Mercredi 1er septembre 2010
Palestine.
Après 20 mois d’interruption, le président palestinien, Mahmoud Abbass, et le premier ministre
israélien, Benyamin Netanyahu, se réunissent ce jeudi à
Washington pour des négociations dont on n’attend pas
grand-chose.
Afin
de relancer la roue du processus de paix entre Palestiniens et
Israéliens, des négociations directes commencent ce jeudi à
Washington après une forte pression exercée par l’administration
américaine. Cette dernière insiste à jouer un rôle plus efficace
cette fois-ci. A cet égard, l’envoyé spécial du président
américain Barack
Obama au Proche-Orient, George
Mitchell, a assuré que les Etats-Unis seraient « des partenaires
actifs ». Il a promis que Washington ferait « des propositions
de conciliation » si les discussions venaient à bloquer. Et pour
chercher un appui, les autorités américaines ont invité le
président égyptien Hosni Moubarak et le roi de Jordanie Abdallah
II à ces négociations directes en organisant des discussions
bilatérales entre toutes les parties.
Malgré ces efforts, c’est le scepticisme qui règne. Selon les
analystes, parvenir à un accord de paix entre Palestiniens et
Israéliens nécessite d’intenses efforts, car il faut d’abord les
convaincre à régler leurs différends. « La communauté
internationale, à sa tête les Etats-Unis, doit orienter le
processus de paix vers l’idée de la coexistence des deux peuples
et non pas détruire, chasser ou négliger l’Autre », explique le
Dr Sobhi
Essilah, analyste au Centre des Etudes Politiques et
Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.
Or,
plusieurs obstacles entravent tout éventuel accord même si le
premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, a assuré « avoir
bien l’intention d’étonner les sceptiques ». Mais en même temps,
il a d’ores et déjà posé ses conditions. Pour lui, les
conditions pour un accord sont la « reconnaissance d’Israël par
les Palestiniens comme Etat du peuple juif, le règlement final
du conflit et des arrangements garantissant qu’un retrait de
Cisjordanie ne sera pas suivi d’attaques à partir des zones
évacuées ». En fait, les désaccords sont profonds. Ils portent
sur tous les grands dossiers : le futur Etat palestinien, ses
frontières et ses pouvoirs, le sort des colonies en Cisjordanie
occupée, Jérusalem-Est et le règlement de la question des
réfugiés palestiniens de 1948. Autant de questions épineuses
sans cesse reportées et qui ne promettent pas un règlement aisé,
notamment sous l’ère Netanyahu.
Défendant son camp, M. Abbass a
souligné le sens de la responsabilité animant les négociateurs
palestiniens. « S’il y a ne serait-ce que 1 % de chance de
parvenir à la paix, nous nous efforcerons d’y arriver », a
affirmé le président palestinien en faisant assumer à Israël
l’entière responsabilité de l’échec des négociations s’il
reprenait la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est
annexée. C’est en effet là que réside le risque le
plus important.
Sous
intense pression américaine, l’Autorité palestinienne a renoncé
à son exigence de garanties, en particulier sur la colonisation,
mais a averti que la non-reconduction du moratoire partiel de la
construction de colonies en Cisjordanie, décrété en novembre
dernier et devant s’achever le 26 septembre, entraînerait la fin
des pourparlers.
Or,
M. Netanyahu s’est voulu clair. Il n’a pas promis aux Etats-Unis
la poursuite du gel partiel de la colonisation en Cisjordanie, a
indiqué lundi un responsable. « Nous n’avons présenté aucune
proposition aux Américains sur la prolongation du gel (...). Le
gouvernement n’a pris aucune nouvelle décision sur cette
question », a indiqué ce responsable en citant les propos tenus
dimanche par M. Netanyahu lors d’une réunion des ministres de
son parti, le Likoud. « Nous avons dit que l’avenir des
implantations serait discuté lors des discussions sur un accord
final avec d’autres questions », a ajouté M. Netanyahu, selon ce
responsable qui a requis l’anonymat.
Du
côté palestinien, auparavant interrogé sur d’éventuels
engagements de l’administration américaine qu’aurait obtenus
l’Autorité palestinienne pour une prolongation du moratoire, le
principal négociateur palestinien, Saëb
Erakat, s’était montré évasif. « Les
Américains nous ont dit que si nous entamions les négociations
directes, nous serions en meilleure position pour obtenir une
extension du moratoire », s’était-il borné à affirmer. Quant à
M. Abbass, il s’est contenté de
réaffirmer : « Le gouvernement d’Israël assumera l’entière
responsabilité du risque d’échec et d’effondrement des
négociations si la colonisation continue dans l’ensemble des
territoires palestiniens occupés en 1967 ».
Terre contre paix
Au-delà des différends concernant les détails, c’est un
véritable fossé qui oppose les deux parties, chacune abordant
les négociations avec des conceptions radicalement différentes.
L’Autorité palestinienne se fonde sur le principe de l’échange
de la terre contre la paix prévu par les résolutions de l’Onu et
les plans de paix, dont l’initiative arabe et la Feuille de
route du Quartette (Onu, Etats-Unis, Russie, Union européenne).
« Nous nous rendons à ces négociations armés de ces positions et
engagements et nous n’en dévierons pas », a insisté M.
Abbass qui souhaiterait reprendre
les négociations au point où elles se sont arrêtées avec les
précédents cabinets israéliens.
En
revanche, M. Netanyahu, qui évite toute référence aux accords
passés y compris ceux d’Oslo en 1993 sur l’autonomie
palestinienne, entend au contraire prendre un nouveau départ. Ce
dernier entend s’impliquer personnellement dans la négociation
avec M. Abbass, il ne sera secondé
par aucun ministre mais par des conseillers. Ainsi l’équipe de
négociateurs n’aura pas de pouvoir de décision. « L’objectif de
M. Netanyahu est d’avoir une équipe restreinte qui pourra mener
sous son contrôle des pourparlers rapides, sérieux et
approfondis », a expliqué un communiqué du premier ministre
israélien. Ce dernier a proposé de rencontrer M.
Abbass tous les quinze jours pour
améliorer les perspectives de dialogue direct entre Israéliens
et Palestinien. Comme de coutume donc, les Israéliens veulent
passer pour ceux qui cherchent à dialoguer, face à un
interlocuteur qui le refuse. L’Autorité palestinienne n’a pas
encore répondu à l’offre de M. Netanyahu de ces rencontres en
tête-à-tête, surtout après la déclaration du premier ministre
israélien concernant le gel de la colonisation. A quoi bon
répondre à cette offre quand la première rencontre directe
s’annonce d’ores et déjà de mauvais augure ?
Droits de reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 2 septembre 2010 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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