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Al-Ahram Hebdo
Le bluff
Hicham Mourad
Photo Al-Ahram
Mercredi 26 août 2009
Palestine.
Israël cherche
à réduire les pressions internationales en faisant croire qu’il
a fait une concession sur la question de la colonisation.
Colonisation. C’est le mot d’ordre autour duquel se déroule la
bataille politique aujourd’hui entre Israéliens, d’un côté,
Palestiniens et communauté internationale, de l’autre. Sous
pression des pays occidentaux, de l’Autorité palestinienne et
des Etats arabes pour geler les travaux de colonisation, Israël
cherche à desserrer l’étau en faisant croire qu’il a fait des
concessions, après avoir annoncé la semaine dernière être
disposé à freiner temporairement la colonisation en Cisjordanie
en gelant les appels d’offres à la construction de logements
jusqu’au début 2010, ce qui n’empêcherait toutefois pas la
poursuite des projets privés.
C’est pour convaincre les Européens du
sérieux de sa démarche que le premier ministre israélien
Benyamin Netanyahu a entamé lundi une tournée au Royaume-Uni et
en Allemagne, où il doit rencontrer ce mercredi l’émissaire
américain George Mitchell, avec lequel il tente, depuis des
semaines, de trouver un compromis sur un moratoire pour la
construction de logements dans les colonies israéliennes.
L’envoyé spécial américain mène depuis plusieurs mois des
pourparlers intensifs avec les dirigeants israéliens, alors que
les deux pays, bien qu’alliés, sont en désaccord sur le dossier
de la colonisation. L’Administration américaine exige un gel
total de la colonisation pour favoriser une relance des
négociations avec les Palestiniens. Les grands pays européens
ont adopté la même position.
Or, selon l’organisation israélienne La Paix
Maintenant, la colonisation israélienne ne ralentit pas en
Cisjordanie : depuis le début de l’année, les travaux de
construction ont commencé pour environ 600 nouveaux logements
dans les localités juives implantées dans le territoire
palestinien, selon un rapport publié dimanche par La Paix
Maintenant. Et malgré les assurances données par Tel-Aviv la
semaine dernière, selon lesquelles il a cessé de délivrer de
nouveaux permis de construire pour les colonies de Cisjordanie,
les permis déjà délivrés autorisent la construction de jusqu’à
40 000 nouveaux logements, rappelle l’organisation. D’autre
part, un plan visant à créer un nouveau quartier de colonisation
juive dans la partie orientale de Jérusalem annexée a récemment
été soumis pour approbation à la municipalité de la Ville
sainte, a indiqué dimanche le quotidien Haaretz. Ce projet, dont
l’initiative revient à l’association Elad d’extrême droite,
vouée à la judaïsation de Jérusalem, prévoit la construction de
104 logements ainsi que d’une synagogue, d’une piscine et d’un
bain rituel juif au cœur du quartier de Ras Al-Amud, où vivent
quelque 14 000 Palestiniens. Ce complexe devrait voir le jour
sur des terrains où se trouvait le quartier général de la police
israélienne qui a été transféré dans le secteur E-1 situé en
Cisjordanie entre le nord de Jérusalem et l’implantation de
Maalé Adoumim. Le quartier planifié a été appelé Maalé David et
devrait être relié à celui de Maalé Zeitim dans le même secteur,
où vivent actuellement 51 familles juives. « Ce plan de
construction massive dans un secteur à forte densité de
population palestinienne est extrêmement dangereux pour
l’équilibre urbain », a déclaré Yariv Oppenheimer, responsable
du mouvement La Paix Maintenant.
C’est pour cette raison que l’Autorité
palestinienne a rejeté l’annonce faite par Israël la semaine
dernière, la qualifiant de manœuvre. Les Palestiniens ont fait
valoir que la colonisation se poursuivait sur le terrain, via
des organismes privés ou relevant de municipalités (mais
largement subventionnés par l’Etat). « Israël doit cesser toutes
les activités de colonisation sans exception. Il ne fait que
lancer des ballons d’essai et nous sommes habitués à ce genre de
tromperies », a déclaré le négociateur palestinien Saëb Erakat.
« Ces déclarations sont insuffisantes. Nous voulons que les
Israéliens s’engagent à arrêter la construction et à suspendre
les appels d’offres déjà lancés », a renchéri Nabil Abou
Roudeina, porte-parole du président palestinien Mahmoud Abbass.
Accusations
Dans ces conditions, une reprise des
négociations de paix ne semble pas possible, Palestiniens et
Israéliens s’accusant d’entraves aux pourparlers. Ainsi, un
responsable israélien a dit que les Palestiniens avaient
repoussé des appels du président du Conseil Benyamin Netanyahu
pour une reprise des discussions gelées depuis huit mois, en
posant des conditions préalables. Le négociateur palestinien
Saëb Erakat a démenti ces propos en assurant que les
Palestiniens ne fixaient pas de nouvelles conditions, mais qu’en
revanche, les Israéliens se dérobaient à leur obligation de
stopper le développement des colonies en Cisjordanie occupée et
à Jérusalem-Est. « Nous ne posons aucune condition. L’arrêt des
activités de colonisation et la reprise des négociations sur les
statuts définitifs sont des obligations israéliennes et non des
conditions palestiniennes », a dit Erakat.
L’impasse dans laquelle se trouve le problème
des colonies juives reflète le différend le plus grave affectant
les relations israélo-palestiniennes depuis dix ans. Jeudi, le
président Obama a de nouveau cherché à débloquer la situation en
demandant à l’Etat hébreu, aux Palestiniens et aux Etats arabes
d’agir simultanément pour contribuer à relancer le processus de
négociation. Il a lancé cet appel lors d’un entretien
téléphonique avec le roi Abdallah de Jordanie. La proposition du
chef de la Maison Blanche vise à surmonter le désaccord
israélo-arabe sur le point de savoir qui doit prendre
l’initiative des premiers gestes de conciliation pour remettre
sur les rails le processus de paix qu’Obama s’est engagé à
redynamiser.
Benyamin Netanyahu a pris ses fonctions au
mois de mars en résistant aux pressions du principal allié
d’Israël pour l’arrêt de la politique de colonisation et en
évitant tout engagement en faveur d’une solution à deux Etats.
Depuis, il a tenté de faire certains gestes envers Washington
pour donner l’impression d’avoir changé sa politique. Netanyahu
s’efforce de faire patienter Washington sans s’aliéner les «
faucons » de son gouvernement de coalition. Il a interrompu ses
vacances cette semaine pour convoquer un ministre de son parti,
le Likoud, qui avait qualifié de « virus » les adversaires de
gauche de la politique de colonisation juive. Le ministre des
Affaires étrangères Avigdor Lieberman, chef du parti ultra
nationaliste Yisraël Beiteinu, a, quant à lui, affirmé cette
semaine qu’Israël ne pourrait pas suspendre l’extension des
colonies au-delà d’un certain temps.
Le président palestinien Mahmoud Abbass a
suspendu les pourparlers de paix avec Israël en décembre
dernier, en raison de l’offensive de Tsahal dans la bande de
Gaza. Il a déclaré à diverses reprises que les négociations ne
pourraient reprendre tant que les constructions de logements ne
cessaient pas. Barack Obama a engagé les pays arabes à faire des
ouvertures en direction d’Israël, mais ils insistent pour que
l’Etat juif fasse le premier pas. Les dirigeants arabes se
réclament d’une initiative de paix présentée en 2002 par la
Ligue arabe et proposant de reconnaître Israël en échange de son
retrait des territoires occupés en 1967, de la création d’un
Etat palestinien et d’une solution « juste » pour les réfugiés
palestiniens.
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réservés. ©
AL-AHRAM Hebdo
Publié
le 26 août 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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