Opinion

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Une idéologie sioniste à
reconsidérer
Morsi Attala
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Mercredi 14 mai 2008
Il existe des signes confirmant
qu’Israël désire actuellement être reconnu en tant qu’Etat
purement sioniste. Il voit dans la célébration mondiale en
grande pompe du 60e anniversaire de sa création la meilleure
occasion pour réaliser son ancien rêve qui a précédé son
existence de dix ans. Il faut noter que ce rêve est ancien et ne
date pas de 2004, comme d’aucuns ont l’habitude de le
considérer, lorsque Bush a prononcé son discours à Aqaba dans
lequel il a évoqué le droit des juifs à disposer d’un Etat.
Celui qui croit que le refus
d’Israël de discuter le droit du retour est lié aux conséquences
qui peuvent en découler, c’est-à-dire la récupération par les
réfugiés de leurs demeures et de leurs propriétés spoliées,
aurait tort. Tel-Aviv est terrifié par l’idée que le droit du
retour frappe au cœur l’idéologie sioniste sur laquelle est bâti
l’Etat d’Israël.
L’expulsion des Palestiniens de
la terre de Palestine fut l’un des piliers de l’idéologie
sioniste à laquelle a appelé Theodor Herzl il y a plus de 100
ans. Lorsqu’il a écrit, le 12 juillet 1895 : « Nous essayerons
d’expulser les démunis en dehors des frontières, en leur
trouvant des opportunités d’emplois là-bas et en même temps on
leur interdira de travailler dans notre pays ».
Avec le même esprit de Herzl, le
sioniste fanatique Israël Zaoui a écrit en 1905 : « Nous devons
nous préparer à expulser les tribus arabes par l’épée, comme
l’ont fait nos aïeux ». Tel était leur plan qui date de plus
d’un siècle, alors que nous sommes préoccupés jusqu’à
aujourd’hui par la lutte opposant le Fatah et le Hamas. Le
danger réel réside dans le fait que ceux qui suspectent le droit
au retour des Palestiniens expulsés en 1948, conformément aux
résolutions des Nations-Unies, ignorent intentionnellement une
série de réalités. Au moment de la nakba, lorsque les
Palestiniens furent victimes de la résolution de partage de 1947
et de la guerre de 1948, les propriétés des juifs à cette date
en Palestine ne représentaient que 8 % de la totalité de la
superficie. Alors que 92 % des territoires étaient la propriété
du peuple palestinien et des Waqfs islamiques qui remontaient à
l’époque ottomane.
Ce jour-là, le plus atroce crime
politique et humain a eu lieu. Lorsqu’une minorité étrangère a
envahi la Palestine, a expulsé ses habitants et a mis en place
l’Etat hébreu sur les décombres de 531 villes et villages.
A mon avis, le fait de se
résigner aux plans israéliens de suspicions soutenus par les
Etats-Unis représente le plus grand danger pour le dossier des
réfugiés. D’autant plus qu’il n’est pas du ressort de n’importe
quelle autorité palestinienne de renoncer à ce droit. Car c’est
un droit authentique aux réfugiés et ils n’ont mandaté personne
pour le négocier à leur place. Le droit au retour est un droit
élémentaire et non pas une simple licence qui expire avec le
temps. En réalité, cette suspicion est sans fondement parce
qu’elle autorise les réfugiés à regagner leurs demeures à
condition de ne pas toucher aux habitants juifs. Cependant,
c’est le contraire qui est vrai. Le retour peut être
enrichissant par exemple au niveau de l’économie israélienne,
notamment dans le domaine agricole qui souffre d’un
sous-effectif.
Malheureusement pour la cause
palestinienne, nous vivons un moment exceptionnel de l’Histoire
où prévaut uniquement la loi du plus fort. Il est évident, en
référence à des témoignages qui datent de 60 ans, que le projet
sioniste avait pour visée de mettre en place un Etat enclavé au
cœur du monde musulman séparant l’aile asiatique de l’aile
africaine. L’objectif étant non pas uniquement d’empêcher son
unité, mais de garantir sa faiblesse et sa dislocation. Ainsi,
l’expérience de 60 ans d’Israël démontre que ceux qui ont
soutenu le projet sioniste avaient pour objectif de saper
n’importe quelle croissance civilisationnelle des Arabes et des
musulmans qui sont préoccupés par des problèmes chroniques qui
épuisent leurs énergies et leurs efforts. Le danger actuel
menace toute la région et non pas seulement la cause
palestinienne ou le droit des réfugiés palestiniens à retrouver
leurs terres. Si Israël ne possède pas le courage de
reconsidérer son idéologie sioniste expansionniste et si les
Etats-Unis, en tant que principal allié, ne s’aperçoivent pas
que le mouvement de l’Histoire prendra en fin de compte son
cours normal, la région ne vivra jamais en paix et ne connaîtra
jamais la stabilité.
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reproduction et de diffusion réservés. ©
AL-AHRAM
Hebdo
Publié le 14 mai 2008 avec
l'aimable autorisation de AL-AHRAM Hebdo

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