Al-Ahram Hebdo
Israël perdra-t-il
les chances de la paix ?
Abdel-Moneim Saïd
Photo Al-Ahram
Mercredi 16 septembre 2009 Une idée est ancrée
depuis longtemps dans la pensée occidentale, que les
Palestiniens ont perdu toutes les occasions qui leur étaient
offertes pour faire la paix. En réponse à cela, il y a eu
toujours des répliques en guise de défense, disant que les
Palestiniens n’ont jamais eu de chances réelles. Cette polémique
qui se répétait sans cesse était l’un des outils de la guerre
psychologique et de propagande dans le conflit arabo-israélien.
Cependant, un intérêt moindre a été orienté vers les occasions
qu’Israël n’a pas saisies tout au long de sa longue histoire.
Depuis le début de l’itinéraire, « la question juive » est
passée d’un simple récit de minorités juives haïes dans un
nombre de pays pour se confiner à un Etat où se sont rassemblés
les juifs. Les Israéliens ont laissé passer la chance dans les
années 1920 après l’entente Fayçal-Eisman, de la mise en place
ensemble d’un Etat indépendant garantissant les droits des
minorités y compris les juifs. Ils ont laissé passer également
une autre chance en 1948, lorsqu’ils ont transformé la Palestine
d’un refuge des juifs persécutés en Europe en Etat israélien. Et
une troisième fois, lorsque les forces israéliennes ont tenté
d’envahir les terres palestiniennes, faisant fi de la résolution
de partage, à un moment où les armées arabes luttaient afin de
l’appliquer.
Mon objectif en étalant ces occasions perdues
est de dire qu’il existe actuellement des chances pour la paix
avec une administration américaine disposée à déployer un effort
présidentiel mobilisant les efforts internationaux et régionaux
afin de mettre un terme au conflit arabo-israélien. Ajoutons à
cela qu’Israël n’a jamais maintenu le calme actuel sur tous ses
fronts, même celui du Hezbollah et du Hamas, et jamais Israël ne
disposait, comme il est le cas maintenant, de chances de
développement économique et de prospérité. Non moins importante
dans ce contexte est l’initiative arabe globale au règlement du
conflit ne garantissant uniquement pas de mettre un terme à
l’état de guerre avec Israël, mais en l’occurrence de coexister
et de normaliser avec lui à la lumière d’un ordre régional
sécurisé. Tout au long des derniers mois, les signaux provenant
de nombreux pays se sont multipliés, faisant état d’une
disposition à présenter des initiatives de bonne volonté. A
l’heure où Le Caire a maintenu l’ouverture de nombreux canaux
avec Israël pour saisir les chances qui lui sont disponibles.
Tout ceci porte à croire qu’Israël a une
chance réelle de régler le conflit arabo-israélien, permettant à
la région de coexister avec les autres pays. D’autre part, ceci
donnerait l’occasion à son peuple de vivre normalement en
contrepartie de son retrait des territoires arabes occupés en
juin 1967 et de l’approbation de la mise en place d’un Etat
palestinien indépendant avec comme capitale Jérusalem-Est. En
réalité, Israël peut réaliser d’énormes gains en réalisant un
règlement juste à la cause palestinienne.
En premier, Israël se débarrassera en partie
de l’hostilité à son égard et l’état de suspicion qui entoure la
légitimité de son existence, voilà plus de six décennies, et
ceci auprès de larges secteurs de l’opinion publique arabe. Y
compris les pays ayant signé avec Israël des traités de paix,
comme l’Egypte et la Jordanie. Jusqu’à maintenant, il s’avère
que les relations sur le niveau populaire sont froides en raison
de l’absence de la confiance mutuelle. D’autant plus que
l’opinion publique populaire a tendance à classer Israël dans la
case de l’ennemi et notamment dans les périodes d’affrontements
entre Israël et les parties arabes. Ce qui s’est manifestement
révélé pendant la guerre du Liban en juillet 2006, la guerre de
Gaza en décembre 2008 et en 2009 avec le Hezbollah et le
mouvement du Hamas.
La paix peut représenter un nouveau début
pour une éventuelle coopération économique efficace dans la
région du Moyen-Orient, ce qui sera bénéfique certes pour
Israël.
La conclusion de la paix avec les
Palestiniens va contrecarrer les prétextes des factions armées,
avec en tête le Hamas et le Djihad islamique de poursuivre
l’affrontement avec Israël. Le fait de se dérober à la paix et
d’ignorer les droits du peuple palestinien engendre souvent des
mouvements de violence chaotiques, tels que les soulèvements
(intifada) et les opérations kamikazes, d’une manière qui
mènerait la région à sombrer dans un état de violence et de
contre-violence.
Les actes de violence connaîtront une
escalade si les Palestiniens n’ont d’autre choix que de
continuer à résister contre l’occupation. La preuve en est que
le mouvement Fatah a renouvelé son engagement, durant sa
dernière conférence, à résister par tous les moyens contre
l’occupation israélienne. Il est difficile également de parier
sur le calme actuel qui règne sur Gaza tant qu’il y a une
dégradation de la situation en raison de la persistance du
blocus d’une part et du trébuchement du règlement politique de
l’autre. Nous ne pouvons pas non plus parier sur la tendance du
Hamas à la modération tant que ceci n’est pas lié à un règlement
politique global, sinon de nouveaux courants plus rigoristes que
le Hamas émergeront en surface. Et enfin, la mise en place de la
paix avec les pays arabes pourrait réduire l’influence de
certaines forces qu’Israël considère comme menaçant son
existence, telles que l’Iran.
Mais selon toute vraisemblance, Israël
laissera passer cette occasion au même titre que les autres.
Ceci revient à deux facteurs intrinsèquement liés. Le premier se
rapporte à la compréhension du statut actuel et l’autre se
rapporte aux résultats découlant de cette compréhension. Lorsque
j’étais à Washington, un ami américain, travaillant dans un
centre de recherches renommé, disait à propos de cette
compréhension de ce statut actuel qu’il y a aujourd’hui un état
de décontraction en Israël et Tel-Aviv ne ressent effectivement
aucune menace à l’heure provenant de Gaza ou de Cisjordanie. En
conséquence à cet état de faits, ils ne sont pas véritablement
motivés pour la négociation. D’ailleurs, on les entendait
souvent prétexter pendant « les jours de menaces » que la partie
palestinienne pratiquait la violence et qu’il n’était pas prêt à
s’asseoir comme allié sur une même table de négociations. Que
désire Israël ? Le calme ou la violence ? Cette logique inversée
à toujours été à l’origine des chances perdues. Lorsque le calme
règne, la paix est écartée parce qu’elle n’est plus une urgence.
Mais si au contraire, l’affrontement est le mot d’ordre, la paix
est écartée parce qu’on est en temps de guerre.
Quant au second facteur, il se rapporte au
comportement de l’actuel gouvernement israélien qui n’a pas
ménagé un effort pour s’affirmer davantage par des opérations
d’implantation actives et agressives. Mais, ceux qui ont vécu
l’expérience du conflit arabo-israélien depuis le début savent
qu’il n’y a pas de paix avec la colonisation, surtout après le
rétrécissement au maximum de la terre palestinienne.
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Publié
le 16 septembre 2009 avec l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo
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