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La Crimée se sépare de l'Ukraine. Et
alors ?
Ron Paul
Ron Paul - Photo:
D.R.
Vendredi 21 mars 2014
Aux États-Unis, tout le monde
n’applaudit pas des deux mains aux
anathèmes lancés et aux menaces de
sanctions décrétées par Barack Obama
pour punir Moscou, après l’adhésion de
la République de Crimée à la Fédération
de Russie. Pour Ron Paul, figure de
proue de la non-ingérence et du parti
libertarien, les postures de matamore de
Barack Obama ne sont pas seulement
vaines, elles discréditent Washington.
Les habitants de
la Crimée viennent de prendre en
mains leur avenir en se prononçant
au suffrage universel sur les deux
options qui s’offraient à eux :
conserver le statut de région
autonome de l’Ukraine ou rejoindre
la Fédération de Russie. Ce faisant,
ils ont emboîté le pas à toute une
série de pays et de régions qui
cherchent à s’affranchir d’un État
dominateur qui les étouffe et qui
reste sourd à leurs revendications.
L’Écosse, la Catalogne et Venise se
sont récemment jointes à ce cortège.
On n’entend guère parler de ces
trois là qui mènent tranquillement
leur affaire alors que le vote
massif des habitants de la
République autonome de Crimée pour
le rattachement à la Fédération de
Russie a soulevé une tempête : les
dirigeants des États-Unis et de
l’Union européenne se sont répandus
en invectives et l’Otan s’est
approchée du déclenchement d’une
confrontation armée avec la Russie,
comme au plus fort de la Guerre
froide, une situation inédite depuis
lors.
Ceci vaut-il
cela ?
Ceux qui condamnent le vote
organisé par la Crimée pour décider
de son avenir se plaisent à
souligner l’illégalité du
référendum. Le droit à
l’auto-détermination des peuples est
pourtant l’un des principes
fondateurs du droit international.
L’article 1 de la
Charte des Nations unies stipule
clairement que la grande ambition de
l’Onu est de promouvoir des
relations de bon voisinage et
d’amitié entre les nations, fondées
sur l’égalité en droit et
l’auto-détermination des peuples.
Pourquoi les États-Unis se
préoccupent-ils de la couleur du
drapeau d’un territoire situé à des
milliers de kilomètres de leurs
frontières ?
Pour les détracteurs du
référendum, l’occupation de la
Crimée par les troupes russes est la
preuve indéniable qu’il était
impossible d’organiser un vote
équitable. Où donc étaient ces
esprits forts quand l’élection
organisée sur le territoire de
l’Irak, tout entier soumis à
l’occupation militaire des États
Unis, était saluée comme le
« triomphe de la démocratie » ?
Les dirigeants états-uniens qui
ont cru devoir soutenir le
renversement anticonstitutionnel du
gouvernement ukrainien feraient
peut-être bien de réviser les leçons
apprises sur le banc de l’école :
cela leur permettrait de redécouvrir
que la Constitution états-unienne
interdit formellement à nôtre
gouvernement de renverser des
gouvernements étrangers ou encore de
prendre un milliard de dollars aux
contribuables pour rembourser les
dettes contractées par l’Ukraine
auprès de ses créanciers
internationaux.
L’administration Obama a décidé
d’appliquer des sanctions limitées à
un groupe restreint de personnalités
officielles de la Fédération de
Russie et de la République de
Crimée [1].
Il n’en reste pas moins que ni les
États Unis, ni l’Union Européenne ne
peuvent se permettre de prendre de
réelles sanctions contre la Russie.
Les bienfaits tirés de la
globalisation des échanges
commerciaux sont trop importants
pour chacune des deux parties pour
que soit pris le risque d’en obérer
l’avenir.
On vient d’ailleurs d’assister au
redressement des cours sur les
marchés internationaux, après
l’annonce que les sanctions
garderaient pour l’instant une
envergure très limitée. On sait
bien, dans ces milieux, que les
échanges et les accords économiques
internationaux sont le chemin le
plus sûr pour la paix et la
prospérité. Espérons que les
gouvernements auront la sagesse de
suivre cette voie.
[1]
“Blocking
Property of Additional Persons
Contributing to the Situation in Ukraine”,
by Barack Obama, Voltaire Network, 17
March 2014.
Traduction
Gérard Jeannesson
Source
USA Today (États-Unis)
Ron Paul est
un farouche défenseur des libertés
individuelles et un opposant résolu à la
politique d’ingérence des États-Unis
dans les affaires des autres États. Il
s’est notamment opposé aux bombardements
de la Serbie en 1999, aux interventions
armées en Irak en 2003, en Libye en
2011, et aux menaces d’intervention
contre la Syrie en 2012. Partisan du libertarianisme, Ron Paul préconise un
État fédéral au rôle limité, de faibles
impôts, des marchés libres, une
politique étrangère de non-ingérence, et
le retour à une politique monétaire
basée sur l’étalon or.
Homme politique états-unien. Il fut
représentant du Texas au Congrès de 1976
à 1985, puis de 1997 à 2013, et candidat
libertarien à l’élection présidentielle
de 2008.
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