Naplouse – CPI
Tous les matins, les deux députés du Conseil législatif
palestinien Ridad Ali et Hosni Al-Bourini quittent leurs villages
pour aller rencontres d'autres députés mandatés par le mouvement
de la résistance islamique "Hamas". Ensuite, ils partent
tous ensembles pour une tournée de visite de quelques établissements
de la ville.
Dès que leur victoire aux élections législatives palestiniennes
avait été annoncée, il y a environ deux mois, les députés du
groupe parlementaire du "changement et de la réforme" du
Hamas n'arrêtent pas de rendre visite à tous les établissements
aussi bien publics que privés dans le but de connaître leurs problèmes
et besoins.
Riad Ali, surnommé "Abou Ali", est un habitant du village
de Qablan, le deuxième groupe résidentiel du département après
la ville de Naplouse. Après une dizaine d'années au service du
village comme maire, les habitants lui avaient donné leur confiance
et leurs voix. "Nous ne devons donc pas les décevoir et nous
devons nous approcher d'eux pour ressentir leurs problèmes et
besoins", dit-il.
Déjà durant la campagne électorale, des dizaines d'établissements
ont été visités par les députés qui espéreraient leur être
utile. Et maintenant, "le temps est arrivé, ajoute-il, pour
que nous honorions nos promesses que nous avions données devant
Allah le Tout Puissant et les habitants de Naplouse qui nous avaient
aidés et étaient à nos côtés".
En se préparant pour une nouvelle sortie, accompagné de ses collègues,
il poursuit : "Nous avons un programme, un projet destiné à
rendre visite toutes les tranches de la société, tous les établissements,
afin de connaître de près la rue palestinienne, ses espérances et
ses soucis. Dans le but de mieux appliquer ce programme, nous avons
mis en place un planning hebdomadaire pour visiter ces établissements
et rencontrer leurs personnels".
Fausse image
Abou Ali souligne que les citoyens se sont faits une mauvaise image
du député du Conseil législatif palestinien. Ils croient que dès
qu'il gagne les élections, il ferme son bureau, éteint son téléphone
portable et disparaît dans la nature. Il quitterait Naplouse pour
aller vivre dans une villa officielle à Ramallah, avec des
limousines, des suites et des employés à son service. "Nous
devons, coûte que coûte, changer cette image répugnante. Nous
devons leur démontrer que nous sommes d'eux et à eux. Nous ne les
laissons jamais tomber", dit-il en ajoutant que les
comportements de certains anciens députés ont participé à créer
et à renforcer cette image.
Le député Al-Bourini, habitant du village d'Assira, à proximité
de Naplouse, est d'accord avec son collègue. "Il y a ceux qui
s'étonnent de me voir me promener dans les rues du village.
Beaucoup m'ont interrogé sur la raison de ma présence dans le
village. Pourquoi y suis-je encore ? Il m'a au moins fallu aller
vivre dans la ville. Pourquoi je n'ai pas encore changé mon
ancienne voiture des années quatre-vingts pour une nouvelle avec un
chauffeur et un garde du corps ?", s'étonne-t-il !
"Au départ, cette affaire m'étonnait beaucoup. Pourtant, je
leur affirmais que je ne changerai en aucun cas ma vie. Elle restera
après la victoire comme elle était avant. Je ne me suis pas présenté
aux élections pour avoir une situation, mais surtout pour les
servir. Certains me croient. D'autres pensent que je changerai tôt
au tard à l'instar de ceux qui m'avaient précédé"
raconte-il.
Ramener la confiance
Al-Bourini a travaillé une trentaine d'années dans l'éducation.
Il dit qu'ils veulent, lui et ses collègues députés, combler la
lacune agrandie durant les dernières dizaines d'années par
certains députés qui ont préféré leurs intérêts personnels à
ceux des citoyens qui leur avaient donné leur confiance et leurs
voix.
Riad Ali est sur la même longueur d'onde. Il souligne, lui aussi,
que certains s'étonnaient de les voir se promener dans les marchés
du village. Certains même criaient : "Demain, ils nous
oublieront comme les autres". En fait, tout citoyen a besoin de
quelqu'un qui l’entend, s'intéresse à ses soucis quotidiens et
s'approche de lui de plus en plus, affirme-t-il.
La culture personnelle
Les nouveaux députés tentent de constater eux-mêmes comment
marchent les établissements publics, quels services ils offrent aux
citoyens, quels sont leurs problèmes et surtout pourquoi ils ne répondent
pas comme il faut aux besoins des citoyens, dit le député
Al-Bourini.
Il ajoute que ces visites quasi-quotidiennes lui sont très utiles
au niveau de l'enrichissement personnel. Elles lui permettent de
mieux connaître les obstacles et les problèmes desquels souffrent
ces établissements et leurs employés, les pressions des lois
injustes imposées sur eux. Elles lui permettent aussi de se rendre
compte des vices compromettant le bon fonctionnement de ces
institutions publiques comme le problème des pots-de-vin et toutes
les comportements inacceptables.
"Durant notre visite à un bureau d'un ministère à Naplouse,
nous nous sommes réunis avec les fonctionnaires. Nous, les députés,
avons ressenti chez eux une grande soif de discuter avec des
responsables", continue Al-Bourini.
"Après les avoir remerciés pour leur bon accueil, un
fonctionnaire s'est mis debout et nous a dit : "C'est la première
fois depuis douze ans qu'un responsable ou un député du Conseil législatif
nous rend visite. J'espère qu'elle ne sera pas la première et la
dernière, que vous ne travaillez pas que pour les membres de votre
formation, que vous ne donniez des primes pas qu'à eux pour nous délaisser,
comme faisaient les autres. A ce moment, il y a eu un silence de
mort dans la salle. Nous n'avions rien à répondre. Ce qu'il venait
de dire n'étant pas une simple fiction", raconte-il.
"Je n'avais qu'à me remettre droit et à leur affirmer que
nous ne sommes pas uniquement les députés du Hamas, que nous représentons
le peuple tout entier, tous ses partis et toutes ses formations, que
nous tentons de toutes nos forces de les aider, eux et les autres
citoyens, que nous n'oublierons ce que nous venions d'entendre dès
que nous sortirons. Ils nous ont chaleureusement applaudis",
relate-t-il.
Après avoir entendu quelques histoires d'injustice que les
fonctionnaires avaient subies, le député Al-Bourini fait part de
ses constatations en disant que l'héritage est très lourd, que les
députés restent le seul recours à tout citoyen pour parler de ses
soucis. "Cela renforce notre volonté de travailler sérieusement
pour offrir à ceux-là une vie rassurée".
Réalisations
Les visites ne sont pas effectuées pour seulement entendre les
problèmes des fonctionnaires, mais également pour connaître leurs
réalisations.
A titre d'exemple, Al-Bourini affirme que la visite du siège du
Croissant Rouge Palestinien (CRP) était fructueuse. Cette mission
humanitaire ne consiste pas uniquement en des ambulances
transportant les malades et les blessés. "Elle s'occupe
particulièrement d'une tranche (de la société) ayant des besoins
spéciaux", constate Al-Bourini. Il ajoute que les services
offerts aux sourds, aux muets, aux aliénés, sont vraiment étonnants,
malgré les graves problèmes financiers.
Le laboratoire d'analyse de la terre et de l'huile d'olive est un
autre exemple bien probant de ces établissements dans lesquels des
citoyens honnêtes travaillent jour et nuit pour servir leur patrie,
la Palestine, dit Abou Ali.
Finalement, les deux députés nous confirment leur intention de
continuer à entendre les citoyens pour les défendre et pour les
servir.
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