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IRIN
La barrière métallique égyptienne teste les
nerfs des habitants de Gaza

Un travailleur descend dans un
tunnel près de Rafah, au sud de Gaza. L’Égypte a presque terminé
la construction d’un mur métallique le long de sa frontière avec
Gaza pour essayer d’en finir avec la contrebande par les
tunnels.
Photo : Suhair Karam/IRIN
GAZA, 26 mars 2010 (IRIN)
L’achèvement imminent par l’Égypte de
l’installation d’une barrière en acier souterraine et en surface
le long de sa frontière avec la bande de Gaza met les Gazaouis
sur les nerfs : comment vont-ils survivre sans l’important
commerce qui passe par les tunnels ?
Un trafic de contrebande lucratif transite par les tunnels pour
toute une gamme de produits depuis qu’Israël a imposé un embargo
économique contre la bande de Gaza après la prise de pouvoir par
le Hamas en juin 2007. La Banque mondiale et les économistes
palestiniens estiment qu’au moins 80 pour cent des importations
totales vers Gaza passent par les tunnels.
« Creuser des tunnels et y travailler est l’un des rares emplois
disponibles pour les jeunes Gazaouis », a dit Omar Sha’ban,
économiste à Gaza.
« Les personnes qui travaillent dans les tunnels gagneraient 25
dollars par jour, une somme énorme pour l’économie palestinienne
actuelle. Mais ils sont exposés aux bombardements quotidiens …
par les forces aériennes israéliennes, à l’effondrement des
tunnels et aux incendies ».
Ziad al-Zaza, ministre de l’Économie du gouvernement du Hamas, a
dit qu’environ 20 000 personnes travaillaient dans les tunnels
avant l’opération militaire israélienne à Gaza, début 2009, et
qu’ils ne sont maintenant plus que la moitié. L’armée
israélienne a dit qu’elle avait endommagé ou détruit 60 à 70
pour cent des tunnels lors de l’offensive.
Abu Antar*, propriétaire et gérant d’un tunnel, âgé de 45 ans, a
dit que fermer les tunnels entre Gaza et Rafah, en Égypte,
signifierait que lui et les centaines d’autres personnes qui
travaillent grâce aux tunnels n’auraient plus de revenus.
« Nous avons réussi à traverser la clôture
égyptienne, mais maintenant, ce que nous craignons c’est que les
Égyptiens l’électrifient et ajoutent des capteurs sismiques pour
détecter notre présence sous terre, ce qui rendrait notre
mission impossible. Les tunnels sont notre unique source de
revenus », a dit à IRIN ce père de sept enfants.
La barrière en acier posée par l’Égypte fera 10 à 11 kilomètres
de long et descendra jusqu’à 18 mètres sous terre, ont dit les
autorités égyptiennes. Le quotidien égyptien
al-Shorouq a récemment annoncé que « le chantier du mur
principal était dans sa quatrième et dernière phase », après
quoi des caméras et des détecteurs seront installés.
Cette opération devrait durer quelques semaines et une période
d’essai devrait ensuite avoir lieu avant que l’installation ne
devienne complètement opérationnelle.
Un travail dangereux
Abu Antar a dit que 50 personnes travaillaient dans son tunnel.
« Chaque jour, nous travaillons dans les tunnels et nous nous
demandons si nous allons sortir vivants. La terre s’est
effondrée de nombreuses fois… La mort est inévitable dans ce
genre de travail. Nous avons peur 24 heures sur 24. Beaucoup de
gens sont morts. Chaque mois, il y a de nouvelles victimes des
bombardements aériens [israéliens] dans les tunnels », a-t-il
dit.
Les accidents sont fréquents dans les tunnels. Selon
l’organisation palestinienne de défense des droits humains Al-Mezan,
120 trafiquants travaillant dans les tunnels ont été tués au
cours des trois dernières années.
Les personnes travaillant dans les tunnels estiment qu’il existe
plus de 1 000 tunnels entre Gaza et la ville de Rafah, du côté
égyptien de la frontière. Ils font de 15 à 35 mètres de
profondeur et jusqu’à un kilomètre de long.
« Une catastrophe humanitaire »
« [La construction] d’un tunnel coûte environ 200 000 dollars,
alors lorsqu’ils seront détruits par les avions israéliens, ou
qu’ils seront bloqués par le mur égyptien, la pauvreté et le
chômage augmenteront de plus en plus », a-t-il dit. « Bloquer
les tunnels entraînera une terrible catastrophe humanitaire.
Tous les habitants de la bande de Gaza dépendront alors de
l’aide alimentaire des Nations Unies », a dit le ministre du
Hamas, M. al-Zaza.

Palestine Square,
à Gaza (photo d’archives).
Au moins 80 pour cent des importations vers Gaza passent par les
tunnels
Photo: Erica Silverman/IRIN
« Nous appelons les gouvernements égyptien et israélien à
désinvestir Gaza et à laisser les Palestiniens travailler sur
terre et non sous terre et les Gazaouis vivre dans la dignité et
la fierté », a dit M. al-Zaza.
Israël a imposé à la bande de Gaza de strictes restrictions à
l’importation après la prise de pouvoir par le Hamas en 2007 et
en guise de représailles après les tirs de rockets de Gaza sur
Israël. L’interdiction d’importer touche tout ce qui pourrait
aider le Hamas à fabriquer des armes, notamment le fer, l’acier
et la plupart des matériaux de construction. Toutes les
exportations sont interdites et les importations sont limitées à
quelques biens humanitaires. Les articles tels que les cahiers
scolaires, les bureaux, le matériel médical, les appareils
ménagers et les abris montables accusent d’importants retards.
Israël a salué les efforts de l’Égypte pour combattre la
contrebande. L’Égypte dit que sa sécurité était menacée par le
flux croissant de biens illicites et de militants vers son
territoire par les tunnels.
Israël accuse le Hamas d’utiliser les tunnels pour importer des
armes, une allégation niée par le Hamas.
Lors d’une visite à Gaza, plus tôt ce mois-ci, le coordinateur
des secours d’urgence des Nations Unies, John Holmes, a mis en
garde contre de gros problèmes si les tunnels étaient bloqués.
« Si ces tunnels sont bloqués, si indésirables qu’ils puissent
être, et aussi indésirables que puissent être leurs conséquences
sur la société et l’économie de Gaza, la situation sans les
tunnels serait complètement insoutenable », a dit M. Holmes. Il
a renouvelé ses appels à Israël pour mettre fin au blocus du
territoire palestinien.
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