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LES ETATS-UNIS ET LE CONFLIT ISRAÉLO-PALESTINIEN
Du «deux poids, deux mesures» aux
«demi-mesures»
Karim Mohsen
Samedi 21 mai 2011
Le président américain, Barack Obama, dans
son adresse aux musulmans, a évoqué le contentieux
israélo-palestinien sans pour autant aller au bout de la logique
de son propos.
Abordant le chapitre du contentieux
israélien-palestinien sur la table depuis 64 ans (résolution 181
II du Conseil de sécurité de l’ONU, du 29 novembre 1947,
partageant la Palestine historique entre deux Etats: Israël et
Palestine), le président américain Barack Obama a, pour la
première fois, évoqué en termes clairs, le fait que
l’édification du futur Etat palestinien doit se faire sur la
base des frontières de 1967 (plus exactement la ligne de
démarcation, ou ligne Verte, votée par le Conseil de sécurité).
Cette frontière de 1967 est celle-là même revendiquée par les
Palestiniens et à laquelle avait souscrit la majorité de la
communauté internationale, y compris les principaux pays de
l’Union européenne. M.Obama ne pouvait aller à l’encontre d’un
fait désormais admis comme irrévocable. Ce qui, en clair,
signifie qu’Israël occupe illégalement des territoires ne lui
appartenant pas et doit, pour ce faire, se conformer aux
résolutions de l’ONU afférentes au conflit. Ainsi, Barack Obama
se prononce sur ce point important du contentieux
israélo-palestinien affirmant: «Les frontières d’Israël et de la
Palestine devraient être fondées sur les lignes de 1967 avec des
échanges sur lesquels les deux parties seraient d’accord, afin
d’établir des frontières sûres et reconnues pour les deux Etats.
Le peuple palestinien doit avoir le droit de se gouverner
lui-même et d’atteindre son plein potentiel dans un Etat
souverain et contigu». C’est le moins qui pouvait être attendu
du président de la superpuissance américaine. Mais Barack Obama
ne va pas au bout de sa réflexion en indiquant: «Je suis
conscient que ces seules mesures ne permettront pas de mettre
fin au conflit, car deux questions déchirantes et chargées en
émotion doivent encore être résolues: l’avenir de Jérusalem et
le destin des réfugiés palestiniens». La question de
Jérusalem-Est ne se pose pas en tant que telle, mais comme un
élément sine qua non de la problématique israélo-palestinienne.
Au même titre que la Cisjordanie occupée, Jérusalem-Est est un
territoire palestinien occupé (l’ONU en atteste largement par le
fait même qu’elle ne reconnaît pas l’annexion de la Ville Sainte
décidée par Israël en 1981). La question des réfugiés est
également prise en charge par la résolution 194 III du 11
décembre 1948. Celle-ci stipule, suite à l’exode forcé de
centaines de milliers de Palestiniens «qu’il y a lieu de
permettre aux réfugiés qui le désirent, de rentrer dans leurs
foyers le plus tôt possible et de vivre en paix avec leurs
voisins, et que des indemnités doivent être payées à titre de
compensation pour les biens de ceux qui décident de ne pas
rentrer dans leurs foyers et pour tout bien perdu ou endommagé
lorsque, en vertu des principes du droit international ou en
équité, cette perte ou ce dommage doit être réparé par les
gouvernements ou autorités responsables». Dès lors, Israël ne
peut décider seul de la question des réfugiés palestiniens et
doit la négocier avec les Palestiniens dans le cadre du droit
international et du droit au retour. A ces points essentiels,
Israël, sans surprise, a immédiatement répondu par un «non» du
Premier ministre, Benjamin Netanyahu, lequel a exclu que des
«centres majeurs de population israélienne en Judée-Samarie
(Cisjordanie) se retrouvent de l’autre côté de la frontière»
(allusion aux blocs de colonisation en Cisjordanie occupée). De
fait, Netanyahu était attendu hier à Washington où il doit avoir
des entretiens avec le président américain Barack Obama. Ce
dernier, après avoir admis que les frontières du futur Etat
doivent se baser sur la ligne de démarcation de 1967, a tenté
d’atténuer son propos en avertissant que «les Palestiniens ne
parviendront pas à l’indépendance en niant le droit d’Israël à
exister». Ne serait-ce que pour équilibrer son propos et lui
donner du sens et du crédit, on aurait aimé entendre M.Obama, de
la même manière, prévenir Israël qu’il ne parviendra pas à la
sécurité en «niant le droit à l’existence d’un Etat palestinien
à ses côtés» Las, Barack Obama ne l’a pas fait. Cela met quelque
part en suspicion tout ce qu’il a dit. Ainsi de la politique du
deux poids, deux mesures, voilà le président américain qui
s’essaie aux «demi-mesures» qui ne satisfont ni les
Palestiniens, ni n’agréent Israël. De fait, au moment même où
M.Obama s’exprimait, une ONG révélait à Jérusalem qu’Israël
avait approuvé la construction de 1 520 nouveaux logements dans
deux quartiers de colonisation juive dans la partie orientale
occupée de la Ville Sainte. Le président américain semblait déjà
ne tirer que des plans sur la comète en indiquant «le retrait
complet et graduel des forces militaires israéliennes devrait
être coordonné dans l’idée d’une responsabilité de la sécurité
palestinienne dans un Etat souverain et non militarisé». M.Obama
poursuit: «En ce qui concerne la sécurité, chaque Etat a le
droit de se défendre et Israël doit être en mesure de se
défendre - par ses propres moyens - contre toute menace (...).»
Comment? Israël, première puissance conventionnelle du
Moyen-Orient et huitième puissance nucléaire, a le droit de se
défendre, mais l’Etat de Palestine doit être un Etat
«démilitarisé» tout en ayant des dispositions «assez solides
pour éviter une résurgence du terrorisme, mettre fin au trafic
d’armes et assurer une réelle sécurité aux frontières». Le
président américain, ne sait-il pas qu’Israël interdit aux
policiers palestiniens de disposer de simples armes à main? En
allusion à la prochaine demande des Palestiniens de leur
reconnaissance par l’Assemblée générale de l’ONU (en septembre
prochain), Barack Obama met en garde les Palestiniens en
indiquant: «Aux Palestiniens, (je dis), les tentatives de
discréditer Israël sont vouées à l’échec. Les tentatives
d’isoler symboliquement Israël aux Nations unies en septembre ne
permettront pas de créer un Etat indépendant.» Si les Etats-Unis
pouvaient, par leur veto, bloquer les résolutions au sein du
Conseil de sécurité (le dernier veto de Washington remonte
justement au mois d’avril et à la résolution condamnant la
colonisation dans les territoires occupés, résolution adoptée
par 14 membres sur les 15 du Conseil), à l’Assemblée générale de
l’ONU par contre chaque pays, y compris les USA, ne dispose que
de sa seule voix et les Palestiniens sont déjà assurés de
bénéficier de la majorité absolue en septembre prochain pour
l’admission de la Palestine en tant qu’Etat membre des Nations
unies. Les Etats-Unis n’y peuvent rien, nonobstant les menaces
voilées contre les initiatives des Palestiniens afin de faire
enfin reconnaître leur droit à l’existence et à un Etat
indépendant. En 20 ans de parrainage du processus de paix, les
Etats-Unis n’ont pas réussi à faire avancer d’un iota le
dossier, au moment où Israël confortait son hégémonie sur les
territoires palestiniens occupés par la multiplication des
colonies juives de peuplement. Comme l’a déclaré le président
palestinien Mahmoud Abbas, la Palestine sera, avec ou sans Obama.
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Publié le 21 mai 2011 avec l'aimable autorisation de l'Expression
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