Religion
Dans quel Islam somme-nous ?
Amar Djerrad
Vendredi 9 novembre 2018
La «charia» est une création des « foukaha »,
donc une législation faite par des
hommes selon leurs propres
interprétations du Coran à un moment
donné ! Par conséquent, il est un avis
religieux sujet à critique, à une autre
interprétation, à un autre avis ! Le
Prophète, en son temps, expliquait et
interprétait les versets au fur et à
mesure de leurs révélations, aux
croyants - dont les proches « sahabis »
- qui étaient majoritairement
analphabètes.
Durant la vie du prophète, il s’agissait
de «religion», mais après sa mort, il
est question d’avis religieux sujet à la
critique au fil des siècles !
La catastrophe des
musulmans, surtout chez les sunnites,
est d’avoir installé des «hommes
religieux» qui se sont imposés, à force
d’influence, comme détenant
l’interprétation incontestable ou
sujette à critique, au point de la
sacraliser «religion» en lieu et place
du Coran. Pourtant le Prophète lui-même
ne se considérait pas comme un
personnage sacré suivant le Coran qui
précise : «Dis : Je ne suis qu’un mortel
semblable à vous.»
En fait, tout s’est
joué durant les trois premiers siècles
(H) (dits el qouroun el moufadhala) avec
ses ’’chouyoukh’’ novateurs pour leur
époque ; après, ils ne sont plus que des
«traditionalistes» (el mouqalidine) qui
ne font que rabâcher et suivre les
anciens sans aucune innovation même onze
siècles après.
Toutes les
tentatives d’interprétation novatrice
depuis environ 150 ans - avec surtout
Mohamed Abdou qui y affirme «le rôle de
la raison comme guide de la vraie foi »
et son contemporain Jamal Al-Dîn
Al-Afghani en passant par Mohammed
Rachid Rida et Ali Abderraziq etc – sont
restés dérisoires, du fait d’une forte
opposition des «gardiens du Temple», au
point où il disait que «... Si quelqu'un
essayait d’éduquer la nation égyptienne
sans la religion, c’est comme si un
fermier essayait de planter une graine
dans un sol non fertile … ses efforts
seraient vains».
Nous sommes au
21ème siècle, soit 14 siècles plus tard,
et c’est les mêmes interprétations et
avis !
Les trois premiers siècles ont vu
différentes interprétations et avis
devenus «écoles» (madhahib) souvent
complémentaires et antagonistes.
Jusqu’à nos jours,
on accepte et adopte ces antagonismes
(voire contradiction avec le Coran)
comme une richesse ! Même notre langage
est altéré ! On anobli de «radhia allaou
ânhou» aussi bien le «sahabi» tueur de «sahabi»
que sa victime «sahabi»….par exemple !
Nous sommes,
aujourd’hui, devant deux «islam» celui
du Coran assez négligé et celui des
hadiths (majoritairement «faibles» voire
faux), que l’on a fait confondre avec la
sunna, qui est imposé à force de
propagande et de falsification allant
jusqu’à sacraliser la violence ; comme
ce concept de Califat inventé (après la
mort du Prophète) que nos islamo-salafo-wahabites
s’échinent à réinstaurer comme mode de
gouvernance essentiel pour les
musulmans !
Le Prophète
prophétisait l’Islam du Coran dans ses
principes, ses objectifs présents et
futurs pour les êtres humains ; après sa
mort (en incluant les 4 premiers
califes), c’est l’Islam des «hadiths»
qui s’oblige avec toutes ses
contradictions et conflits.
Pourtant, le
Prophète avait interdit de transcrire
ses paroles….prédisant, certainement, la
«confusion» générale dans laquelle nous
sommes aujourd’hui face à l’évolution de
l’être sur le plan moral, libertés,
scientifiques et techniques! Est-il
pensable ou raisonnable que l'on puisse
calquer les faits, gestes et pensées des
sociétés bédouines (de la péninsule
arabique) du 6ème siècle sur celles du
monde du 21ème siècle ? Ce serait nier,
alors, l’universalité du Coran précisé
par ce verset : « Et Nous ne t’avons
envoyé qu’en tant qu’annonciateur et
avertisseur pour toute l’humanité » !
(Coran)
De nouveaux
courants commencent à émerger, se
réclamant du «tanwir», avec des moyens
bien plus puissants (intellectuellement
et médiatiquement) que leurs
prédécesseurs. Leurs interprétations des
versets doit s’appuyer sur 4 piliers :
leurs contextes « intérieur et extérieur
», leurs destinations, la langue et les
conditions sociales.
Réussiront- ils
dans cette tâche pédagogique colossale
pleine d’embûches ?
Amar Djerrad
Le dossier religion musulmane
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