P.A.S.
Les enjeux de la bataille d’Alep
Yahia Gouasmi
Mercredi 1er juin 2016
Deuxième ville et capitale
économique de la Syrie, située à
l’extrémité nord-ouest du pays, Alep est
aujourd’hui le principal champ de
bataille, où s’affrontent presque tous
les acteurs de la crise syrienne.
La bataille d’Alep revêt une
importance stratégique et politique
capitale, car la partie qui l’emportera
aura, d’une certaine manière, gagné la
guerre de Syrie, opposant les forces
occidentalo-sionistes à « l’axe de la
résistance », et pourra s’assoir à la
table des négociations en position de
force.
De rudes combats se poursuivent dans
la ville, après la violation de l’accord
de cessez-le-feu par les groupes
terroristes, et les forces
gouvernementales ont lancé une offensive
pour encercler entièrement et prendre le
contrôle complet de la partie
occidentale de la ville, qui est aux
mains des takfiristes.
Les combats font rage sur
plusieurs fronts : armée et milices
loyalistes syriennes, Daesh, Al-Nosra,
ainsi que les autres groupes
djihadistes, ASL (Armée Syrienne
Libre) et les Kurdes.
Épaulées par des frappes aériennes
russes et des combattants iraniens et
libanais au sol, les forces loyalistes
syriennes ont pu regagner de larges
portions de territoire à l’intérieur et
autour de la ville dont ils contrôlent
désormais environ 60%.
La bataille actuelle
d’Alep marque ainsi un tournant
décisif dans le conflit syrien, en
renversant progressivement
l’équilibre des forces militaires
dans cette grande ville en faveur du
gouvernement légitime.
Parmi les importantes percées de
l’armée à Alep : parvenir à couper la
route Alep-Bab Al-Salam qui mène à la
frontière turque, la principale voie de
ravitaillement des djihadistes,
notamment du Front Al-Nosra et d’Ahrar
Al-Cham, et briser le siège de Nubul et
Zahraa, deux villes sous contrôle des
forces terroristes depuis trois ans. Les
combats de l’armée syrienne se
concentrent aujourd’hui dans le quartier
de Cheikh Maqsoud, au nord de la ville
d’Alep, qui est d’une importance
stratégique, car c’est par là que passe
l’autoroute Castello considérée comme le
dernier axe de ravitaillement permettant
de rejoindre la Turquie et la région d’Edlib
depuis Alep.
L’armée loyaliste pourrait conserver
son avancée militaire dans la ville et
sa portion la plus large pour deux
causes principales : d’un côté, les
forces gouvernementales sont une seule
entité cohérente face à une mosaïque de
groupes armés qui sont de plus en plus
divisés entre eux et entrent souvent en
conflit. De l’autre côté, les lignes
d’approvisionnement pour ces groupes,
que ce soit en provenance d’Iraq ou de
la frontière turque, sont de plus en
plus contrôlées par Damas.
L’enjeu de la bataille d’Alep est
considérable, car si celle-ci ne va pas
résoudre complètement le conflit qui
ravage la Syrie depuis cinq ans, elle va
contribuer largement à redéfinir le
poids et la nature de l’hégémonie
politique sur le terrain de chaque
protagoniste.
En d’autres termes, la
bataille d’Alep est le pendant
militaire de l’action politique des
négociations visant à reconstruire
l’État syrien.
Ainsi, du point de vue géographique,
la force qui va dominer totalement Alep
est celle qui aura la portion la plus
large dans la carte de la nouvelle Syrie
que les grandes puissances visent à
redessiner au détriment du peuple
syrien.
Le Président syrien Bachar al-Assad a
d’ailleurs encore insisté récemment sur
la nécessité de restituer la
souveraineté de la totalité d’Alep,
preuve que reprendre toute la ville est
en fait un enjeu stratégique majeur. En
effet, en cas de victoire, le
gouvernement syrien pourrait renforcer
son contrôle sur une grande partie de
« la Syrie utile», concept élaboré par
Bachar et qui désigne particulièrement
la ligne sud/nord qui s’étend de Damas à
Alep, sachant que les forces loyalistes
contrôlent déjà les grands centres
urbains de Damas, de Homs et d’Hama. Par
ailleurs, la chute d’Alep serait
également une grande défaite des groupes
terroristes, téléguidés par Washington
et Tel-Aviv, et soutenus directement par
Riyad et Ankara.
En effet, la victoire du régime
légitime syrien dans cette bataille
stratégique serait une grande défaite
pour la Turquie, puisqu’Alep est à la
fois le point d’entrée principal de
ravitaillement turc pour les factions
auxquelles elle apporte soutien ainsi
que le point faible par lequel ces
factions peuvent cibler la zone
extrêmement fortifiée du régime légitime
syrien, notamment à Lattaquié. C’est
pour cette raison qu’Ankara, dès le
début de la bataille d’Alep a souhaité
intervenir directement sur le terrain,
ambition se heurtant à un ferme refus
américano-russe.
Autre signe de l’importance majeure
de cette bataille, les déclarations, fin
avril, du ministre français des Affaires
étrangères, Jean-Marc Ayrault, qui
affirmait alors :
« L’annonce par le régime
syrien le 28 avril d’une offensive
imminente pour reprendre Alep avec
le soutien de ses alliés, est très
préoccupante. »
Ainsi, la question d’Alep ne
se joue plus au niveau local, mais aux
niveaux régional et international, M.
Ayrault n’étant que le porte-voix du
quatuor régional «
turco-israélo-saoudo-qatari » sous
parrainage américain.
Les États-Unis sont prêts à
faire tout ce qu’il faut pour empêcher
le gouvernement légitime syrien de se
renforcer, car si les troupes loyalistes
obtenaient une victoire militaire dans
la région d’Alep, environ 90 % du
territoire syrien serait alors sous leur
contrôle. Cela signifierait une défaite
cinglante pour l’USraël et ses alliés
occidentaux, ainsi que ses vassaux
qataris, saoudiens et turcs.
Le Parti Anti Sioniste
n’a aucun doute quant à la capacité
des forces loyalistes syriennes et
de la résistance à reprendre le
contrôle de la ville d’Alep, ce qui
signifierait l’échec du complot
américano-sioniste visant à
soumettre la Syrie.
Néanmoins, le prix à
payer est lourd pour le peuple
syrien innocent, et les responsables
de ce conflit meurtrier seront jugés
par l’histoire.
Yahia Gouasmi
Président du Parti Anti Sioniste
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