Opinion
L’horreur à Bruxelles et les erreurs de
l’Europe
Soraya Helou
Samedi 26 mars 2016
En frappant Bruxelles d’une façon aussi
atroce, les terroristes de «Daech» n’ont
pas seulement visé une capitale
européenne, celle de la Belgique, ils
ont surtout attaqué la capitale de
l’Union européenne et à travers elle
tous les pays d’Europe. Une fois le choc
passé, l’enquête, disent les médias
français et belges, avance à grand pas
et montre un lien entre les attentats du
13 novembre 2015 à Paris et
l’arrestation de Salah Abdelsalam il y a
quelques jours dans le quartier de
Molenbeck. Cet homme est accusé d’être
le cerveau des attentats de Paris et il
constitue donc une grande prise pour la
police belge qui compte l’extrader en
France. Mais si le lien entre son
arrestation et les attentats du 22 mars
à Bruxelles est vérifié cela signifie
que les terroristes ont la capacité de
réagir rapidement et de frapper
simultanément ou presque quatre fois au
cœur de la capitale belge, près du
quartier européen l’un des plus sélects
de la ville ainsi que l’aéroport
international qui constitue une plaque
tournante vers les autres pays européens
et vers l’Afrique. Indépendamment du
traumatisme causé chez les habitants et
l’ensemble des populations européennes,
le coup est dur pour la police belge
mais aussi pour toutes les polices
d’Europe. Les dirigeants politiques
belges ont eu beau affirmer que les
attaques étaient prévisibles, surtout
après celles qui avaient visé Paris, les
médias ne sont pas avares en critiques
pour incompétence, manque de
coordination et vigilance. Les analystes
et autres experts en terrorisme se
succèdent sur les chaînes de télévision
européennes et insistent sur les
rapports étranges existant entre les
milieux radicaux et les mafias des
trafiquants de drogue (pour protéger le
trafic de drogue, il faut des armes et
pour les porter il faut des voyous
disent les analystes qui sont rapidement
récupérés par les milieux extrémistes),
la population elle ne voit qu’une chose,
c’est qu’elle a désormais peur et elle
ne se sent plus en sécurité dans sa
démocratie européenne.
En réalité, les terroristes
ont réussi leur coup macabre en
parvenant à semer le doute et l’angoisse
dans les sociétés occidentales et en
montrant la fragilité d’un système que
les dirigeants européens croyaient
infaillible. La Belgique est ainsi
considérée comme le premier pays
européen à envoyer des extrémistes en
Syrie depuis le début de la guerre. Au
point que certains pensaient que ces
extrémistes étaient encouragés à quitter
le sol belge pour aller combattre en
Syrie, dans l’espoir qu’ils soient tués
sur place ou qu’ils restent en Syrie,
comme cela le pays sera débarrassé d’eux
à moindres frais. Mais les calculs
belges se sont avérés faux et de
nombreux extrémistes sont rentrés en
Europe et notamment en Belgique, prêts à
semer la terreur dans les pays qui les
ont accueillis. Les attentats de
Bruxelles montrent ainsi que la branche
extérieure de «Daech» est désormais bien
implantée dans les pays européens et
peut agir rapidement et à grande
échelle. Elle a les effectifs, les
moyens et les cibles toutes prêtes,
puisqu’il s’agit de faire le plus de mal
possible en attaquant le plus grand
nombre de civils. Elle a en plus
l’audace et la détermination, ainsi
qu’une haine immense envers tout ce qui
ne lui ressemble pas. Bref, les facteurs
nécessaires pour agir sans complexes et
sans le moindre remords. De plus, les
démocraties européennes ne permettent
pas une lutte radicale contre cette
mouvance avec les freins posés par les
associations des droits de l’homme,
ainsi que le respect de la diversité
religieuse et ethnique, sans parler
d’une certaine ignorance du mode de
fonctionnement des milieux extrémistes.
Cette méconnaissance est
due au fait que depuis des années, les
dirigeants européens ont essentiellement
compté sur la coopération entre leurs
services de renseignements et ceux des
pays du Moyen Orient pour démanteler les
réseaux potentiels, les filières
terroristes et neutraliser les
extrémistes. Mais depuis que l’Occident
a décidé de mener la guerre aux Etats en
place pour les remplacer par un pouvoir
proche des Frères musulmans, la
coopération entre leurs services et ceux
des régimes brusquement jugés
dictatoriaux a été rompue. Les services
de renseignements européens se sont donc
retrouvés totalement ignorants de ce qui
se passe dans les mouvances extrémistes,
ayant renoncé à faire des infiltrations
par des agents au profit de
l’utilisation massive des moyens
technologiques modernes. Mais ce que ces
services de renseignements n’ont pas
compris c’est que les cellules radicales
et terroristes savent aussi utiliser les
moyens technologiques. Ce qui leur a
permis d’ailleurs de se développer avec
une telle rapidité dans les sociétés
occidentales. Ces cellules connaissent
aussi parfaitement les failles dans les
systèmes européens et les utilisent à
fond. Il ne s’agit donc pas d’une vague
éphémère et désorganisée, mais d’une
véritable réseau tentaculaire bien
implanté en Occident et qui sait comment
le frapper pour le faire douter de
lui-même et de la justesse de ses
valeurs. A la place de l’ouverture, du
dialogue, de l’acceptation de l’autre et
des valeurs de tolérance, «Daech» prône
la haine, le rejet, la violence et les
sociétés homogènes bâties sur des
convictions radicales qui n’ont d’autre
objectif que de détruire tout ce qui ne
leur ressemble pas. Déjà, dans les
sociétés européennes, des voix s’élèvent
pour plaider en faveur d’un repli sur
soi et du refus de la diversité.
L’Europe est donc réellement menacée par
«Daech» et ses semblables mais elle ne
peut pas lutter seule contre ce danger.
Elle a besoin non seulement de l’aide
des autres puissances mais aussi des
pays de la région, notamment de la
Syrie, une Syrie stabilisée et laïque.
Mais c’est sans doute trop demander aux
Européens qui, malheureusement n‘en
finissent pas de recevoir les
coups durs et atroces, sans se décider à
reconnaître qu’ils ont eu tout faux au
Moyen orient depuis au moins 5 ans.
Source :
French.alahednews
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