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Opinion
Danse et musique à
Bonnétable
Hedy Belhassine

Vendredi 27 mai 2011
C’est une histoire à la Clochemerle, ridicule et
cruelle, qui oppose dans le Perche Sarthois la France
d’en haut à celle d’en bas.
Elle se déroule à Bonnétable, ville ainsi nommée parce
que les ducs de La Rochefoucauld y faisaient ripaille.
Les nobles ont administré la ville pendant des lustres,
et puis, démocratie aidant, ils ont cédé la bourgade de
quatre milliers d’âmes et de douze mille bovins aux
représentants du peuple.
De leur passé au service des seigneurs, bonnétabliens et
bonnétabliennes ont conservé le goût des arts. De la
musique avant toute chose, mais du menuet aussi. C’est
ainsi qu’il y aura bientôt trente ans, quelques esprits
éclairés et autres rejetons oubliés de fières lignées
créèrent une école associative de danse et de mélodie.
L’affaire pris de l’ampleur jusqu’à compter 330 élèves,
soit à l’échelle de la petite ville, un habitant en âge
de marcher sur 10 et à l’échelle des environs, un
habitant sur quinze. C’est considérable !
Mais le succès fait toujours des jaloux, surtout parmi
les pêcheurs de voix. Le maire du coquet patelin voisin
de Beaufay, comptable-expert de son état dans le civil
tomba en jaunisse. Fort de son entregent régional il
conçu de faire financer par la communauté des petites
communes dont il est président la création d’une école
concurrente. Toutefois, pour assurer la réussite de son
projet, il fallait d’abord mettre en faillite le vieil
établissement. Alors depuis des mois un plan de
déstabilisation est savamment mis en œuvre: noyautage
des instances de la vénérable association, harcèlement
des douze enseignants et de leur directeur, pressions
sur les élèves et cerise sur le gâteau : suppression de
la subvention municipale qui couvrait le tiers du
budget.
Sur le site web de la future école publique, qui sera
elle intégralement payée au prix fort par le
contribuable, la communauté de communes invite ses
administrés à se préinscrire pour la rentrée de
septembre. Reste que la bolchévisation de la culture est
une priorité des édiles sarthois mal perçue des manants
irréductibles. Dans les chaumières on aiguise les
archets en prévision de la prochaine fête de la musique.
Il va y avoir du bruit dans le Landernau d’autant qu’il
se dit que le Premier Ministre qui est «un pays» a
demandé à son Préfet en gants blancs de dépêcher une
brigade de sapeurs pompiers pour aller surveiller le feu
qui couve façon Sidi Bouzid.
En écoutant la gracieuse danseuse venue me dire à
l’ombre des frondaisons de lilas odorants du printemps
percheron toute l’indignation qui sourde dans les
campagnes, je me demandais si en lançant un post sur la
toile, le hasard trouverait un journaliste ami pour
relayer le désespoir des joueurs de fluteaux de
Bonnétable.
Publié le 28 mai 2011 avec l'aimable autorisation de l'auteur.
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