Opinion
Maurice
Audin et le général
Ahmed Halfaoui
© Ahmed
Halfaoui
Lundi 13 janvier 2014
Ils ne
veulent toujours pas dire à Josette Audin
où ils ont enterré Maurice. Ils sont
capables de cela. Peu lui chaut qu'un
journaliste dévoile que son mari a été
tué. Comme s'il fallait lui apprendre la
chose. Les sordides détails sur la mort
du jeune militant communiste ne font que
raviver les blessures. Elles servent, au
mieux, à fabriquer un best-seller, c'est
ce qu'elle pense cette femme-courage,
qui a fini par abandonner l'idée de
savoir la vérité sur la mort de son
compagnon, pour demander à ce que la
lumière soit faite sur toutes les
exactions de l'armée coloniale contre la
population algérienne. Pour que la
Barbarie ne soit pas réduite aux simples
actes de la soldatesque et des généraux
qui la commandaient. Car la Barbarie est
inscrite dans le système que les soldats
servaient et qu'il avait envoyé "
pacifier " un peuple qui avait décidé de
ne plus la subir. La Barbarie qu'une
chanson de Jacques Brel dénonçait en son
temps par ces vers : « Pourquoi cette
fanfare/Quand les soldats par
quatre/Attendent les massacres/Sur le
quai d'une gare/Pourquoi ce train
ventru…/Pour partir en soldats/Pourquoi
ce train de pluie/Pourquoi ce train de
guerre/Pourquoi ce cimetière/En marche
vers la nuit/Nous n'irons plus au bois
la colombe est blessée/Nous n'allons pas
au bois nous allons la tuer…
» Au bout
du voyage, ces hommes sortis de leur
quotidien, sans histoires pour beaucoup,
seront transformés en criminels, en
machines à torturer et à tuer. Et ils le
feront, pour beaucoup aussi, avec le
plus grand zèle et surtout avec le
sentiment de devoir obéir aux ordres et
de servir leur pays, représentés par
ceux qui les ont enrôlés dans
l'aventure. Même général, un soldat
reste un soldat, un homme " commandé "
qui exécute les ordres et qui rend
compte à ceux qui l'ont désigné pour sa
mission. Cette trivialité est
superbement ignorée et ne sont mis en
avant que les exécutants pas les
commanditaires, en l'occurrence, le
gouvernement qu'ils servent. Celui-là
qui les a mis dans le train de la
chanson et qui a voulu qu'il y ait de la
musique qui agrémente le départ vers
l'Algérie martyre. Qui a voulu qu'ils
soient assurés de partir pour une noble
cause, au service de la patrie, contre
des ennemis qu'il leur faut réduire. Et
ils s'y sont attelés avec le sentiment
d'être du côté du droit face à des
ennemis qui le bafouent ou plus, du côté
de la justice contre le crime, celui que
commettent ces Algériens de vouloir se
libérer du pire déni d'humanité qui
soit. Alors quand Maurice Audin est
tombé entre leurs mains, ils ne se sont
pas fait prier pour lui infliger le sort
qu'il a subi. En prime, ils
considéraient que c'était un traître, en
plus d'être communiste. Car il est
inconcevable pour un tueur, comme Massu,
qu'un " Français " puisse s'engager de
l'autre côté de la barricade. Il n'a pas
rencontré les catégories mentales qui
lui auraient permis de s'expliquer ce
type de comportement. De comprendre ce
que signifie le combat pour l'humain,
pour un monde où l'humain serait
au-dessus de tout. Cela n'a pas été le
cas, sinon Massu n'aurait pas été un
général dirigeant une " bataille " où il
s'agissait plus de terroriser un peuple
que de faire la guerre à une armée.
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Les débats
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