement sur le rejet de ce dernier dans le monde et aux
Etats-Unis que Barack Obama a construit son succès. Les
Américains avaient soif de changement, ils ne voulaient plus se
voir dans le reflet de leur société et de leur pays que George
W. Bush donnait à l’extérieur. On peut donc être redevable d’une
chose à George W. Bush : il a permis fut-ce par réaction
négative à son égard, l’élection d’Obama.
La crise financière a parachevé le succès de
Barack Obama. C’est après qu’elle se soit déclenchée que les
sondages l’ont tous donné gagnant (et largement) face à Mc Cain.
Celui-ci a par ailleurs commis une erreur de jugement en nommant
Sarah Palin comme colistière. Elle a certes consolidé la base
républicaine dure, mais elle a effrayé tous les électeurs
modérés.
Par rapport aux immenses défis à relever, dix
millions de chômeurs, de nombreux travailleurs pauvres, des
dizaines de milliers de personnes chassées de leur maison, des
déficits commerciaux et budgétaires gigantesques, deux guerres
difficiles à gérer en Irak et en Afghanistan, le dossier du
Proche-Orient, la lutte contre Al Qaïda, la fragilité du
Pakistan et le renouveau russe, la tâche d’Obama semble
gigantesque, titanesque même.
Il pourra compter sur son charisme, son
énergie et l’immense enthousiasme qu’il a suscité aux Etats-Unis
et dans le monde. Il pourra également compter sur sa
clairvoyance et son courage et il fallait avoir les deux pour
s’opposer à la guerre d’Irak aux Etats-Unis en 2002-2003.
Une véritable « Obamania » déferle sur la
planète. C’est une lune de miel entre un homme et le monde à
laquelle on assiste. Il est aujourd’hui l’homme le plus
populaire du monde, alors qu’il y a encore quelques jours, les
Etats-Unis étaient le pays le moins aimé du monde. Son élection
va rejaillir sur l’image des Etats-Unis et d’ores et déjà de
nombreux Américains se disent de nouveau fiers de l’être.
Car au-delà de la question raciale qu’Obama
veut dépasser, il faut se souvenir, il y a encore deux
générations, les Noirs ne pouvaient s’asseoir dans le bus à côté
des Blancs. Or, le fait que ce pays puisse aujourd’hui élire un
Président noir en dit long sur ses capacités de réaction et de
mouvement. Ce qui compte avant tout, c’est l’image de tolérance
et d’ouverture qui s’en dégage, non seulement en parole, mais
aussi dans les faits Ce sont les Etats-Unis qu’on aime
dynamiques sans préjugés. La grande distinction avec l’ère de
George W. Bush où on célébrait les valeurs américaines dans les
discours pour les fouler au pied dans la politique concrète tant
sur le plan intérieur qu’international.
Il y a cependant deux illusions qui doivent
être dissipées. La première est que Obama pour brillant qu’il
soit n’est pas magicien. Il ne pourra pas résoudre comme par
enchantement et rapidement les multiples problèmes nationaux et
internationaux qui se posent. Il ne faudrait pas que les
immenses attentes, parce qu’elle ne pourront pas être
satisfaites immédiatement, produisent un désenchantement majeur.
Seconde illusion à ne pas avoir, Barack Obama n’est pas le
Président du monde, mais celui des Etats-Unis. Son agenda est
dicté par l’intérêt national américain, pas le bonheur de tous.
Il ne faut pas douter de son patriotisme. Son objectif est
justement de restaurer le prestige et partant de là, la
suprématie américaine mise à mal par George W. Bush. Simplement,
sa conception de l’intérêt national est moins incompatible avec
les intérêts des autres Nations que ne l’était celle de George
W. Bush, sa conception des valeurs américaines n’est pas
agressive à l’égard des autres Nations.
Le monde ne va pas devenir parfait, mais il
est déjà plus vivable.
Pascal Boniface,
directeur de l’IRIS et co-auteur de "50
idées reçues sur les Etats-Unis" (avec Charlotte Lepri,
Hachette).
DOSSIER - LES DEFIS
DIPLOMATIQUES DE BARACK OBAMA :
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Publié le 7 novembre avec l'aimable autorisation de l'IRIS.