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Bernard Kouchner persiste et signe
Hassane Zerrouky
Mercredi 19 septembre 2007 Iran
. Les explications du ministre des Affaires étrangères suite aux
réactions suscitées par ses propos contre Téhéran laissent
ouvertes la porte à une intervention militaire.
Bien qu’il se soit défendu d’être « un va-t-en
guerre », assurant que son « message était un message
de paix, de sérieux et de détermination », Bernard
Kouchner, ministre des Affaires étrangères, ne s’est guère
montré rassurant. Bien au contraire. En affirmant : « La
situation la pire serait la guerre. Pour éviter cela,
l’attitude française est de négocier, négocier, négocier
jusqu’au bout sans craindre les rebuffades. Et de travailler
avec nos amis européens à des sanctions crédibles », il
laisse clairement entendre que toutes les options, y compris la
guerre, sont sur la table. De ce fait, d’aucuns se demandent si
le compte à rebours pour l’Iran n’a pas bel et bien commencé.
Autrement, pourquoi le chef de la diplomatie française ne déclare-t-il
pas franchement que la France est opposée à toute solution
militaire et qu’elle privilégie une solution négociée ?
RÉACTIONS NÉGATIVES HORMIS DES USA
Hormis Washington (où il sera en visite ce mercredi) qui a
apprécié la fermeté française sur l’Iran après avoir noté
avec satisfaction le changement d’attitude de Paris sur l’Irak,
le moins que l’on puisse dire est que les propos de Bernard
Kouchner ont suscité des réactions pour le moins négatives. La
Chine, membre du Conseil de sécurité de l’ONU, les a désapprouvés.
Elle s’est déclarée opposée au « recours à la force
dans les affaires internationales ». La Russie, autre pays
membre du Conseil de sécurité où le chef de la diplomatie française
a rencontré hier son homologue russe, est sur la même ligne que
la Chine. Une intervention militaire en Iran serait « une
erreur politique et diplomatique », a souligné le
vice-ministre des Affaires étrangères russe, Alexandre
Lossioukov. « Nous sommes convaincus qu’il n’y a pas de
règlement militaire au problème iranien. C’est impossible. »
En Iran, le président Mahmoud Ahmedinejad a minimisé les déclarations
de Bernard Kouchner, assurant qu’il ne les prenait « pas
au sérieux ». Tandis que son ministre des Affaires étrangères
a émis le voeu que « ces déclarations soient de pure forme
et ne correspondent pas aux positions réelles et stratégiques de
la France ». Reste qu’au moment où en Iran la politique
du président Ahmedinejad ne fait pas l’unanimité, les déclarations
de Kouchner risquent d’avoir l’effet inverse du but recherché,
à savoir susciter une réaction unanimiste transcendant les
clivages politiques entre conservateurs et réformateurs.
LE PCF DÉNONCE la dérive atlantiste
Dans les pays arabes, si pour l’heure les gouvernements en
place se sont abstenus de commenter les déclarations de Bernard
Kouchner, au sein de l’opinion arabe, ils sont nombreux ceux qui
font observer que le chef de la diplomatie française ne fait pas
montre de la même intransigeance envers Israël en ce qui
concerne l’occupation de la Cisjordanie, la poursuite de la
colonisation des territoires palestiniens.
En France, le PCF a dénoncé « l’inflexion atlantiste
de la politique étrangère de la France (…) déjà amorcée en
Afghanistan » et « appelle à la plus grande vigilance
devant une surenchère politique et militaire peu compatible avec
les valeurs de la république ». Pour sa part, le Parti
socialiste, sans s’exprimer sur le fond, a réclamé un débat
à l’Assemblée nationale sur la question iranienne.
© Journal l'Humanité
Publié le 20 septembre avec l'aimable autorisation de l'Humanité.
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