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Al-Ahram Hebdo
Un relâchement de
pure forme
Samar Al-Gamal

Photo: Al-Ahram
Mercredi 23 juin 2010
Blocus de Gaza.
C'est sous la pression internationale qu'Israël
s'est résolu à desserrer l'étau imposé depuis quatre ans. Il
autorise désormais les biens à usage civil, mais interdit dans
les faits la plupart des produits.
C'est pour retoucher un visage
si laid, fait de blocus illégal et d'attaques militaires contre
des humanitaires, qu'Israël a été obligé de lâcher du lest. La
coriandre, le cumin, les matelas et serviettes qui étaient
bannis d'accès à Gaza depuis 4 ans, pour « protéger la sécurité
d'Israël », seront désormais accessibles aux Palestiniens de
cette bande encerclée de tous les côtés, y compris mer et air.
Selon les médias israéliens, les nouvelles règles devraient
prévoir l'établissement d'une « liste noire » d'environ 120
produits ou matériaux interdits, comme les matériaux de
construction, dont les tuyaux, le ciment et le gravier, tandis
que le reste serait libre d'entrer à Gaza. Le ciment et l'acier
étaient, jusqu'à présent, totalement interdits, entravant la
reconstruction de la bande de Gaza depuis la dernière guerre
israélienne. Une centaine de produits sont actuellement
autorisés contre 4 000 avant 2007, d'après l'organisation
israélienne des droits de l'homme Gisha. Ce blocus a empêché les
Nations-Unies d'acheminer les matériaux de construction
nécessaires pour « la réalisation du plan accepté
internationalement et visant à reconstruire des milliers de
logements et d'autres bâtiments endommagés ou détruits lors de
l'offensive israélienne », d'après Chris Gunness, porte-parole
de l'Onu. Le blocus a également entraîné la fermeture de
nombreuses usines, a privé de travail des milliers de personnes
et a provoqué la paralysie de la fragile économie du territoire.
Sous pression internationale
après son attaque sanglante contre la flottille humanitaire au
mois de juin dernier, Tel-Aviv a opté pour la levée partielle.
Un soupçon d'assouplissement dont les modalités restent très
floues. Comment cette décision sera-t-elle mise en œuvre ? Nul
ne le sait. Même l'Union Européenne (UE), qui a poussé dans
cette direction dépêchant l'envoyé spécial du Quartette sur
place, l'ignore. « C'est un pas dans la bonne direction. Ce sont
les détails qui comptent », a néanmoins déclaré Cristina Galach,
porte-parole de la présidence espagnole de l'UE.
Restaurer sa réputation
L'Europe juge pourtant
insuffisante cette mesure. Elle veut en effet avoir une présence
aux points de passage pour surveiller le transit des biens vers
Gaza. La Suisse aurait présenté un mécanisme « pour assurer
Tel-Aviv qu'il n'y a pas de contrebande d'armes ». Il apparaît
que l'essentiel est la sécurité d'Israël et non le sort des 1,5
million de Palestiniens, dont plus de 80 % de la population
dépendent de l'aide étrangère. Le quotidien de la majorité des
Gazaouis est loin d'être facile. (lire reportage pages 4 et 5).
Le constat est dramatique.
Concrètement, l'allégement du
blocus ne concerne pas la mer de Gaza. Mais les voies maritimes
du territoire resteront complètement closes, entravant, sous les
yeux de la communauté internationale, la pêche des Gazaouis et
paralysant un secteur assez florissant par le passé. Les
postes-frontières entre Israël et Gaza seront également fermés
et ne rouvriront qu'à certains moments pour les marchandises non
cataloguées « soutien à la guerre ». C'est pourquoi l'Autorité
palestinienne, tout comme le Hamas, a jugé cette déclaration de
principe israélienne insuffisante, exigeant la levée totale du
blocus imposé à l'enclave pauvre, d'autant plus qu'il reste
illégal du point de vue juridique (lire page 6).
Mais Israël paie en partie le
prix nécessaire pour restaurer sa réputation internationale
après la désastreuse attaque de la flottille. A chaque fois que
les pressions diplomatiques deviennent trop fortes, Israël lâche
du lest sur le plan humanitaire, simplement pour ne rien céder
au niveau politique. Cette fois, les Israéliens voulaient
échapper aux pressions pour la création d'une commission
d'enquête « internationale » sur l'attaque militaire contre le
bateau humanitaire Marmara, où 9 Turcs ont été tués par des
dizaines de balles israéliennes dans les eaux internationales.
Tel-Aviv, qui veut mener l'enquête par ses propres moyens, a
rejeté cette proposition et a annoncé la création d'une
« commission publique » avec deux observateurs internationaux,
sans droit de vote. Cette commission israélienne aura pour
mission d'« enquêter sur les aspects relatifs à l'action
entreprise par l'Etat d'Israël pour empêcher des navires
d'atteindre les côtes de Gaza », selon un communiqué du bureau
du premier ministre israélien.
Un moyen d'éviter une enquête
« crédible ». Ankara, la plus concernée, a dénoncé par avance
une « enquête impartiale », insistant sur la création d'une
commission d'enquête « sous le contrôle direct des
Nations-Unies », qui inclurait des représentants turcs et
israéliens. C'est sans doute à cette fin que le premier ministre
israélien Netanyahu doit se rendre le 6 juillet à Washington,
pour rencontrer le président Barack Obama.
Droits de reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 23 juin 2010 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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