Alahed
La troisième Intifada a éclaté à al-Qods
Samer R. Zoughaib
Photo:
D.R.
Dimanche 2 novembre 2014
Les médias
occidentaux osent à peine prononcer le
mot, les «Israéliens» le nient
obstinément, les Arabes l’ignorent, mais
les faits sont là: la troisième intifada
palestinienne, celle d’al-Qods, a déjà
commencé.
Plus un jour ne passe à al-Qods sans que
les Palestiniens ne sortent dans les
rues pour affronter la police, l’armée,
les colons et les militants de
l’extrême-droite «israélienne». Les
incidents se comptent par dizaines, ces
dernières semaines, et pourtant, les
médias du monde entier s’abstiennent
d’accorder à ces événements l’importance
qu’ils méritent. Il est cependant clair,
aux yeux des analystes et des
observateurs honnêtes, que les habitants
arabes de la ville sainte, soumis à des
persécutions et des vexations
quotidiennes de la part de l’occupant
«israélien», ont décidé de prendre en
main leur destinée.
Bien que le calme soit revenu à Gaza et
en Cisjordanie depuis le cessez-le-feu
conclu fin août, les affrontements se
poursuivent à al-Qods. Le durcissement
de la répression «israélienne» et les
nombreuses restrictions et mesures de
rétorsion prises par les autorités
d’occupation n’ont pas brisé le moral et
la détermination des «qodsiotes» à
défendre leur ville et leurs lieux
saints. Et cette résistance est en train
de prendre des formes diverses, allant
des manifestations de jeunes, aux
attaques contre les symboles de
l’occupation, et, tout récemment, le
recours à la lutte armée.
Un rabbin extrémiste blessé
Mercredi soir, des inconnus circulant à
motos ont tiré contre un militant
d’extrême-droite, Yéhuda Glick, qui a
été grièvement blessé, dans une rue de
la partie Est d’al-Qods. Agé d'une
cinquantaine d'années, ce rabbin dirige
depuis longtemps les tentatives
d’occupation de l'esplanade des
Mosquées, troisième lieu saint de
l'Islam, que les juifs extrémistes
appellent le «Mont du Temple».
Quelques heures plus tard, la police
«israélienne» a annoncé avoir abattu un
Palestinien soupçonné d'être l’auteur de
l’attentat contre Yéhuda Glick. Il
s’agit de l’ancien détenu
palestinien Mou’taz Hijazi, membre du
Jihad islamique en Palestine, qui a
passé onze années derrière les barreaux
des prisons sionistes. La version
«israélienne» est cependant contestée
par les observateurs, surtout que Hijazi
a été abattu à l’aube à son domicile,
alors qu’il se défendait contre des
policiers qui venaient l’arrêter. Est-il
possible que l’auteur d’un attentat,
commis quelques heures plus tôt, aille
tranquillement passer la nuit dans son
lit?
Après ces incidents les forces
d’occupation ont interdit d’accès,
«jusqu'à nouvel ordre», l'esplanade des
Mosquées aux visiteurs et aux fidèles
musulmans. Cette mesure a provoqué une
forte tension dans la ville et des
dizaines d’habitants d’al-Qods, qui
passent la nuit sur les lieux saints
pour les protéger (les mourabitoun),
sont en état d’alerte, prêts à faire
face à toute tentative d’occupation de
l’esplanade.
Cette restriction s’ajoute aux
innombrables vexations qui sont infligés
aux Palestiniens. La semaine dernière,
les autorités «israéliennes» ont
interdit aux travailleurs palestiniens
de Cisjordanie d’emprunter, pour le
trajet du retour, les même bus que les
juifs. De nombreuses organisations des
droits de l’homme ont dénoncé une mesure
de ségrégation, présentée comme un
impératif de sécurité.
Multiplication des provocations
Mais le plus grave reste la politique de
relance de la colonisation d’al-Qods,
annoncée par le Premier ministre
Banyamin Netenyahu (construction de 1000
logements dans les quartiers arabes),
qui prend la forme de provocations
contre la population palestinienne, et
qui s’ajoute aux visites quotidiennes
des extrémistes juifs sur l’esplanade
des Mosquées.
Dans le même temps, l’appropriation de
maisons palestiniennes par des colons
dans le quartier arabe de Silwan se
poursuit de plus belle.
Cette annonce a provoqué la colère des
jeunes palestiniens, qui sont descendus
dans les rues dans plusieurs quartiers
pour affronter les policiers
«israéliens». Le Premier ministre
palestinien, Rami Hamdallah, s'est rendu
sur l'esplanade des Mosquées, où il a
été accueilli par une foule qui
scandaient: «En route pour al-Aqsa,
martyrs par millions.»
Ces événements sont les derniers d’une
série d’incidents qui se multiplient ces
dernières semaines. Depuis l’assassinat,
cet été, du jeune palestinien Mohammad
Abou Khdeir par des extrémistes juifs,
les rames du tramway, inauguré en 2011
pour relier les quartiers
Est et Ouest d’al-Qods sont la cible
quotidienne de jets de pierres et de
cocktails Molotov. Pour de nombreux
jeunes Palestiniens, cette ligne est
devenue le symbole d'une souveraineté
israélienne qu'il faut combattre quel
que soit le prix à payer.
Presque toutes les nuits, des jeunes
érigent des barricades dans des
quartiers arabes, livrent des batailles
rangées dans la vieille ville, attaquent
des «Israéliens».
Le durcissement de la répression n’a pas
réussi à briser le soulèvement.
L’arrestation, depuis juillet dernier,
de 800 de Palestiniens, n'a pas ramené
le calme dans les rues d’al-Qods.
Face à cette réalité, des journalistes
israéliens et des médias occidentaux
commencent à évoquer le mot «Intifada».
Pour Hamos Harel, du quotidien Haaretz,
«il n'y a pas d'autre choix que de
parler d'une intifada municipale qui
fait rage depuis l'été».
Des médias français, comme le quotidien
Le Monde et les hebdomadaires Le point
et L’Express n’hésitent plus à parler
d’intifada.
Connie Hackbarth, éditeur chez
Alternativnews, s’emploie à démontrer
que contrairement aux démentis
«israéliens» du caractère
insurrectionnel des événements d’al-Qods,
c’est bien à une nouvelle Intifada que
le monde est en train d’assister.
«Des affrontements ont éclaté tout au
long du week-end à Jérusalem-Est, alors
qu'un supplément de policiers israéliens
et de forces spéciales ont été déployés
dans la ville pour faire face à la
‘non-Intifada’», écrit-elle,
ironiquement.
La journaliste souligne que «des
dizaines de Palestiniens ont été blessés
ce week-end lors d'affrontements entre
les forces israéliennes et les
manifestants Palestiniens dans
différents endroits à travers
Jérusalem-Est.
Dès vendredi matin d'importantes forces
de la police israélienne et de la police
des frontières ont commencé à se
rassembler sur la ville sous ce que la
police a baptisé «Opération Gardiens des
murs».
Trois ballons de surveillance ont été
lancés au-dessus des quartiers de Ras al
Amud, Abou Dis et Beit Hanina, dans la
partie ouest de la ville. Des
affrontements ont également eu lieu dans
A Tur, Silwan, Issawiya et Wadi Joz tout
au long du week-end dernier.
Dimanche 26 octobre, Mahmoud Zahar, haut
responsable du Hamas, a déclaré que le
cycle constant de violence à Jérusalem
est une «intifada».
L’intifada d’al-Qods n’est plus un
soulèvement silencieux, comme le
souhaitaient les «Israéliens». Les
dirigeants et les médias arabes
continueront-ils à l’ignorer?
Source: french.alahednews
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