La Voix de la Russie
Hillary Clinton
met bas les masques
Laurent
Brayard
Photo: EPA
Mercredi 12 décembre
2012 Dans les récentes déclarations
de la Secrétaire d’Etat américaine
Hillary Clinton, les Etats-Unis ont
mis bas les masques sur les
intentions réelles qu’ils
nourrissent à l’égard de la Russie
et du Monde en général et à bien des
égards. Ces déclarations démontrent
bien à quel niveau d’audace, la
supériorité ressentie des USA
décomplexe ses ambitions au point de
faire fi de toute prudence, même
diplomatique. Ces déclarations déjà
vieilles de deux jours,
interviennent à un moment assez
crucial dans les relations
internationales mondiales et dans
les relations entre la Russie et les
Etats-Unis. Elles raisonnent comme
des menaces qui ont un relent
historique de déjà vu dont nous nous
serions bien passés.
Dans l’indifférence
quasi générale, l’Occident ne sait
sans doute pas qu’au moment où
Hillary Clinton déclarait que les
USA ne laisseraient jamais une
reconstruction de « l’URSS » se
refaire, un certain nombre
d’inquiétants dossiers épineux
laissent augurer de difficultés
croissantes avec les desiderata de
l’Amérique de l’Oncle Sam. La
semaine dernière nous apprenions en
effet le vote par le Sénat du
Congrès américain, de la loi dite «
Magnitski », qui impose des mesures
de restrictions dans l’affaire du
même nom, en interdisant aux
supposés coupables de la mort de cet
homme, l’entrée sur le territoire
américain et le gel des avoirs
qu’ils pourraient posséder dans ce
pays. Sur ce point, les Américains
d’une manière assez éhontée,
indiquent qu’ils entendent donc
désormais défendre « la démocratie »
et les Droits de l’Homme en donnant
des leçons à tous ceux qui seront
désignés par la puissance Amérique
comme violant les droits essentiels
et primordiaux de l’Humanité toute
entière.
Mais derrière le
discours grandiloquent et convenu,
il est assez effrayant de constater
comment les USA glissent ainsi vers
une démagogie de plus en plus
virulente, qui est en fait d’une
dangerosité extrême, s’affichant
comme une jurisprudence mondiale
entendant régir les Peuples en
visant nominalement des
ressortissants d’autres nations sans
en passer par les Nations Unis, et
en décidant de frapper juridiquement
des hommes en passant également
par-dessus les épaules des justices
nationales et indépendantes d’autres
pays. Au même moment, Hillary
Clinton est aussi en passe de
visiter les « Amis de la Syrie »,
chers à la France de Monsieur
Hollande et Sarkozy. Elle doit
reconnaître officiellement cet
organisme dissident comme le seul
représentant légal du Peuple syrien,
en méprisant ceux qui par centaines
de milliers ne peuvent et ne veulent
se reconnaître dans une organisation
qui s’empressera de les faire
égorger à la première occasion
venue, musulmans alaouites,
Chrétiens d’Orient, Syriaques,
Arméniens et tous ceux qui
n’entreront pas dans cette
conception à sens unique de la
démocratie.
Aussi lorsque que la
Secrétaire d’Etat américaine indique
que son pays ne laissera pas la
Russie développer l’intégration de
plusieurs pays au sein d’une Union
douanière en train de s’organiser
avec des pays de l’espace de
l’ex-Union soviétique, les
Etats-Unis jettent le masque à
terre. Il est évident, que si les
Américains ne virent pas d’un bon
œil la création de l’espace européen
et de sa monnaie, ils redoutent
également la création d’une entité
régionale similaire en Asie. Elle
est redoutée à plus d’un titre, et
les diverses interventions
américaines visent à soigneusement
tenir à distance l’UE de la Russie.
Un tel rapprochement leur serait
catastrophique, mais en Europe
quelques bons alliés veillent au
grain. En quelques mots anodins,
Hillary Clinton donne ainsi les
pistes pour lire dans la politique
internationale américaine de ces
dernières décennies, et des années à
venir : elle entend donc dicter à la
fois ce que les justices des pays
auraient à faire, mais aussi ce que
les diplomaties et les intérêts
commerciaux d’autres nations peuvent
ou ne peuvent pas réaliser, en
fonction de ses propres intérêts
économiques et géostratégiques.
La seule évocation
de l’URSS montre bien à quel point
les USA ne sont plus en corrélation
avec la réalité d’aujourd’hui, à
savoir que la Russie, si elle se
trouvait héritière en droit de
l’Union soviétique, n’a que peu de
choses à voir avec un système
historique défunt, comme le
Saint-Empire Romain Germanique où le
IIIème Reich. Ce serait un peu comme
considérer l’Allemagne comme étant
la continuité du Reich d’Hitler, ou
l’Autriche comme celui du
Saint-Empire de Charles Quint. Or
les hommes qui ont fait l’Union
soviétique sont morts depuis des
décennies, les plus terribles
d’entre eux ont été jugés par
l’histoire, justement en Russie :
Staline, Beria, Dzerjinski… et même
Lénine, rappelons que son mausolée
est fermé depuis plus de deux ans et
que ses restes attendent une
décision symbolique. Ces hommes ne
sont plus, et il n’est pas dans
l’intention de la Russie d’en
revenir à un système qui eut certes
aussi son âge d’or et des
personnages moins sanguinaires et
plus nobles, mais qui appartient au
passé, et cela de manière
définitive.
La Russie ne regarde
pas en arrière, elle ne mûrit pas
non plus la recréation d’une entité
dont les ramifications partiraient
de Moscou. Dans la fondation d’une
zone douanière commune, la Russie et
les pays voisins ne cherchent que
les intérêts évidents des
populations dont ils ont la charge.
L’idée du marché commun européen ne
partait pas d’un autre sentiment, et
les pays de la zone eurasiatique,
tout comme ce fut le cas en 1957
lors du traité de Rome des Européens
de l’Ouest, ont parfaitement le
droit de s’assembler autour d’une
organisation qui est conçue pour la
libre circulation des biens,
l’uniformité des lois douanières,
l’augmentation des échanges
commerciaux, la simplification et la
liberté des mouvements des citoyens
et au final le bien-être général de
peuples qui ont une longue histoire
commune que cela plaise aux
Etats-Unis d’Amérique ou non.
En s’ingérant sans
cesse dans les affaires intérieures
de multiples nations, parfois en
déléguant quelques francs-tireurs
inattendus comme ce fut le cas de la
France en Syrie, les USA démontrent
une fois de plus que derrière le
modèle anglo-saxon au sens large,
c’est-à-dire non seulement les USA
que la Grande-Bretagne, se cache une
volonté de plus en plus tenace et
annoncée de rester fermement aux
commandes en ne tolérant aucune
construction, de quelques niveaux
que ce soit, qui ne soient passées
par l’aval « des maîtres de la
maison »… Cela n’empêche pas
d’ailleurs qu’ils s’efforcent à
installer dans le Monde un certain
nombre de bases (comme c’est le cas
discrètement en UE, en Espagne à
Cadix), ou de boucliers antimissiles
qui sont censés protéger le Monde
raisonnable contre « les barbares
environnants ». Il reste à dire que
les Etats-Unis ressemblent toutefois
de plus en plus à cet Empire Romain
dominateur dont les Légions tenaient
le Monde entre leurs mains en
imposant par la force la
Pax Romana… au prix du sang
et de l’écrasement d’autres mondes
et civilisations.
Continuer à tenir de
tels discours montre également une
certaine naïveté, ou du moins un
sérieux manque de scrupules lorsque
nous connaissons l’état de ladite
démocratie américaine sur les droits
des gens et les droits sociaux dans
le paradis américain. Et cela sans
parler des soutiens diplomatiques à
des régimes, notamment dans le Golfe
persique ou en Afrique, mais aussi
en Asie, qui démontrent bien qu’une
fois encore, la grande civilisation
américaine ne s’intéresse à cette
fameuse démocratie que lorsqu’elle
peut servir efficacement ses projets
marchands et ceux de corporations
financières intéressées à ce que cet
ordre mondial se poursuive ainsi
qu’il a été pensé très loin des
populations qui en payent le prix,
même celui du sang et de la mort.
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