in Al-Quds al-Arabiyy, mercredi 14 juin 2006
Traduit de l'arabe par Marcel Charbonnier,
membre de Tlaxcala, le réseau de traducteurs pour la diversité
linguistique (www.tlaxcala.es).
Cette traduction est en Copyleft.
L’enthousiasme du président de l’Autorité
nationale palestinienne Mahmûd ‘Abbâs pour le document des
prisonniers est peu fondé. En effet, ce document ne soutient pas
dans sa totalité la position mazénienne, et notamment pas en ce
qui concerne le chapitre consacré à la lutte armée, à laquelle
‘Abbâs est foncièrement opposé où que ce soit, alors que le
document préconise non pas d’y renoncer totalement, mais de la
circonscrire aux territoires palestiniens occupés en 1967.
De même, ‘Abbâs ne passe pas pour respecter
la volonté populaire ; la meilleure preuve en la matière étant
le fait qu’il est le père idéologique des accords d’Oslo,
lesquels ont été signés nuitamment, dans le dos du peuple
palestinien, et même à l’insu de l’OLP – cette OLP dont Abû
Mâzen semble soudain se rappeler qu’elle existe uniquement parce
qu’il en a besoin pour affaiblir le gouvernement Hamâs récemment
(et démocratiquement) élu…
En face, l’opposition du Hamâs à ce que ce
document soit soumis au référendum populaire n’est pas non plus
entièrement convaincante.
Certes, les objections du Hamâs ne sont pas dépourvues
d’une certaine logique, notamment en ce qui concerne A) les deux
chapitres relatifs à la reconnaissance de l’OLP – sous sa forme
actuelle – comme unique représentant légitime du peuple
palestinien [sous sa forme actuelle, soit avant sa réforme, telle
que prévue par les accords signés au Caire en mars 2005, en tenant
compte de la nouvelle configuration des forces sur le terrain…] et
B) le fait de prendre les décisions de la légalité internationale
comme fondement de la solution politique [cette légalité
internationale qu’Israël ne reconnaît même pas…] Mais le
rejet du référendum [par le Hamâs] en tant que processus, par
principe, voilà qui est difficile à digérer. En particulier,
parce qu’au cas où ce référendum aurait lieu, il pourrait éventuellement
permettre au Hamâs de sortir de l’impasse bien réelle où il se
trouve actuellement, du fait du blocus tant interne qu’extérieur
imposé à son gouvernement et à la population qui le soutient,
sans que ce gouvernement soit nécessairement contraint à faire des
concessions essentielles en matière idéologique.
Voilà pour le tableau général. Mais, dans le
détail, d’autres éléments entrent en jeu. La première chose
dont il faut tenir ici le plus grand compte, c’est le fait que la
jalousie de ‘Abbas et de son entourage est parfaitement déplacée
et que l’invocation de la sainteté et de l’exemplarité
symbolique des « prisonniers », dont ils se prévalent
actuellement, est particulièrement discutable, d’autant plus que
les accords d’Oslo – qui ont donné le jour à l’Autorité
palestinienne – ont négligé la cause de la plupart desdits
prisonniers, au profit de quelques centaines d’entre eux
seulement, affidés au courant « osloïste » au sein du
Fath, ce à quoi s’ajoute le fait que l’Autorité à direction
fathaouie, durant la période préélectorale de 2006, était elle-même
compromise, en particulier dans le dossier… des prisonniers.
Si ce que je dis n’est pas vrai, alors ayez
l’amabilité de me dire qui a vendu la cellule de Sourif à
l’occupant israélien, en 1996 ? Qui a vendu le commandant
Fu’âd al-Shawbakiyy, conseiller de feu le président Yâsir Arafât ?
Et qui a livré le secrétaire général du FPLP, Ahmad Sa’adât
à l’incarcération sous supervision internationale à Jéricho,
en attendant que l’Etat juif ne l’exfiltre pour l’incarcérer
dans ses propres geôles, voici quelques mois de cela ?
De même, ‘Abbâs est opposé à toute forme
de résistance armée, que ce soit dans les territoires occupés en
1948 ou dans les territoires occupés en 1967, alors que le document
des prisonniers préconise de circonscrire la résistance à la
Cisjordanie et à la bande de Gaza. Autant dire que ce document
adopte le contre-pied total de la position de Abbâs, en la matière.
Par conséquent, son adoption par ‘Abbâs ne doit rien à
l’intime conviction de celui-ci…Il y a donc autre chose…
Quelque chose de pas très net…
Mais
quel est donc le but de ‘Abbâs, en adoptant ce document ?
Il y a un objectif proclamé – et prétendu.
Et puis il y a un objectif caché, et tu. Le but proclamé – et prétendu
–, c’est la volonté de sauver le peuple palestinien, en lui
permettant d’échapper au blocus étouffant dans lequel il est
enserré depuis qu’il a élu le mouvement Hamâs, en lui remettant
(théoriquement) le pouvoir. Cela, au prétexte que le Hamâs
refuserait de se conformer aux exigences et aux deux légitimismes,
tant arabe qu’international.
Quant à l’objectif caché… : il
s’agit de rien moins que de la cassation de la victoire électorale
du Hamâs, au moyen de la mobilisation des « ventres vides »
contre ce mouvement. En pratique, ‘Abbâs peut faire chuter le
gouvernement Hamâs. Mais il est dans l’incapacité de dissoudre
un Conseil législatif palestinien largement dominé par ce
mouvement. Ceci signifie que la chute provoquée du gouvernement
palestinien créerait immanquablement un vide de pouvoir dont les
conséquences pourraient s’avérer catastrophiques, pouvant
prendre la forme d’une guerre civile. Par conséquent, rien n’était
plus intelligent, comme démarche, que de soumettre au peuple
palestinien le document des prisonniers, signé par des symboles
représentatifs des prisonniers des mouvements : Fath, Hamâs,
Jihâd islamique, FPLP et FDLP.
En cela, ‘Abbâs gagne sur les deux tableaux :
si le peuple entérine ce document et que le Hamâs persiste à le
rejeter, il pourra provoquer des élections présidentielles et législatives
anticipées. Si, en revanche, le Hamâs entérine les résultats et
l’esprit du référendum, en en devenant partie prenante et en se
départant, de ce fait même, de son idéologie propre, la scission
au sein du Hamâs n’est plus qu’une question de temps (au cas où
elle ne se serait pas produite immédiatement…)
Bien entendu, le danger, dans ce cas, ce serait
que ‘Abbâs perde le référendum ; ce qui est peu probable,
dès lors que les électeurs palestiniens seront affamés et sans un
sou vaillant en poche. Mais si ‘Abbâs perd vraiment le référendum,
il devra démissionner de la présidence de l’Autorité
palestinienne et il y aura de nouvelles élections présidentielles,
que le Fath peut éventuellement perdre. Dès lors se profilent des
risques de guerre civile encore plus importants, car le Fath
n’accepterait pas que son rôle s’achève de la sorte, lui qui
exerce une hégémonie totale sur les services de sécurité, et qui
bénéficie d’un soutien américano-israélo-arabe auquel il doit
absolument tout. Même au cas où ‘Abbâs remporterait le référendum
et convoquerait des élections présidentielles et législatives
anticipées – encore une fois, répétons-le, parce qu’il ne détient
pas le droit de dissoudre sans autre forme de procès le conseil législatif
– il peut perdre à nouveau ces élections, d’autant que les
sondages d’opinion indiquent que la popularité du Hamâs s’est
accrue durant le blocus, tandis que celle du Fath s’effondrait.
D’autres sondages, en revanche, indiquent le contraire, si bien
que la photo est floue et nébuleuse. La défaite du Fath lors de
nouvelles élections signifierait une guerre civile, que déclencheraient
des activistes du Fath redoutant de perdre leurs prérogatives.
Du côté Hamas, maintenant : son problème
semble plus complexe. En effet, un de ses symboles à l’intérieur
du mouvement des prisonniers, le shaykh ‘Abd-al-Khâliq An-Natchéh,
a apposé son seing au document des prisonniers. Il est vrai que le
mouvement des prisonniers, à l’intérieur du Hamas, a nié que ce
document le représentât. Et son désaccord est fondé sur le fait
que le document a eu pour origine une seule prison [israélienne],
à savoir celle de Hadarim. Mais dans la pratique, le Hamâs ne
s’en tire pas sans dommage, et il ne pourra pas facilement
s’exonérer de la signature d’un de ses symboles, même si
celui-ci s’évertue à expliciter sa position afin de réduire la
gêne dans laquelle il a placé son mouvement.
C’est en pratique ce qu’An-Natchéh a fait,
mais son communiqué rectificatif, publié conjointement au shaykh
Bassâm as-Sa’diyy, le représentant du Jihâd islamique, n’est
pas allé jusqu’à fustiger le document des prisonniers ni a
fortiori à le renier : il s’est contenté de condamner
l’utilisation qui en a été faite, à savoir le chantage, de la
part du Fath, et de dénoncer le fait qu’il soit considéré comme
un document intangible et un projet global au-dessus de toute
critique. Le deuxième sujet de gêne, pour le Hamâs, dans la
question du document des prisonniers, c’est que le Fath, non sans
faire preuve d’une intelligence à laquelle nous rendons
volontiers hommage, a eu recours à la mobilisation d’un argument
que le Hamâs avait constamment utilisé à son encontre. En effet,
le Hamâs appelait depuis très longtemps à ce que les accords d’Oslo
et tous les autres accords, quelle qu’en soit la nature, soient
soumis à référendum populaire. Ainsi, le Docteur Mûsâ ‘Abû
Marzûq avait fait allusion, dans son initiative de 1994, puis en
tant que directeur du bureau politique de ce mouvement, à l’idée
de procéder à un référendum populaire sur la nature de la
solution [du conflit israélo-palestinien], sans préciser s’il
s’agissait de la solution provisoire ou de la solution définitive.
Et, il y a de cela quelques mois, le ministre palestinien des
Affaires étrangères et leader du Hamâs, le Docteur Mahmûd
az-Zahhâr, évoquait la possibilité que toute solution proposée
soit soumise à référendum. Il est vrai que le Hamâs faisait
allusion, dans certaines de ses déclarations, à un référendum
populaire palestinien au cours duquel s’exprimeraient les
Palestiniens, quel que soit leur lieu de résidence, c’est-à-dire
pas seulement ceux vivant en Cisjordanie et dans la bande de Gaza.
Mais le mouvement n’a pas fait preuve de clarté et de détermination
dans l’explicitation du fait que ce que l’on visait, avec cette
idée de référendum, c’était de contourner sa victoire électorale,
ou encore de provoquer un « coup d’Etat à blanc »
contre la volonté du peuple des territoires occupés en 1967. Le
« on » étant bien entendu le Fath, qui a dû ravaler
son amère défaite électorale, ayant été incapable de renverser
le Hamâs en utilisant à cette fin la présidence [de l’Autorité]
palestinienne et même des pressions arabes, israéliennes et
internationales, en particulier américaines. Ainsi, au lieu de se
servir de cette question comme d’un point d’appui pour repousser
les tentatives de ‘Abbâs et du Fath pour le dépouiller de sa
victoire électorale, le Hamâs a eu recours à de timides
allusions, tout en se couvrant de ridicule par ses supplications à
indécentes adressées à ‘Abbâs afin qu’il accorde un délai
supplémentaire au dialogue national, qu’il ne le conditionne pas
par un délai à ne pas dépasser et qu’il renonce même carrément
à sa menace de procéder à un référendum. Et cela – comble de
paradoxe – alors même que le Hamâs insiste sur le fait que le
Fath n’a pas le droit, juridiquement, de procéder à un
quelconque référendum !
L’idée de référendum, en dépit du fait
qu’il s’agit en l’occurrence du recours à un procédé de
droit à des fins illégales, pourrait servir l’intérêt général
pour peu qu’on l’utilise à bon escient et que l’on se mette
d’accord sur son essence, ses modalités et ses finalités. De même,
cette idée peut s’avérer catastrophique pour la cause
palestinienne, si se perpétue la logique des décisions prises
individuellement et sans concertation et des règlements de comptes
politiques, qui président bel et bien à sa mise en oeuvre jusqu’à
présent.
Nier que le peuple palestinien vive un état de
siège inique et mortel après la victoire électorale du Hamâs
reviendrait tout simplement à se cacher la tête dans le sable. De
même, soutenir que l’enthousiasme de ‘Abbâs et du Fath pour le
référendum découleraient uniquement de leur attachement aux intérêts
du peuple palestinien serait pure hypocrisie et pure tromperie, sans
aucun fondement dans la réalité. Pour mettre réellement le référendum
au service du peuple, il faut avant tout un accord entre la présidence
et le gouvernement, et un accord entre le Hamâs et le Fath, en
priorité, et toutes les autres formations ultérieurement, portant
sur le mécanisme et les moyens d’y procéder, ainsi que sur les
modalités dont il sera proposé à la rue palestinienne.
En effet, la Loi fondamentale de l’Autorité
nationale palestinienne ne dit explicitement rien au sujet des prérogatives
présidentielles en matière de référendum général. Mais la
politologue palestinienne Rûlâ Sarhân va plus loin, dans une étude
qu’elle a réalisée, portant sur la légalité du référendum
dans le cas palestinien. Pour cet auteur , « la Loi
fondamentale palestinienne ne comporte aucun texte relatif à la
possibilité d’effectuer ou de recourir à référendum général
pour un pouvoir quel qu’il soit » et donc, sur cette base,
l’appel du président ‘Abbâs à référendum était un appel
illégal, car contrevenant à la Loi fondamentale (c’est-à-dire
à la Constitution palestinienne provisoire), précisément à son
article 38, qui dit : « Le président de l’Autorité
nationale exerce ses missions exécutives conformément aux
indications données par la présente loi ». Mme Sarhân
considère que pour « aplanir le problème posé par
l’inconstitutionnalité du référendum, il est impératif de
modifier la Loi fondamentale en y intégrant un article ad hoc, et
en élargissant les prérogatives présidentielles, ou celles de
l’instance habilitée à convoquer un référendum, lui permettant
d’y procéder ». Ceci étant, le Hamâs et le gouvernement
sont fondés à en mettre en doute la légalité du référendum et
ils peuvent même le faire interdire par un vote du Conseil législatif
(dominé par le Hamâs) et fondé à modifier la Loi fondamentale de
l’Autorité, et il n’y a pas de solution autre qu’une entente
entre les deux institutions et les deux mouvements [le gouvernement
et la présidence ; le Fath et le Hamâs], si l’on veut que
le référendum soit légal et qu’il soit effectué avec succès.
Si cela est acquis, alors le Hamâs, et son gouvernement élu
disposeront d’un rôle effectif dans le retournement total de ce référendum
et dans l’empêchement que le Président et le Fath n’en fassent
leur chose. Mais il y a en cela, aussi, un intérêt pour le Fath et
pour ‘Abbâs : celui de leur éviter de faire entrer la scène
politique palestinienne dans le tunnel de l’inconnu, dont la fin
risquerait fort d’être une guerre civile aux flammes desquelles
ils ne tarderaient pas à se brûler eux-mêmes les ailes.
Deuxième chose : le document des
prisonnier mentionne ouvertement l’engagement à respecter les décisions
de l’accord du Caire [conclu en mars 2005], sous l’empire duquel
il a été convenu, entre autres choses, de « redéployer et
dynamiser l’Organisation de Libération de la Palestine – OLP
– et d’y inclure les deux mouvements Hamâs et Jihâd islamique,
en sa qualité d’unique représentant légitime du peuple
palestinien quel que soit son lieu de résidence, en conformité
avec les changements intervenus dans l’arène palestinienne et en
application des principes démocratiques, et afin de consacrer la véridicité
de la représentativité de l’OLP en tant qu’unique représentant
légitime de notre peuple, de manière à renforcer la capacité de
l’OLP à faire face à ses responsabilité dans la direction de
notre peuple, dans la patrie et dans l’exil, à le mobiliser et à
défendre ses droits nationaux, politiques et humains dans les
divers cercles, les diverses instances et les divers domaines
internationaux et régionaux » [le document des prisonniers].
Or il s’agit là de l’article que le Fath a supprimé, donnant
ce faisant un prétexte au Hamâs et au Jihâd islamique, à bon
droit, pour ne pas reconnaître des instances et des prérogatives
de l’OLP devenues désuètes. Si le peuple vote « oui »
au référendum, en adoptant le document des prisonniers, il votera
du même coup en faveur de la réforme de l’OLP et en faveur de
l’entrée du Hamâs, précisément, en tant que grande force
effective, dans ses institutions, chose qui ne pourra qu’affaiblir
l’hégémonie du Fath à l’intérieur de l’OLP, sa domination
sur l’Autorité ayant déjà été affaiblie. Cela donne à n’en
pas douter au Hamâs un fort argument pour modifier du tout au tout
l’organisation du référendum, sa tenue nécessitant la réorganisation
de l’OLP sur la base des rapports de force actuels. En effet, il
ne serait pas logique que quelqu’un comme Yâsir ‘Abd Rabboh,
qui ne dispose d’aucune aura, d’aucun poids populaire, ni
d’aucune représentativité, soit un élément décisif dans
l’orientation, à l’intérieur des cadres de l’OLP, de ce référendum,
au moment même où deux mouvements de l’importance du Hamâs et
du Jihâd seraient laissés en-dehors, en dépit de leurs larges
masses, qui représentent manifestement la majorité. C’est
pourquoi il est indispensable de commencer par réformer l’OLP,
afin qu’elle devienne réellement l’unique représentant légitime
du peuple palestinien, comme l’indique le document soumis à référendum.
Puis, dans une deuxième étape, il est procédé au référendum,
sous l’égide dudit représentant légitime, unique et effectif du
peuple palestinien. Il est en effet impensable que le Fath et que
l’institution présidentielle adhèrent à une partie du document
et pensent en fonction d’une autre. Dès lors, le référendum
prendra un sens, une forme, une essence et des objectifs autres.
En résumé, le refus du référendum par le
Hamas, par pétition de principe, est une erreur, et l’insistance
du Fath sur ce référendum, sans avoir préparé le terrain
favorable ni les conditions indispensables à son succès et à ce
qu’il porte des fruits est des plus douteuses. Il n’y a de
solution que dans un accord entre les deux plus grandes formations
et entre les deux institutions de la présidence et du gouvernement.
Sinon, nous avancerons en direction du gouffre. Enfin, une dernière
chose : tout référendum auprès des Palestiniens de
Cisjordanie et de la bande de Gaza doit être très clair sur le
fait qu’il ne représente que les habitants de la Cisjordanie et
de la bande de Gaza, et qu’ils n’ont pas le droit de formuler
des jugements en ce qui concerne le droit au retour ni les droits
des Palestiniens de la diaspora ni les autres droits historiques
intangibles de ce peuple, considéré dans son ensemble. C’est là
encore un point dont le Hamâs pourrait profiter s’il sait jouer
le jeu du référendum de manière correcte et intelligente, s’il
participe à sa mise en place et à son déroulement, et si il le
relie à la réforme de l’OLP, en préalable. Sinon, il pourra
affirmer que ce référendum est illégal et qu’il ne l’engage
en rien. Si nous supposons que le résultat est effectivement en
faveur de la position de ‘Abbâs et du Fath, alors, et conformément
au document des prisonniers, ce succès devra être suivi de la
constitution d’un gouvernement d’union nationale, au sens où le
Fath est tenu à associer le Hamâs au gouvernement, (non pour
convoquer de nouvelles élections), et si le Fath refuse alors de
faire entrer le Hamâs dans le gouvernement, le référendum sera déclaré
nul et non advenu. Et même si le Hamâs participe effectivement au
gouvernement, le gouvernement Hamâs n’est pas tenu de faire siens
les résultats du référendum, mais il respecte la volonté de la
majorité, simplement en ne l’entérinant ni du point de vue
organisationnel, ni du point de vue idéologique, ainsi, son
gouvernement peut continuer son action sans en tenir compte. Mais le
Fath prendra-t-il effectivement le risque d’associer le Hamâs à
un gouvernement d’union nationale, en provoquant ainsi la colère
de ses deux alliés américain et israélien ? Autrement dit,
le référendum n’est pas globalement dans l’intérêt du Fath,
si le Hamâs sait jouer finement, en se départant de cette billevesée
qu’est la « morale en politique » et s’il renvoie la
balle dans la zone de penalty du Fath et de la présidence.
L’implication du Fath, le fait de le « mouiller »,
grâce à un jeu complexe et subtil, est dans l’intérêt du
peuple palestinien et de la cause palestinienne, même si ce jeu
n’est pas, transitoirement, dans l’intérêt du Hamâs en tant
qu’organisation. Mais l’intérêt du peuple est prioritaire. Et,
dans tous les cas de figure, une décision venant du gouvernement
Hamâs [démocratiquement] élu, ce n’est pas la même chose
qu’une décision du Hamâs, en tant que mouvement.
[M. ‘Usâmah ‘Abû ‘Arshîd, écrivain et
analyste politique, réside à Washington.]
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