Affaires Stratégiques
Clotilde Reiss est prise en otage
Barah Mikaïl
Barah Mikaïl - Photo IRIS
Vendredi 10 juillet 2009 L’arrestation de Clotilde
Reiss est-elle une mesure de représailles vis-à-vis de la
France ?
Les dernières déclarations de la France émettant des doutes
sur la régularité du scrutin présidentiel et condamnant les
violences ont fortement irrité le régime iranien.
L’emprisonnement de Clotilde Reiss est partie prenante du bras
de fer qui se joue entre Paris et Téhéran. C’est une prise
d’otage
Mais les tensions entre les deux pays ne datent pas du 12
juin, jour de la ré-élection de Mahmoud Ahmadinejad, car Paris
est notamment très en pointe sur le dossier nucléaire. Nicolas
Sarkozy est très mal perçu en Iran, plus que Barack Obama qui, à
côté du chef de l’État français, tient un discours plus
rassurant et se montre ouvert à la négociation. Nicolas Sarkozy
a fortement insisté sur le fait que certains points n’étaient
pas négociables, comme la détention par Téhéran d’un arsenal
nucléaire.
Quel message veut faire passer Téhéran ?
Le régime agite la théorie du complot : il s’agit de prouver
que les étrangers, et surtout les Occidentaux, sont derrière le
mouvement de protestation contre la réélection de Mahmoud
Ahmadinejad. Mais l’emprisonnement de Clotilde Reiss est aussi
très significatif pour d’autres raisons. L’arrestation d’un
Occidental témoigne avant tout de la volonté de l’appareil
d’État iranien de neutraliser la posture d’un gouvernement qui
va à son encontre.
C’est ensuite un moyen pour le régime iranien d’avoir des cartes
en main pour négocier avec les pays occidentaux. En détenant une
Française en prison, Téhéran signifie qu’il veut trouver une
voix d’arrangement avec Paris et les pays occidentaux.
Quelles sont les issues possibles ?
Une seule porte de sortie existe. La prise d’otage durera
tant que le gouvernement iranien n’aura pas obtenu un
arrangement à son goût. En d’autres termes, il relâchera la
jeune femme une fois qu’il aura obtenu des garanties suffisantes
de la part de Paris, par exemple par rapport à un éventuel
positionnement belliqueux. C’est pourquoi cette prise d’otage
peut durer. Et en cas d’arrangement entre les deux pays, ce sera
de la diplomatie de coulisses. Nous n’en saurons rien.
Selon les autorités françaises, Clotilde Reiss est
accusée d’avoir pris des photos de manifestants avec son
téléphone portable et d’avoir envoyé un mail. Que penser de ces
accusations ?
Cela montre combien ce régime est incontestablement
paranoïaque. En fait, le régime iranien a une profonde méfiance
pour les moyens technologiques, d’autant plus qu’ils sont bien
maîtrisés par les Occidentaux. D’où ces accusations qui pèsent
contre Clotilde Reiss. À cause d’Internet, le régime iranien
craint de ne pas maîtriser la communication entre les Iraniens
et vers l’extérieur. Il a une peur bleue que la foule arrive à
s’organiser et à renverser le régime. Sur le terrain, là-bas,
tout le monde se sent surveillé
Barah Mikaïl, chercheur à l’IRIS, par
Le Point.fr (9/07/09)
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Publié le 10 juillet 2009 avec l'aimable autorisation de l'IRIS.
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