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Analyse
Assiéger le siège
d'Israël
Omar Barghouti
Omar Barghouti
Vendredi 13 août 2010
En dépit du siège de Gaza par Israël et du
déplacement accru de populations dans le Néguev et à Jérusalem
Est, les Palestiniens ont quelques raisons de se réjouir. A
Washington, une coopérative alimentaire a voté une résolution
appelant au boycott des produits israéliens (1),
confirmant que le mouvement de boycott – cinq ans le mois
dernier – a finalement traversé l’Atlantique. Le soutien à la
démarche est venu de personnalités éminentes, dont les prix
Nobel Desmond Tutu et Máiread Maguire, et du rapporteur spécial
des Nations Unies pour les territoires palestiniens, Richard
Falk.
Le Mouvement pour le boycott, le désinvestissement et les
sanctions (BDS) contre Israël a été lancé en 2005, un an
après que la Cour Internationale de Justice ait déclaré que le
mur et les colonies construits par Israël sur le territoire
palestinien occupé étaient illégaux. Plus de 170 partis
politiques, syndicats, mouvements de masse et ONG palestiniens
ont approuvé le mouvement, qui est dirigé par le BNC, une
coalition d’organisations de la société civile.
Enracinée dans un siècle de résistance civile palestinienne, et
inspirée par la lutte anti-apartheid, la campagne a chapeauté
des boycotts précédents, partiaux, pour présenter une approche
globale pour la réalisation de l’autodétermination palestinienne
: unifier les Palestiniens en Palestine historique et en
exil, en face d’une accélération de la fragmentation.
BDS évite la prescription de tout programme politique
particulier et insiste, au contraire, sur la réalisation des
droits fondamentaux, reconnus par les Nations Unies, qui
correspondent aux trois principaux segments du peuple
palestinien : mettre fin à l’occupation et à la colonisation
israéliennes de toutes les terres occupées depuis 1967 ; mettre
fin à la discrimination raciale contre les citoyens palestiniens
; et reconnaître le droit des réfugiés palestiniens à revenir
chez eux, comme stipulé par la Résolution 194 des Nations Unies.
Créé et dirigé par des Palestiniens, BDS combat toutes formes de
racisme, y compris l’antisémitisme, et est ancré dans les
principes universels de liberté, de justice et d’égalité des
droits qui a motivé les luttes antiapartheid et pour les droits
civiques aux Etats-Unis.
Caractériser le système légalisé d’Israël de discrimination
comme étant de l’apartheid – comme l’ont fait Tutu, Jimmy Carter
et même un ancien procureur général israélien (2) – ne
met pas Israël sur le même plan que l’Afrique du Sud. Les deux
régimes oppressifs ne sont pas identiques. L’attribution par
Israël de droits et de privilèges en fonction de critères
ethniques et religieux correspond à la définition de l’apartheid
définie par les Nations-Unies.
BDS a connu une croissance sans précédent après la guerre
d’agression contre Gaza et l’attaque de la flottille. Des gens
de conscience du monde entier semblent avoir franchi un seuil,
recourant à la pression, et non à l’apaisement ou à «
l’engagement constructif », pour mettre fin à l’impunité
d’Israël et à la collusion occidentale qui maintiennent son
statut d’Etat au-dessus des lois.
« Assiéger votre siège » - le cri du poète
palestinien Mahmoud Darwish – prend un nouveau sens dans ce
contexte. Parce que convaincre une puissance coloniale de tenir
compte d’arguments moraux pour la justice est, au mieux,
délirant, beaucoup comprennent maintenant qu’il est nécessaire
de « assiéger » Israël par des boycotts pour augmenter le prix
de son oppression.
Les militants BDS ont réussi à convaincre des institutions
financières en Scandinavie, en Allemagne et ailleurs, de se
désinvestir de compagnies complices des violations israéliennes
du droit international. Plusieurs syndicats internationaux ont
endossé le boycott. A la suite de l’attaque de la flottille, des
syndicats de dockers en Suède, en Inde, en Turquie et aux
Etats-Unis ont repris un appel des syndicats palestiniens de
bloquer le déchargement des navires israéliens.
Les soutiens à BDS par des personnalités culturelles comme John
Berger, Naomi Klein, Iain Bnaks et Alice Walker, et la vague
d’annulations d’événements en Israël par des artistes, dont Meg
Ryan, Elvis Costello, Gil Scott-Heron et les Pixies ont promu le
caractère international du mouvement, le rapprochant du courant
principal occidental. Le scepticisme sur son potentiel n’est
plus de mise.
Le Boycott de l’Intérieur (“Boycott from Within”), un
mouvement de protestation important en Israël aujourd’hui, a été
créé en 2009 pour adopter l’appel BDS palestinien.
Un projet de loi qui imposerait de lourdes amendes aux
Israéliens qui s’engageraient ou inciteraient à des boycotts
contre Israël a été récemment adopté en première lecture à la
Knesset. Cela souligne les craintes d’Israël vis-à-vis de la
portée mondiale et de l’impact de BDS comme campagne non
violente, moralement cohérente pour la justice. A bien des
égards, cela souligne que le « moment sud-africain » palestinien
est arrivé.
(1) “Food
co-op in Rachel Corrie's hometown boycotts Israeli goods”,
par Natasha Mozgovaya, Ha’aretz, 20 juillet 2010
(2) “The
war's seventh day”, par Michael Ben-Yair, Ha’aretz, 3
mars 2002
Source :
Guardian
Traduction : MR pour ISM
Le dossier BDS
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jour
Publié le 14 août 2010 avec l'aimable autorisation d'ISM.
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