Opinion
La voix du peuple
et celle de la sagesse
Soraya
Hélou
Lundi 17 juin 2013
Les médias occidentaux sont pris à leur
propre jeu. Depuis le début de la
campagne électorale présidentielle en
Iran, ils n'ont cessé de dire que «dans
une telle dictature, la candidature du
réformateur cheikh Hassan Rouhani est de
pure forme» et ce dernier n'a aucune
chance de l'emporter. Sa candidature
servirait donc d'alibi démocratique à ce
«régime autocratique». La nouvelle de
l'élection de cheikh Rouhani a donc eu
l'effet d'une bombe dans les
chancelleries occidentales et dans les
médias de l'Occident. Comment devoir
reconnaître que tous les pronostics
étaient faux et qu'une fois de plus,
l'Occident a fait preuve d'une
méconnaissance totale de la République
islamique et de son peuple ?
Aujourd'hui, les responsables du monde
entier se disputent pour savoir qui va
féliciter en premier le nouveau
président de l'Iran et qui va être le
premier à amorcer avec lui et son pays,
une nouvelle page d'ouverture. Certains
vont même jusqu'à prédire un conflit
rapide, voire une lutte d'influence
entre lui et le leader suprême de la
révolution l'ayatollah Khamenei, classé
par les Occidentaux, dans le camp des
conservateurs. Mais là aussi, c'est
faire preuve d'une grande méconnaissance
de la réalité iranienne.
Pour bien comprendre la situation, il
faut se rappeler qu'au départ, la
campagne présidentielle opposait huit
candidats, dont trois réformateurs et
cinq conservateurs. Au cours de la
dernière semaine de campagne, deux
candidats réformateurs se sont retirés
de la course pour ne pas disperser les
voix des électeurs réformateurs. Aucune
démarche de ce genre n'a eu lieu dans le
camp conservateur. Si vraiment le leader
suprême voulait intervenir dans le cours
des élections et s'il voulait assurer la
victoire d'un conservateur, il aurait
pu, selon l'optique des Occidentaux,
faire pression sur les candidats
conservateurs pour leur demander de se
retirer en faveur d'un seul. C'est en
tout cas ce qui se serait passé dans la
plupart des pays, menant au final à une
confrontation directe entre un candidat
réformateur et un autre conservateur. En
même temps, une telle confrontation
aurait certainement radicalisé les
positions et aiguisé les conflits et
peut-être reproduit un schéma semblable
à ce qui s'était passé lors de la
présidentielle de 2009, lorsque les
partisans des candidats réformateurs de
l'époque ont mené des protestations dans
la rue et lancé des accusations de
fraude. Le leader suprême n'est donc pas
intervenu et a laissé le jeu
démocratique se jouer jusqu'au bout,
sachant que le camp conservateur était
désavantagé par la multitude de ses
candidats. Non seulement, il a ainsi
prouvé sa neutralité et sa confiance
dans le choix de son peuple, mais il a
aussi déjoué des plans éventuels pour
pousser le candidat réformateur, qui
dans l'optique occidentale ne pouvait
que perdre l'élection, à lancer des
mouvements de protestations qui
déstabiliseraient la République
islamique et l'affaibliraient dans une
étape aussi cruciale. Le régime iranien
a donc ainsi montré sa capacité à se
renouveler et à assurer une alternance
du pouvoir dans le plus grand calme,
mieux que la plupart des grandes
démocraties dans le monde qui
parviennent de moins en moins à
circonscrire les incidents et à
maintenir les campagnes électorales dans
un cadre respectueux. D'ailleurs, sitôt
les résultats officiels connus, les
candidats malheureux se sont inclinés et
ont présenté leurs félicitations au
vainqueur, donnant une leçon de respect
de la volonté populaire rare, même dans
les démocraties occidentales.
L'élection de cheikh Rouhani, comme l'a
d'ailleurs souligné sayed Hassan
Nasrallah, est donc porteuse de grands
espoirs. D'abord pour la population
iranienne, qui subit les conséquences
pesantes des sanctions économiques
imposées par l'Occident et ensuite pour
les pays occidentaux eux-mêmes, qui
attendaient un signe, pour ne pas dire
un prétexte, pour se sortir de l'impasse
dans laquelle ils se sont placés à cause
de leur attitude envers la République
islamique. La victoire du candidat
réformateur leur fournit donc une porte
de sortie honorable pour pouvoir tendre
de nouveau la main à l'Iran, sans avoir
l'air d'avoir changé d'avis, ni d'avoir
reconnu leur échec. La victoire de
cheikh Hassan Rouhani c'est donc
forcément celle de la volonté du peuple
et donc de la démocratie, mais c'est
aussi celle de la sagesse. A l'Occident
de faire désormais preuve d'une sagesse
égale...
Source : french.alahednews
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