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Al-Ahram Hebdo
Enième impasse
Ines Eissa

Mercredi 20 octobre 2010
Palestine.
Entre la reprise de la colonisation et la demande de reconnaître
Israël comme un « Etat du peuple juif », Benyamin Netanyahu ne
laisse plus aucune chance à la paix, à moins d’une intervention
musclée de la part des Américains.
En liant l’arrêt de la colonisation à la reconnaissance du
caractère juif d’Israël, le premier ministre israélien, Benyamin
Netanyahu, a donné un ultime coup au processus de paix. Car
l’arrêt de la colonisation était une condition à la poursuite
des négociations israélo-palestiniennes. Plus de négociations
donc, et plus de processus de paix non plus. Israël s’entête et
les Palestiniens ne veulent plus faire davantage de concessions.
Tout porte à croire que c’est l’impasse. A moins d’un miracle.
En effet, Benyamin Netanyahu a publiquement proposé un gel de la
colonisation en échange de la reconnaissance d’Israël comme «
Etat du peuple juif », un marché aussitôt rejeté par les
Palestiniens, qui l’estiment comme « sans rapport avec le
processus de paix ». « Si la direction palestinienne dit sans
ambiguïté à son peuple qu’elle reconnaît Israël comme
l’Etat-nation du peuple juif, je serai prêt à réunir mon
gouvernement pour demander un nouveau moratoire sur la
construction » dans les colonies juives de la Cisjordanie
occupée, a déclaré M. Netanyahu devant le Parlement israélien. «
J’ai déjà transmis ce message via des canaux discrets et
maintenant je le dis en public », a-t-il précisé. Il a assuré ne
pas faire de cette question « une condition aux pourparlers »,
mais a estimé qu’il s’agirait d’une « mesure d’établissement de
la confiance » envers la population israélienne, qui
témoignerait de la sincérité de la volonté de paix des
Palestiniens. « Cette question n’a de rapport ni avec le
processus de paix ni avec les obligations qu’Israël n’a pas
remplies. Nous la rejetons aussi bien en bloc que dans le détail
», a immédiatement rétorqué le principal négociateur
palestinien, Saëb Erakat, qui a accusé le gouvernement israélien
de s’obstiner à tuer toute chance de reprise des négociations,
après sa décision de lancer des appels d’offres pour des
logements de colons à Jérusalem-Est.
De
son côté, Mahmoud Abbass a réaffirmé que les Palestiniens
n’avaient pas à reconnaître le caractère juif de l’Etat d’Israël
vu qu’ils ont déjà reconnu l’Etat. « Tous les jours, vous (les
Israéliens) venez avec une nouvelle exigence. Cela suffit », a
ironisé M. Abbass, un sourire aux lèvres. Et de prévenir : « Le
désespoir alimentera l’extrémisme ». Mais le président
palestinien tente de rester optimiste, déclarant qu’il gardait «
de grands espoirs dans les efforts américains » de relancer le
dialogue et en écartant l’hypothèse d’une nouvelle intifada.
Ainsi, le seul espoir à l’heure actuelle est que les Etats-Unis
puissent faire suffisamment pression sur Israël. Or, ceux-ci se
contentent de manifester leur déception quant à la reprise des
activités de colonisation, estimant qu’elle compromettait leurs
efforts de relance des pourparlers. « C’est contraire à nos
efforts visant à relancer les négociations directes », a déclaré
le porte-parole du département d’Etat américain, Philip Crowley.
En mars dernier, l’annonce par le ministère de l’Habitat d’un
projet de colonisation à Jérusalem-Est, en pleine visite du
vice-président américain, Joe Biden, avait profondément irrité
les Etats-Unis. Et M. Netanyahu avait dû présenter ses « regrets
» pour le moment choisi pour cette annonce. Aujourd’hui, les
Israéliens semblent se comporter à leur guise, ne craignant rien
ni personne. Les Etats-Unis ont simplement accueilli
favorablement la contre-proposition palestinienne à l’offre du
premier ministre, Benyamin Netanyahu, estimant qu’elle était «
le type de dialogue » susceptible de régler le différend sur la
colonisation juive.
De
son côté, l’Europe, dont le rôle est marginalisé dans le
processus de paix entre Israël et les Palestiniens, tente
d’intervenir pour éviter le pire. Le président français, Nicolas
Sarkozy, qui dénonce les échecs successifs de ces négociations
sous la seule houlette des Etats-Unis, expose régulièrement sa
volonté de voir la France et l’Union européenne prendre une plus
grande part dans le processus. Il a ainsi proposé un sommet à
Paris réunissant le président palestinien, Mahmoud Abbass, le
président égyptien, Hosni Moubarak, et le chef du gouvernement
israélien, Benyamin Netanyahu. Mais pour l’heure, la rencontre
reste hypothétique. « Après consultations, les parties
concernées se sont mises d’accord pour décider d’une autre date
», a déclaré le bureau de M. Netanyahu, sans plus de précisions.
Cette décision a été implicitement confirmée par le principal
négociateur palestinien Saëb Erakat. « La poursuite de la
colonisation israélienne ruine tous les efforts de paix, que ce
soient ceux du président (américain) Barack Obama ou ceux du
président (français) Nicolas Sarkozy », a-t-il déclaré.
Rien de
nouveau.
Droits de reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 20 octobre 2010 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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